Histoire de Guerrilla Games

Fondé en 2000, Guerrilla Games est un studio de développement de jeu vidéo basé à Amsterdam, aux Pays-Bas. Depuis sa création, le studio a d’abord publié ses jeux sur Game Boy Color, avant de le faire entièrement sur les consoles PlayStation.

Aux yeux des joueurs et de l’industrie, Guerrilla est principalement connu pour être le studio derrière la série de jeux de guerre à la première personne Killzone, avant de changer drastiquement de formule en publiant le jeu d’action-aventure en monde ouvert Horizon Zero Dawn en 2017.

Mais avant Horizon et avant Killzone, Guerrilla Games a eu, à l’image des autres PlayStation Studios, un développement à plus petite échelle.

Logo de Lost Boys Games

Une simple histoire de potes

Avant les années 2000, les Pays-Bas n’étaient pas réputés pour être une grande terre de développement de jeux vidéo. Cela n’empêchait pas, bien entendu, quelques passionnés de s’y essayer. C’est le cas, entre 1993 et 1998, d’Arjan Brussee, fondateur du studio Orange Games, d’Arnout van der Kamp, fondateur de Digital Infinity, et de Martin de Ronde, fondateur de Formula Game Development.

Dans le monde feutré et petit du jeu vidéo néerlandais des années 1990, tout le monde se connaît. Brussee, Van der Kamp et De Ronde, qui entretiennent alors des contacts réguliers et amicaux, décident en 1999 de fusionner leurs trois studios. Ils proposent à l’entreprise Lost Boys, conglomérat néerlandais du média et du marketing qui cherchait à entrer dans le marché vidéoludique, de se mettre sous son autorité pour devenir leur nouvelle division de jeu vidéo.

Le 1er janvier 2000, ce qui était une simple histoire de potes devient une véritable entreprise nommée Lost Boys Games, atteignant 40 employés dès le mois de novembre. Très vite, Martin de Ronde, qui assumait le rôle de directeur général, se rend compte qu’il n’est pas taillé pour le job. L’entreprise recrute alors un jeune cadre d’une entreprise de conseil pour remplacer De Ronde. Cet homme, c’est Hermen Hulst.

En 2001, le premier tournant de l’histoire de Lost Boys Games survient. La maison-mère, Lost Boys, fusionne avec le conglomérat médiatique suédois IconMediaLab, mais la division Lost Boys Games ne fait pas partie du contrat ; elle devient très vite indépendante, quoique toujours sous le contrôle du PDG de Lost Boys qui possède la division vidéoludique de manière privée.

Hermen Hulst, co-fondateur de Guerrilla Games

Des débuts difficiles et peu reconnus

Au cours de l’année 2001, les développeurs de Lost Boys Games ont une inspiration débordante. Se sentant plus à l’aise sur la console Game Boy Color, ils proposent à plusieurs éditeurs la création de nouvelles licences avec des personnages originaux, mais se heurtent à un mur de méfiance.

Sans succès de ce côté et devant faire ses preuves, Lost Boys Games accepte de mener à bien des projets de commande. Entre 2001 et 2002, le studio publie quatre jeux oubliables mais qui lui permettent néanmoins de se faire la main : Dizzy’s Candy Quest, Rhino Rumble, Black Belt Challenge et Invader.

À partir de 2003, le jeune studio vit son second tournant. Le PDG du conglomérat Lost Boys, qui le possède toujours, fonde une nouvelle entreprise de média qu’il appelle Media Republic, à travers laquelle il acquière 75% de Lost Boys Games. C’est à cette époque que le studio change de nom pour adopter celui connu de tous aujourd’hui : Guerrilla Games.

Un premier aperçu de la gloire

Ainsi nommé Guerrilla Games, le studio entame cette nouvelle partie de son existence avec une ambition renouvelée et des moyens conséquents. Grâce à l’influence de Media Republic, sa nouvelle maison-mère, Guerrilla signe un contrat avec Sony pour le développement d’un jeu de tir à la première personne sur PlayStation 2, et un autre avec Eidos Interactive pour le développement cette fois d’un jeu de tir à la troisième personne prévu sur PS2, Xbox et Windows.

Malgré la difficulté de devoir mener deux projets en même temps, Guerrilla Games réussit l’exploit de les livrer tous deux en 2004. Pour Sony, Guerrilla Games publie Killzone, FPS qui fera sa renommée. Le jeu n’aura toutefois pas eu un accueil totalement positif dès sa sortie, bien qu’il performe au-delà de toutes les espérances au niveau des ventes. En dépassant le million de copies vendues, Killzone devient un jeu Platinum en Europe et un jeu Greatest Hits en Amérique du Nord.

Killzone Édition Platinum. Ce label signifie que le jeu a réalisé de bonnes ventes
ShellShock: Nam'67, le coup dur commercial

Pour Eidos Interactive, Guerrilla publie le TPS ShellShock : Nam ‘67. Le jeu est encore moins bien reçu que Killzone et Eidos décide en premier lieu de ne pas reconduire sa collaboration avec le studio néerlandais.

Au fond, l’entreprise qui aura vu en première le potentiel de Guerrilla Games est Sony. En signant avec les néerlandais un contrat d’exclusivité de développement en mars 2004, la firme japonaise s’assure que les prochains jeux (donc les prochains Killzone) sortiront uniquement sur PlayStation. Sony va encore plus loin à l’automne 2005 : la compagnie rachète l’entièreté de Guerrilla Games, la faisant officiellement entrer dans l’ensemble qui sera plus tard nommé les PlayStation Studios.

Avec Killzone, Guerrilla au sommet du monde

Ainsi acheté par Sony, Guerrilla Games n’a plus à s’inquiéter des financements. Le studio a les coudées franches et quasiment carte blanche pour faire de Killzone une franchise. Après le développement de Killzone: Liberation, qui est sorti en 2006 sur PSP et qui reçoit un succès d’estime, le studio se lance dans le développement de Killzone 2. Et pour la première fois de sa jeune histoire, il peut prendre son temps.

Avec Guerrilla, la volonté de Sony est simple : offrir de manière exclusive une alternative à Call of Duty, Battlefield, Medal of Honor et Counter Strike. Pour se démarquer, Guerrilla place l’intrigue de son titre dans le futur, longtemps avant que Call of Duty ne s’y aventure.

Après trois ans de développement, le studio publie enfin Killzone 2 sur PlayStation 3 en 2009. Le succès est immédiat. Le jeu est encensé par la critique, en particulier pour ses graphismes, dont la qualité surprend pour un jeu FPS, et sa jouabilité nerveuse. Aujourd’hui encore, Killzone 2 est considéré comme l’un des plus beaux jeux de la PS3.

Atteignant le million de copies vendues en à peine trois mois, Killzone 2 est le jeu de la reconnaissance pour Guerrilla. Comme Naughty Dog la même année, le studio s’impose dans l’opinion et l’industrie comme l’un des meilleurs développeurs, tant au niveau graphique qu’au niveau du gameplay.

Au sommet du monde, Guerrillla ne tarde pas à lancer la production d’une suite à Killzone 2. Sobrement appelée Killzone 3, elle sort dès février 2011, avec une réception critique quasi similaire : le jeu est encensé pour sa qualité graphique ainsi que pour sa jouabilité. Sur ces points néanmoins, la concurrence en 2011 est plus forte : Call of Duty: Black Ops est un énorme succès au niveau de son gameplay, et des jeux comme Crysis 2 et Battlefield 3 concurrencent sérieusement Guerrilla pour le titre de plus beau FPS.

Cela n’empêche toutefois pas Sony de réitérer sa confiance au studio néerlandais, qui a la particularité de développer des jeux exclusifs. En ce sens, la concurrence de jeux d’éditeurs tiers n’est pas, pour Sony, à analyser de la même manière.

En réalité, la foi de Sony en Guerrilla est telle que le prochain jeu du studio reçoit la marque de confiance suprême : être un jeu de lancement de la prochaine console PlayStation. C’est le destin de Killzone: Shadow Fall qui, s’il reçoit de moins bonnes critiques que ses prédécesseurs, notamment à cause d’un certain essoufflement de sa formule, sert de démonstration technique des capacités de la PlayStation 4. Sorti en novembre 2013 donc, le jeu atteindra les 2 millions de ventes dès mars 2014, participant comme aucun autre jeu au bon lancement de la PS4.

Au même moment, mais de manière plus anecdotique, la licence Killzone voit l’arrivée d’un nouvel épisode portable, Killzone: Mercenary, sur PlayStation Vita. Le jeu est développé par Guerrilla Cambridge, studio créé par Sony en 1997 et nommé, jusqu’en 2010, SCE Cambridge Studio. Plutôt connu pour être le développeur de la série des MediEvil, SCE Cambridge Studio devient donc en 2010 un studio frère de Guerrilla Games, avant de fermer officiellement ses portes en janvier 2017. Mais si Killzone: Mercenary reçoit un beau succès d’estime, en particulier quant à son gameplay parfaitement adapté à la PS Vita, il ne se vendra pas aussi bien que voulu et restera un projet sans lendemain.

Un virage complet mais payant au cœur de la vie de la PlayStation 4

Sa réputation établie, Guerrilla Games est en 2013 un studio mondialement reconnu, mais qui suscite le doute sur son avenir. Après un Killzone: Shadow Fall que beaucoup voient comme le chant du cygne de la licence, peu sont ceux qui peuvent prévoir la trajectoire qu’empruntera Guerrilla.

Le suspense est finalement levé à l’E3 2015. Dans l’ombre de la révélation d’une sortie prochaine des trois arlésiennes qu’étaient The Last Guardian, Shenmue 3 et Final Fantasy VII: Remake, Guerrilla Games dévoile une licence totalement nouvelle, décrite comme un jeu de rôle et d’action-aventure dans un monde ouvert post-apocalyptique, mené par une héroïne. Si la présentation du jeu plaît, d’importants doutes ne tardent pas à être relevés : le studio spécialisé dans les FPS saura-t-il développer un jeu d’action en monde ouvert ? Le fait de développer une nouvelle licence, dont le personnage principal est qui plus est une femme, n’est-il pas un risque trop important ?

En mars 2017, tous ces doutes sont levés. Après avoir été dévoilé dans l’ombre de jeux plus attendus, Horizon Zero Dawn sort dans l’ombre du mastodonte The Legend of Zelda: Breath of the Wild. Cela ne l’empêche pas de rencontrer un succès immédiat. Le virage complet pris par Guerrilla est salué et le jeu est particulièrement bien critiqué sur ses performances graphiques et ses possibilités de gameplay (comme pour Killzone), surtout pour le combat contre les machines. Malgré le fait qu’Horizon souffre un peu de la comparaison avec The Witcher 3: Wild Hunt sur la construction de son monde ouvert et de ses quêtes, les joueurs apprécient le jeu et lui réservent un accueil historique : vendu à 7,6 millions d’unités un an après sa sortie, Horizon Zero Dawn constitue l’un des meilleurs lancements de nouvelle licence pour PlayStation. En 2019, il dépasse le cap symbolique des 10 millions d’unités vendues dans le monde, puis 20 millions en 2022.

Un avenir scruté de près

Aujourd’hui, plus encore qu’avec Killzone, Guerrilla Games est considéré comme un studio majeur de PlayStation, à tel point que son nombre d’employés est passé à 400 et que son directeur général de (quasiment) toujours, Hermen Hulst, a été promu directeur de Sony Worldwide Studios en 2019. On note aussi qu’Hideo Kojima a lui-même choisi d’utiliser le moteur maison de Guerrilla (Decima Engine) pour la création de son jeu en monde ouvert, Death Stranding. Une nouvelle preuve de l’ascension incontestable du studio.

Avec tout cela, il est donc bien normal que la prochaine production de Guerrilla, suite directe d’Horizon Zero Dawn, soit très attendue. Nommé Horizon Forbidden West, le jeu était parti pour être à coup sûr l’un des évènements vidéoludiques majeurs de l’année 2021, avant son report au 18 février 2022. 

Avec ce report, la communication autour d’Horizon Forbidden West s’est étoffée avec notamment un State of Play dédié en date du 27 mai 2021 (que vous pouvez revoir à droite), ainsi qu’une multitude de posts sur le blog de PlayStation à retrouver sur notre site et qui agissent comme des carnets de bord des développeurs pour expliquer les améliorations apportées au jeu.

Il constituera, plus que les autres exclusivités sorties jusqu’à maintenant, la première grande et complète démonstration technique des capacités de la PlayStation 5. Excusez du peu.

Forbidden West : la suite tant espérée ?

L’un des meilleurs lancement sur PS5 depuis sa sortie, Horizon Forbidden West a répondu à la plupart des attentes construites par les joueurs en cinq ans. Son score de 88/100 sur Metacritic montre aussi un réel engouement critique. Forte de nombreuses qualités, cette suite permit à Guerrilla Games d’étendre l’univers fascinant d’Horizon. Nouveaux environnements, nouvelles tribus, combats enrichis, arbre de compétences densifié, narration d’envergure.

Le studio néerlandais a poussé tous les curseurs, manquant parfois de subtilité. Certains joueurs ont manifesté leur mécontentement vis-à-vis du focus, trop intrusif, au point de parasiter l’interface de jeu lors des phases d’escalade. Heureusement, le jeu est une prouesse graphique, sur PS5 comme sur PS4. D’ailleurs, plus de 40% des ventes ont été réalisées sur la machine historique de la firme japonaise, avec une version PS4 Pro des plus convaincantes. Nous mentionnerons également les efforts réalisés en terme d’accessibilité. De l’image au son en passant par la difficulté, tout est modulable. C’est très appréciable. 

On retiendra d’Horizon Forbidden West une aventure solide, dans un monde ouvert d’une grande richesse, sublimé par une histoire captivante. Immédiatement, le titre est devenu un incontournable pour les amateurs d’open world et de jeux narratifs. Si on peut reprocher un léger manque d’audace et quelques défauts plus ou moins agaçants, il est important de féliciter Guerrilla, qui entérine, si ce n’était déjà fait, son statut de studio incontournable.

Un horizon prometteur...

Nous avons déjà hâte de découvrir la suite de leurs aventures… Le rendez-vous est pris pour Call of the Mountain, développé avec Firesprite, et qui sera le fer de lance du PlayStation VR 2, probablement disponible en 2023. Si les informations au sujet de ce titre à paraître restent très minces, on sait que l’on devrait croiser Aloy et qu’il y aura assurément des liens avec les deux jeux de la licence. Pour autant, les joueurs n’incarneront pas la guerrière de l’Ouest. Ils seront mis dans la peau d’un tout nouveau personnage aperçu dans le premier et unique trailer posté.

Quant à l’opus qui fera suite à Horizon Forbidden West, ce n’est qu’une question de patience… Voyez la déclaration de Mathijs de Jonge pour vous en convaincre : 

« Horizon est une série sur le mystère. Nos deux jeux parlent de mystères dans le présent et le passé. Il existe encore plusieurs arcs narratifs que nous n’avons pas traités. Et vu que Forbidden West se termine sur un gros cliffhanger, ça nous permet de mettre des choses en place pour le prochain jeu. »

– Mathijs de Jonge, Game director d’Horizon, à nos confrères de VGC247