Histoire de Naughty Dog

De sa création en 1984 jusqu’à aujourd’hui, Naughty Dog a parcouru bien du chemin. Crash Bandicoot, Jak and Daxter, Uncharted, The Last of Us… Le studio californien est désormais dans tous les esprits. Pourtant, tout n’a pas toujours été un long fleuve tranquille et Naughty Dog a été mis en grande difficulté de nombreuses fois.

Retour sur ce studio aux 1001 succès.

Logo de Naughty Dog

Une jeunesse ambitieuse

Jason Rubin et Andy Gavin n’étaient que des adolescents lorsqu’ils ont fondé Jam Software. Ce nom signifie « Jason and Andy’s Magic », soit « La magie de Jason et Andy » en bon français. Nous sommes en 1984 lorsque les deux jeunes hommes commencent à travailler sur leur tout premier jeu : Ski Crazed.

Sorti en 1986 sur Apple II, il s’agit d’un jeu de sport et plus spécifiquement de ski. Édité à l’époque par Baudville, Andy et Jason l’ont intégralement développé dans leur garage, après les cours, alors qu’ils n’étaient encore que des adolescents.

Un an plus tard, en 1987, Jam Software lance son deuxième titre : Dream Zone, également publié par Baudville. Le joueur incarne un personnage pris au piège dans ses propres rêves et dont le but est de rejoindre la réalité. Il s’agit cette fois d’un jeu d’aventure, d’abord sorti sur Apple II, puis porté en 1988 sur MS-DOS, Amiga et Atari ST. Bien reçu, le titre a écoulé plus de 10 000 copies et a permis à nos jeunes étudiants de générer environ 15 000 dollars. La grandeur des débuts modestes…

La naissance de Naughty Dog

En 1989, Jam Software élargit ses horizons en s’associant cette fois à l’éditeur Electronic Arts pour la sortie de son troisième titre : Keef the Thief. Jeu de rôle dans lequel le joueur incarne un voleur dans une vue à la première personne, il alterne entre phases de vol, de combat et d’aventure. Il est disponible sur Apple II, Amiga et MS-DOS.

Afin de marquer symboliquement leur émancipation de Baudville, et pour des raisons légales, ils adoptent un nouveau nom : celui de Naughty Dog. Il est attribué en hommage à Morgan, la chienne qui accompagnait nos programmeurs. Naughty Dog devient à cette occasion le plus jeune studio tiers à passer un accord avec Electronic Arts. Pour autant, ce troisième jeu est fortement critiqué pour son humour omniprésent et dérangeant, choix fortement influencé par l’éditeur.

Keef the Thief
Rings of Power, premier jeu du studio sur console

Nous sommes en 1991 lorsque Naughty Dog, toujours aux côtés d’Electronic Arts, lance son quatrième jeu : Rings of Power, exclusivement sur Mega Drive. Il est d’ailleurs le premier titre du studio à sortir sur console. Il s’agit d’un jeu de rôle au tour par tour dont l’environnement est intégralement en 3D isométrique. Le joueur incarne un sorcier qui a pour mission de récolter onze anneaux qui l’aideront à venir à bout d’une redoutable menace. Ayant reçu une critique mitigée, le jeu était apprécié pour son sens du détail et son exploration, mais souvent critiqué pour ses problèmes d’ergonomie liée à sa dimension RPG.

Trois ans plus tard, en 1994, Naughty Dog lance son premier jeu en collaboration avec Universal Interactive Studios, après plusieurs années de partenariat avec Electronic Arts. Des années relativement peu glorieuses contrairement à leurs débuts. Ils croisent alors la route de Mark Cerny, aujourd’hui connu pour être l’architecte des PlayStation 4 et PlayStation 5, qui approuve le projet au point de signer pour trois jeux supplémentaires. Ils donnent ensemble naissance à Way of the Warrior sur 3DO, qui est cette fois un jeu de combat.

Malheureusement, le titre reçoit un accueil critique et commercial peu chaleureux, pour ne pas dire catastrophique, car souvent considéré comme une mauvaise copie de Mortal Kombat. Cela pousse donc Naughty Dog à effectuer une profonde remise en question de sa façon de concevoir des jeux vidéo.

Way of the Warrior

L'éveil d'un studio star

Sous les conseils et l’appui de Mark Cerny, alors vice-président d’Universal Interactive Studios, Jason Rubin et Andy Gavin se lancent dans la création d’une nouvelle mascotte dont seules les années 90 en avaient le secret. Des décisions majeures sont ainsi prises en interne et l’équipe est bien prête à déployer les grands moyens. En effet, en 1994 le studio quitte Boston et part s’installer en Californie afin d’entamer sa nouvelle vie. Ils s’entourent des meilleurs talents de l’industrie pour donner naissance à celui qui était autrefois nommé, en interne, Willy The Wombat.

Premières esquisses de "Willy The Wombat"

En 1996, Naughty Dog lance la saga Crash Bandicoot avec un tout premier épisode du même nom, après deux années de développement. À sa sortie, le titre est un succès immédiat et devient naturellement la mascotte phare de la console de Sony : la PlayStation. Jeu de plateforme dans une ambiance tropicale, il est le premier titre entièrement développé en 3D par le studio, s’imposant rapidement comme le nouveau standard de qualité du genre. Doté d’un humour sympathique, de personnages hauts en couleur et de graphismes sensationnels pour l’époque, la licence se forge sa propre identité et devient le visage référent de la marque japonaise. Une image qui a façonné son succès à grande échelle car moins d’un an après sa sortie, voilà qu’il avait déjà écoulé plus de 2 millions de copies dans le monde. Crash Bandicoot a, au total, dépassé les 6,8 millions en fin de vie.

Un deuxième épisode est sorti l’année suivante, en 1997. Intitulé Crash Bandicoot 2: Cortex Strikes Back, cet opus est souvent considéré comme le meilleur de la série. Plus accessible que son prédécesseur, il est également l’épisode le mieux vendu avec un total de 7,5 millions de copies dans le monde. L’ascension continue, Naughty Dog croque à pleines dents dans la gloire et le succès après tant d’années passées à se chercher.

Le dernier de la trilogie, sorti en 1998 et nommé Crash Bandicoot 3: Warped, s’est quant à lui écoulé à 7,1 millions d’unités. Une saga qui, au fil des épisodes, a su prouver sa constance dans ses chiffres de ventes, preuve indéniable de sa capacité à fidéliser les joueurs. Au total, on compte plus de 22 millions de disques vendus à travers la planète pour la saga Crash Bandicoot. Une saga qui a d’ailleurs rencontré un succès tout particulier au Japon malgré les origines occidentales du studio. Un véritable sans-faute pour notre ami des îles Wumpa, aujourd’hui considéré comme une légende malgré lui. À noter que la licence était la propriété d’Universal Interactive Studios, et non celle de Sony ou de Naughty Dog.

En 1999, le studio remet en question sa série phare et surprend le public avec le retour de sa mascotte dans un tout nouveau genre grâce à Crash Team Racing. Fortement inspiré de la célèbre licence Mario Kart, le titre parvient totalement à s’en émanciper grâce à une histoire, un gameplay et une approche qui lui sont propres, au point de lui aussi rencontrer un très joli succès critique et commercial. Naughty Dog prend des risques, mais Naughty Dog roule sur l’or.

Sur les traces du passé

Le changement de siècle s’accompagne de restructurations pour le studio californien. Dès le mois de janvier 2001, après des années de collaboration, Sony fait officiellement l’acquisition de Naughty Dog. Le constructeur, alors dans une logique de rachats massifs à cette époque, acquiert en toute logique le studio derrière la licence phare de sa marque.

Sony croit dur comme fer au potentiel des équipes californiennes. Un investissement rentable qui va donner naissance à de formidables licences. Et le premier fruit de cette union se nomme donc Jak and Daxter.

Jak and Daxter: The Precursor Legacy, premier opus de la nouvelle licence du studio, débarque en toute fin d’année 2001 à destination de la très populaire PlayStation 2. Le deuxième épisode, Jak 2 : Hors la Loi ne voit quant à lui le jour qu’en 2003. Un dernier opus arrive enfin en 2004, sobrement intitulé Jak 3. À l’image de Crash Bandicoot, la saga s’accompagne d’un humour omniprésent et prend également l’apparence d’un jeu de plateforme avec un tournant vers l’action évident. Plus grande, plus riche, plus ambitieuse par sa dimension « monde ouvert », la saga Jak and Daxter parvient à trouver son succès auprès du public, bien qu’elle n’atteigne pas les chiffres stellaires réalisés par Crash Bandicoot. Malgré l’attractivité de la PlayStation 2, Jak and Daxter est confronté à une forte rivalité au vu de la popularité émergente de Ratchet and Clank par Insomniac Games, ou encore de Sly Cooper développé par Sucker Punch. Trois licences complémentaires pour trois studios aux destins liés, puisqu’ils rejoindront tous la même maison : celle des PlayStation Studios.

À l’image de CTR en 1999, Naughty Dog réitère la formule en proposant une version alternative de sa licence dans un épisode spécial : Jak X. Alors que nous sommes en 2005, ce jeu de course effréné met l’accent sur l’action grâce à ses affrontements motorisés dynamiques et une nervosité au cœur du gameplay. Mais encore une fois, le succès est malheureusement incomparable à celui de son ancêtre malgré ses qualités ludiques. Le concept se veut bien moins novateur et subtil que ne l’était Crash Team Racing en son temps. Jak et Daxter n’ont pas l’aura du personnage de Crash Bandicoot malgré leur popularité.

Jak 4, le projet annulé

Cela est peu connu, mais Jak 4 a bel et bien existé à un moment donné chez Naughty Dog.

En effet, des années après la fin de la saga et suite au succès tonitruant de la licence Uncharted, le studio californien s’est lancé dans la préproduction d’un nouvel opus de Jak au début des années 2010. Une idée qui ne datait pas de la veille puisque les équipes avaient déjà à l’époque pour envie de rebooter la saga.

En collaboration avec la boîte Scribble Pad Studios, Naughty Dog a diffusé des artworks officiels du jeu réalisés par James Paick, en plus de dévoiler des informations concrètes à son sujet.

Notre cher Jak a bien changé

On y apprend et découvre que le titre aurait dû prendre place dans un univers réaliste et à l’ambiance plus mature. Supposé s’inspirer de la saga portée par Nathan Drake, notamment sur sa partie technique et artistique, il devait aussi en reprendre les codes. Sur les images, Jak arbore des traits plus humains. Mais il devait également en être de même pour Daxter, qui aurait ainsi permis de conserver la touche humoristique de la saga malgré son orientation plus sérieuse. Une orientation comparable à un risque et qui est probablement l’une des raisons de l’annulation de cet épisode. Qui sait, peut-être renaîtra-t-il un jour de ses cendres…

Rencontre avec l’El Dorado

De 2005 à 2007, Naughty Dog est entré dans un tournant de sa carrière. Après deux licences de plateforme à succès, il est temps pour le studio de prendre son envol et de trouver sa voie dans le jeu d’aventure.

En 2004, Andy Gavin et Jason Rubin, les deux amis de toujours, quittent Naughty Dog, studio dont ils sont les pères fondateurs depuis 20 ans. Le relais est alors transmis à Evan Wells et au français Christophe Balestra, qui deviennent tous deux les nouveaux co-présidents. Malgré le succès (relatif) de Jak and Daxter, il est temps pour Naughty Dog de profiter de ces changements structurels afin de réorienter sa vision créative. L’occasion de voir émerger celle qui va avoir une influence majeure dans le studio pour les années à venir : Amy Hennig, future réalisatrice et scénariste d’Uncharted.

Evan Wells
Christophe Balestra
Amy Hennig

Jeu d’action-aventure avec un système de résolution d’énigmes, Uncharted: Drake’s Fortune est le chapitre fondateur du renouveau pour Naughty Dog en 2007. Piochant ses inspirations dans le jeu vidéo en se réappropriant les codes de la saga Tomb Raider, le titre puise également ses idées dans le cinéma avec pour référence première Indiana Jones. L’aventure nous amène à suivre la piste de Sir Francis Drake en quête de l’El Dorado.

Si le titre reçoit un plutôt bel accueil critique et commercial pour ses personnages attachants avec Nathan Drake, Victor « Sully » Sullivan et Elena Fisher en têtes d’affiche, il a malgré tout été limité par les difficultés du studio à exploiter l’architecture complexe de la PlayStation 3. Une œuvre efficace donc, mais un goût d’inachevé demeure au sein des équipes, des joueurs et de la presse.

Deux ans plus tard, en 2009, Naughty Dog est propulsé au panthéon du jeu d’action-aventure. Véritable prouesse et démonstration technologique, Uncharted 2: Among Thieves se voit littéralement acclamé par la critique. Abouti à tous les niveaux, il est la concrétisation de ce que souhaitaient réaliser les équipes avec le premier opus : un jeu à l’action dense, rythmé et à l’orientation cinématographique assumée.

Suite directe de l’épisode Drake’s Fortune, il nous mène jusqu’à l’Himalaya sur les traces de Marco Polo, à la recherche de la Pierre de Chintamani. Véritable appel au voyage pour sa dimension globe-trotter, il est également l’épisode de la consécration pour le studio californien. L’occasion qui plus est de faire les premiers pas vers le mode multijoueur en ligne. Un chef d’œuvre intemporel tant il a posé à lui seul les nouvelles fondations du jeu d’action-aventure moderne.

Sur sa merveilleuse lancée, Nathan Drake revient sur le devant de la scène en 2011 avec un troisième épisode explosif intitulé Uncharted 3: Drake’s Deception, soit « L’illusion de Drake » en français. Sur les traces de son prédécesseur, il en reprend tous les codes pour proposer un voyage inédit. C’est désormais vers l’Atlantide des sables que celui-ci nous mène, partant de Londres jusqu’au Moyen-Orient. Réitérant tous les succès critiques et commerciaux de son prédécesseur, il prouve une nouvelle fois la supériorité de Naughty Dog à créer des blockbusters vidéoludiques.

Une compilation remasterisée des trois épisodes sort en 2015 sur PS4, développée par Bluepoint Games mais avec le soutien des pères de la licence. De même pour l’opus PS Vita intitulé Uncharted: Golden Abyss, en 2011, qui se déroule avant les événements du tout premier épisode. Crée par Bend Studio, Naughty Dog a malgré tout gardé un œil sur le déroulement du projet.

Côtoyer les sommets

En 2009, après la sortie d’Uncharted 2, Naughty Dog est pour la première fois de son histoire passé en mode de fonctionnement multi-projets. Alors qu’une équipe allait sereinement entamer la production d’Uncharted 3, une deuxième s’est créée dans l’objectif de donner naissance à une nouvelle licence et ainsi la faire coexister aux côtés de leur poule aux œufs d’or (période durant laquelle Jak 4 est né avant d’être annulé).

En charge de la saga Uncharted, Amy Hennig poursuit son travail sur la licence tandis que l’équipe californienne voit émerger en son sein deux hommes au rang de futurs Game Directors. Bruce Straley, présent depuis 1999 et ayant co-dirigé Uncharted 2 aux côtés de Hennig, et enfin Neil Druckmann, autrefois programmeur sur Uncharted: Drake’s Fortune mais ayant également collaboré avec Hennig sur l’écriture du jeu. Deux hommes parfaitement taillés sur le papier pour dessiner ensemble l’avenir de Naughty Dog.

Bruce Straley
Neil Druckmann

The Last of Us est le fruit d’une réflexion commune née entre Bruce et Neil. Tandis qu’ils regardaient ensemble un documentaire sur les fourmis et le processus d’infection qui les affectaient à cause du champignon cordyceps, ils se sont demandé ce que cela produirait si cette dernière touchait l’être humain. De cette simple pensée a commencé à se dégager l’idée d’un monde post-apocalyptique. Un genre fortement à la mode à l’époque mais où les personnages et leurs relations seraient au cœur du développement de l’histoire.

Prenant place en 2033, le joueur incarne Joel, 20 ans après le début d’une épidémie. Tourmenté par son passé, l’homme va un jour faire la rencontre d’Ellie, une jeune fille qui va bouleverser sa vie et avec qui il va traverser les États-Unis. S’attachant peu à peu l’un à l’autre, les deux personnages vont être amenés à faire des choix difficiles. The Last of Us raconte l’histoire d’une relation père-fille de substitution, à travers un road-trip riche en rebondissements…

Après plusieurs années de production intensives, le 14 juin 2013, The Last of Us est enfin lâché dans la nature. Encore une fois, il devient immédiatement une référence en posant de nouveaux standards. Prenant la forme d’un jeu d’action-aventure à la troisième personne, il s’accompagne d’une dimension horrifique parfaitement maîtrisée.

Acclamé pour sa plume subtile et ses personnages bluffants de réalisme, il pousse la PlayStation 3 dans ses derniers retranchements, élevant les graphismes à un autre niveau. Tranchant avec les jeux post-apocalyptiques concurrents, The Last of Us se démarque essentiellement par le soin accordé à sa narration et à sa réalisation, donnant lieu à des cinématiques dignes du cinéma.

Porté par des acteurs transcendés par leur personnage, The Last of Us est aujourd’hui souvent considéré comme l’un des meilleurs jeux de tous les temps. Il rencontre une deuxième vie sur PlayStation 4 en juillet 2014, soit un an après sa sortie initiale. Il est sublimé par des graphismes retravaillés et par une fluidité à 60 FPS. En cumulant les différentes versions, The Last of Us est à ce jour la licence PlayStation la plus vendue de tous les temps avec un seul épisode, dépassant désormais les 20 millions d’unités dans le monde.

Gérer plusieurs développements en simultané était un pari risqué. Mais c’est haut la main que Naughty Dog l’a relevé.

La nouvelle ère Uncharted

Débuté en 2011 par une petite équipe en interne menée par Amy Hennig, un nouvel épisode de la saga Uncharted est officiellement annoncé le 14 novembre 2013.

Mais le développement ayant rencontré de nombreuses difficultés et n’avançant pas réellement comme escompté, Bruce Straley et Neil Druckmann sont appelés en renfort par les deux présidents de Naughty Dog, qui souhaitent les voir reprendre le projet en main.

Suite au succès phénoménal de The Last of Us, les deux hommes ont la confiance du studio et finissent par accepter le challenge, à la seule condition de rebooter le développement du jeu et d’en avoir le contrôle total. Une demande qui a été acceptée.
Amy Hennig ainsi qu’une partie de son équipe quittent alors le studio en 2014, dans des conditions toujours tenues secrètes.

Après deux années de travail acharné, Uncharted 4: A Thief’s End voit enfin le jour sur PlayStation 4 le 10 mai 2016. Présenté comme l’ultime et dernier volet des aventures de Nathan Drake, Naughty Dog nous plonge dans un récit plus intimiste afin de découvrir une nouvelle facette de la personnalité de ses protagonistes.

 

Véritable synthèse du talent du studio, il hérite à la fois des codes de sa saga d’appartenance tout en jouissant d’un soin d’écriture égal, si ce n’est encore supérieur à celui accordé à The Last of Us trois ans plus tôt. Son sens du voyage et son moteur irréprochable font de lui l’une des plus belles prouesses technologiques de cette industrie à l’heure actuelle.

 

Avec plus de 16 millions d’exemplaires écoulés dans le monde, il est à ce jour le plus grand succès du studio (hors remaster) et parmi les exclusivités les mieux vendues de la PlayStation 4. À l’image d’Uncharted 2 en son temps, il a marqué sa génération de son empreinte.

Si Uncharted 4 symbolise la fin de l’histoire de Nathan Drake, le studio revient avec un dernier épisode en août 2017, à l’occasion du dixième anniversaire de la franchise.

Cette fois dirigé par Shaun Escayg et développé en seulement une année, Uncharted: The Lost Legacy était un DLC qui s’est finalement transformé en véritable standalone. Mettant Chloe Frazer et Nadine Ross au cœur de son histoire et de sa narration, il est une lettre d’amour envoyée à la licence.

Explosif dès que nécessaire, il n’en demeure pas moins subtil et parvient à démontrer que la formule est tout aussi efficace, même en l’absence de Nathan Drake. Le héros peut dormir en paix.

Sur la pente glissante

Après la fin du développement de The Last of Us en 2013, puis de son DLC narratif Left Behind début 2014, Neil Druckmann et Bruce Straley avaient commencé à imaginer une suite au jeu. Mais Uncharted 4 leur est tombé dessus et les prévisions ont été radicalement bouleversées.

Le 9 mars 2017, le co-président Christophe Balestra annonce son départ de Naughty Dog. Il était présent dans le studio depuis 2002, alors qu’il commençait à l’époque en tant que programmeur.

Après dix-huit années de carrière, soit depuis 1999, c’est au tour de Bruce Straley de quitter le navire fin 2017. Il est quant à lui principalement réputé pour avoir été le Game Director de The Last of Us et Uncharted 4. Il confie avoir été épuisé par le développement de ce dernier et admet que c’est ce qui l’a poussé à en partir. Enfin, c’est Shaun Escayg, directeur créatif d’Uncharted: The Lost Legacy, qui a quitté le studio en début d’année 2018.

De nombreux départs d’employés de tous les départements du studio se sont enchaînés entre 2017 et 2020, dont celui de Jonathan Cooper. Tout cela a alors entraîné des restructurations précipitées pour le développement de leur projet en cours : The Last of Us Part II.

En difficulté...

...mais toujours au sommet

Annoncé à la PlayStation Experience en décembre 2016, la suite de The Last of Us a pendant longtemps été le titre le plus attendu par les joueurs. Sortie le 19 juin 2020, soit presque sept ans jour pour jour après sa prédécesseure, l’œuvre de Naughty Dog a fait l’unanimité du côté de la presse, mais beaucoup moins de celui des joueurs. Sans doute l’œuvre la plus complexe jamais produite à ce jour par le studio.

Ayant officiellement émergé dans les esprits de Bruce Straley et Neil Druckmann en 2014, The Last of Us Part II a vu son développement être mis de nombreuses fois en pause. Les productions d’Uncharted 4 et Uncharted: The Lost Legacy, suivies des nombreux départs du studio… Tant d’aléas qui ont été la cause d’une sortie aussi tardive, matérialisée par de nombreux reports. Déjà réputé pour sa culture du crunch abusive après plusieurs développements consécutifs, le studio a été la cible de nombreuses affaires dévoilées au grand jour. Tandis que les équipes avaient pris soin de parfaitement contrôler leur communication afin de cacher au public ce qu’était réellement le jeu, il a été frappé de leaks révélant une grande partie de l’histoire.

L’aventure prend place cinq années après les événements de la première partie. Le joueur incarne désormais Ellie et va la suivre dans sa quête de vengeance personnelle. Elle va croiser la route de Abby, personnage clé de cette nouvelle intrigue.
Plus froid, plus violent, The Last of Us Part II met la haine au cœur de son propos sans jamais en oublier les nuances. Jouissant d’une dimension cinématographique omniprésente, cette partie 2 se présente comme l’un des plus beaux jeux de sa génération aux côtés d’Uncharted 4. Véritable prouesse sur sa motion-capture et ses animations, il élève incontestablement le niveau dans le domaine de la réalisation vidéoludique, mais n’en reste pas moins excellent sur le reste. Si ses choix narratifs peuvent troubler, voire diviser, les relations entre les personnages ainsi que leur traitement sont ici propulsés à un tout autre niveau. Trois jours seulement après sa sortie, le jeu avait déjà dépassé les 4 millions d’unités vendues dans le monde. Il devient officiellement le meilleur démarrage d’un jeu dans l’histoire de la marque PlayStation, devant Marvel’s Spider-Man.

En novembre et décembre 2020, le titre a raflé de nombreuses récompenses aux Golden Joystick Awards, mais également à la cérémonie des Game Awards qui lui a décerné les prix suivants : meilleure performance pour Abby (incarnée par Laura Bailey), meilleur Audio Design, meilleure narration, meilleur jeu d’action-aventure, meilleur Game Direction ou encore le prix de la meilleure innovation dans l’accessibilité. Une jolie avancée pour le jeu vidéo. Et par-dessus tout, le studio s’est vu décerner le prix ultime du jeu de l’année 2020 grâce à The Last of Us Part II, après l’avoir manqué de peu avec Uncharted 4 en 2016. En couvrant autant de domaines, Naughty Dog a encore une fois prouvé ce dont ils étaient capables et conservent leur étoile au panthéon.

Le 5 décembre 2020, Neil Druckmann devient officiellement co-président du studio aux côtés d’Evan Wells, tandis que Alison Mori et Christian Gyrling sont tous deux promus au rang de vice-présidents.

Studio phare de PlayStation, Naughty Dog a démontré à travers les années sa capacité à se remettre en question, franchissant une nouvelle étape à chaque production créée. Essentiellement rendu célèbre grâce au tout premier épisode de Crash Bandicoot puis transcendé par le succès d’Uncharted 2: Among Thieves, le studio californien a été propulsé au rang des plus grands de l’industrie grâce à The Last of Us et son tournant narratif pleinement maîtrisé. Au-delà de son savoir-faire, le studio est également la poule aux œufs d’or de PlayStation tant ses productions s’inscrivent toutes comme des system-seller. Grâce à son histoire et ses 36 ans d’expérience, Naughty Dog est aujourd’hui synonyme de confiance et de qualité.

Après la plate-forme, le jeu d’action-aventure et enfin les univers post-apocalyptiques narratifs, quel avenir Naughty Dog peut-il bien nous réserver ? Suite, nouvelle licence ou bien résurrection d’une saga plongée dans le sommeil ? Qu’importe la réponse, la grandeur siège désormais à leurs pattes.