Chaque année, Electronic Arts base une grande partie de sa réussite financière sur son vaisseau amiral : FIFA, et depuis deux épisodes EAFC. Et systématiquement, l’essai est transformé, le jeu se vend par palettes (en particulier sur PlayStation) et les exercices fiscaux sont bouclés haut la main. Tout ceci satisfait évidemment l’éditeur américain, qui plus est dans la position préférentielle qui est la sienne, sans aucune concurrence depuis le déclin de Konami et vu la difficulté d’autres acteurs à se positionner sur le marché. Mais l’autosatisfaction mène souvent à se reposer sur ses lauriers. Et malgré les nouveautés cosmétiques apportées tous les ans dans EAFC, le fond ne change pas et même empire depuis FIFA 17 si l’on est gentils, et FIFA 15 si l’on est sincères. Allez, partons sur une critique d’EAFC 25.

Des nouveautés en demi-teinte
Rush, l’aboutissement de la formule Street
Tout au long de son histoire, FIFA s’est accompagné à quelques reprises d’un épisode Street, qui mettait en avant la culture du football de rue. Devenue culte au fil du temps, cette série s’est arrêtée après l’épisode FIFA Street en 2012, avant de revenir dans le titre de base comme un mode de jeu du nom de Volta.
Sans retrouver les sommets de l’épisode de 2012, le mode Volta avait le mérite de faire vivre une certaine culture et une certaine idée du football. Cette année, Electronic Arts opère un nouveau changement avec le passage à un mode de jeu se rapprochant plus du « five » que du futsal. En dehors de cet abandon regrettable du foot de rue, EAFC 25 offre avec Rush l’une de ses idées de gameplay les plus intéressantes depuis des lustres.
Le mode Rush est en effet, à certains égards, à saluer. Jouable à 5 contre 5 en local ou en ligne et avec une règle du hors-jeu qui fluidifie les débats, Rush permet un gameplay plus frénétique que celui du grand terrain, sans que cela ne devienne non plus un mode arcade où tout est permis. Le revers de la médaille est que l’esprit Street n’est plus, avec des dribbles relégués au second plan et une esthétique de jeu finalement assez restrictive. Tout en notant la qualité et l’intérêt du mode Rush, qui plus est avec son intégration dans les modes Ultimate Team et Clubs, nous aimerions ainsi voir dans les prochains jeux EAFC la réintégration d’un gameplay se rappelant aux grandes heures des flip flap de Ronaldinho et des pralines de Cristiano Ronaldo.

Une palanquée d’ajouts cosmétiques sans conséquence
Comme d’habitude dans EAFC, la promotion s’est faite à grands coups d’éléments marketing clinquants et de listes à rallonge d’ajouts pour faire croire à de profondes améliorations. Malheureusement et comme chaque année, ces ajouts sont surtout cosmétiques et n’apportent que peu de profondeur au gameplay ou même à l’expérience globale, à l’image des quelques modifications du mode Carrière.
Nous noterons surtout, en réalité, quelques ajouts qui… empirent l’expérience de jeu. Ici, notre principale critique concerne la gestion d’équipe, qui est rendue à chaque épisode plus incompréhensible que le précédent. Alors qu’il fallait déjà dans EAFC 24 faire une formation spécifique pour chaque tactique (ultra défensive, défensive, offensive et ultra offensive), la dimension tactique ajoutée dans l’épisode 25, avec des styles pour chaque joueur et des sous-menus à n’en plus finir, achève de faire de la gestion d’équipe une corvée. On en arrive presque à lancer les matches avec les formations de base pour s’épargner de modifier notre équipe et devoir passer un temps fou à comprendre les ramifications des options, chacune changeant l’autre même lorsque nous ne le voulons pas.
Un gameplay critiquable
Venons-en au vif du sujet. Dans toute simulation de football qui se respecte, le gameplay devrait naturellement être au centre de toutes les attentions. Bien fâcheusement, le gameplay n’est plus une préoccupation d’Electronic Arts depuis des années maintenant. Tout est au contraire fait pour satisfaire ceux qui consomment le football à mille à heure. L’éditeur américain, fort il est vrai de ses ventes exponentielles qui le confortent dans ses idées, suppose donc que les joueurs recherchent avant tout de la rapidité, du spectacle et la suppression de la tactique et de la réflexion. Dans EAFC 25 comme depuis FIFA 18 au minimum, le gameplay d’EA nie ainsi toutes les réalités du football au profit d’une attaque sur avantagée, d’un milieu inexistant et d’une défense quasi impossible.
De simulation précise, ou du moins qualitative, FIFA/EAFC est devenu avec le temps le reflet de la société de l’instantané. On ne joue plus au foot, on joue au spectacle. On ne réfléchit plus à la tactique, on attaque tout droit sans jamais prendre de plaisir. On n’intellectualise plus le sport, on ne fait qu’en devenir boulimiques.
Alors certes, la vitesse du jeu a été revue à la baisse par rapport à EAFC 24. Mais les défauts du gameplay n’ont pas été gommés pour autant, et la dimension réaliste du football, à savoir une construction réfléchie quelle que soit la tactique, est effacée au profit du seul style qui vaille : l’attaque rapide. Cette dernière est même exacerbée dans le mode Ultimate Team. Mais si ce grief était le seul à avoir contre FUT, le jeu vidéo s’en porterait mieux. Nous passerons sur le modèle économique de ce mode de jeu qui favorise la consommation et les paiements réels avec une insistance sur le hasard et les lootboxes.

Si vous cherchiez donc dans EAFC 25 un jeu vous réconciliant avec le football, nous sommes donc au regret de vous dire que vous serez déçus.
Un avenir contrasté pour les simulations de football
Ceci étant dit, que peut-on conclure sur EAFC 25, et plus généralement sur l’avenir des simulations de football ?
Sur le titre d’EA d’abord, nonobstant les ventes qui vont certainement suivre, nous ne pouvons nous empêcher d’émettre un avis contrasté voire mitigé, tant la forme change un peu tous les ans sans que jamais le fond ne suive. Révolue est l’époque dorée de FIFA 08 à FIFA 14, quand EA développait réellement des simulations et non plus des jeux d’arcade.
Sur l’écosystème du football virtuel ensuite, l’heure n’est pas à la fête non plus. Sans véritable concurrence vu la faiblesse d’E-Football (anciennement PES) de Konami, et ce malgré un gameplay plus convaincant, EAFC avance le plus sereinement du monde, en situation de quasi-monopole. Cela ne favorise évidemment aucune remise en question ni volonté de se surpasser.


Alors, en attendant des jours meilleurs, nous pouvons nous consoler en relançant des jeux de football qui valent le détour : les FIFA Street, les FIFA de 2007 à 2014, ou encore les PES récents, de 2018 à 2021. Pour le reste… alea jacta est.