Histoire de la PS2

La PlayStation 2 est un monument absolu dans le monde du jeu vidéo pour la simple raison qu’il s’agit encore aujourd’hui de la console la plus vendue de tous les temps avec plus de cent cinquante cinq millions de consoles achetées. Un chiffre inimaginable, surtout lorsque l’on se dit que la PlayStation 2 n’est que la deuxième console de Sony dans un marché déjà bien dominé par Sega et Nintendo. Comment la PS2 a-t-elle pu réaliser un tel exploit et quel héritage a-t-elle laissé ?

Le développement de la PlayStation 2 a commencé à peu près au même moment que la sortie de la PlayStation première du nom. En général, quand un constructeur sort une console, il n’y a pas de délai avant la mise en chantier du modèle suivant, qu’il soit une simple version améliorée du modèle existant ou une toute nouvelle console. Quoi qu’il en soit, ce n’est qu’en 1997 que les premières informations sur la console fuitent, et c’est plutôt du lourd, puisque l’on parle alors de la rétrocompatibilité avec les jeux PS1, de l’intégration d’un lecteur DVD, et d’une connectivité à Internet. Le nouveau millénaire approche à grand pas et il paraît évident que ce qui deviendra la 6ème génération de consoles sera très différente de la précédente.

L’Emotion Engine

Le processeur de la PlayStation 2

L’Emotion Engine est le cœur de la PlayStation 2, à savoir son processeur. Ce dernier est manufacturé par Sony Computer Entertainment (SCE) et Toshiba spécifiquement pour la console. Pour faire simple, l’Emotion Engine contient 8 « unités » séparées qui remplissent chacune leurs propres tâches et pas moins de 10,5 millions de transistors. La console sera considérée comme une « 128 bits », même si tous les éléments de la console ne correspondent pas sur le plan technique à cette appellation (l’Emotion Engine est en réalité un processeur 64 bits.) Il faut aussi savoir que ce processeur sera également utilisé dans les premiers modèles de PlayStation 3 vendus au Japon et aux États-Unis afin d’assurer la rétrocompatibilité avec les jeux PS2. Au fur et à mesure des révisions de la console, la PS3 sera dans un premier temps privée de l’Emotion Engine mais pourra tout de même émuler les jeux PS2 avec le Cell et le Graphics Synthesizer. Ensuite, la version slim de la console enlèvera ce Graphics Synthesizer pour des raisons de coûts, ce qui rendra la PlayStation 3 définitivement incompatible avec les jeux PS2.

Le 13 septembre 1999

Le lundi 13 septembre 1999 à Tôkyô, Sony dévoile enfin au monde entier la PlayStation 2. Pendant une heure et demie, et devant une assemblée de près de mille personnes, journalistes et insiders venus du monde entier, Sony va tout dévoiler au sujet de celle qui va succéder au miracle PlayStation.  Premièrement, Sony annonce que la console s’appellera « PlayStation 2 », et cela ne saute pas aux yeux aujourd’hui, mais le nom « PlayStation 2 » est une véritable annonce en soi à cette époque. La PlayStation s’appelait la « PlayStation » et non la « PlayStation 1 », donc la prochaine console de Sony aurait très bien pu emprunter un chemin différent de la simple numérotation. Les rumeurs allaient donc bon train avant l’annonce officielle du 13 septembre, avec par exemple : « PSY », « PlayStation Next », ou encore « PS2000 ». Ce sera finalement la PS2, l’abréviation officielle de la console.

La deuxième grosse annonce concerne le prix et la date de sortie de la console, qui sortira le 4 mars 2000 au Japon (un samedi) au prix de 39,800 Yen (environ 360$ aujourd’hui). Sony table déjà à ce moment pour une sortie dans le monde à la fin de l’année 2000 avec peut-être un prix réduit par rapport au lancement japonais.

Sony annonce au même moment les spécificités de son lecteur de disque, et c’est du lourd pour l’époque puisqu’ils annoncent que la console pourra lire les DVD et les CD, et que la console sera rétrocompatible. La firme japonaise précise alors qu’il sera possible de faire la différence entre les CD et les DVD via la couleur de ceux-ci (bleu pour les CD et argenté pour les DVD). Sony insiste d’ailleurs sur le fait qu’il ne faudra vraiment aucun équipement supplémentaire afin de lire les DVD. Enfin, l’entreprise s’adresse aussi aux développeurs en leur précisant que si ces derniers développent leurs jeux à destination de la PlayStation d’une certaine façon, ces derniers pourront bénéficier d’une meilleure version sur PS2, avec par exemple des temps de chargement douze fois plus rapides !

Sony annonce véritablement la totale le 13 septembre 1999, puisque la nouvelle manette ainsi que la nouvelle Memory Card se voient également dévoilées le même jour. La PS2 sera livrée avec la DualShock 2 et une carte mémoire de 8 MB, le tout avec un disque de démo contenant plusieurs jeux. Concernant la DualShock 2, bien qu’elle soit visuellement totalement identique à la DualShock (sauf la couleur noire et l’inscription en bleu du mot « DualShock 2 » sur le haut de la manette), il en est tout autre de l’intérieur de la manette. La DualShock 2 est plus légère que sa grande sœur et tous ses boutons (sauf start, select, et le bouton analog) sont analogiques. Cela veut dire que les boutons de la DualShock 2 sont sensibles au degré de pression que le joueur exerce dessus, ce qui permet d’intégrer des nuances de sauts dans les jeux PS2. La DualShock 2 est également compatible sur PlayStation et PlayStation 3 (via un adaptateur USB pour cette dernière).

Pour ce qui est de la nouvelle carte mémoire par rapport à la Memory Card de la PlayStation, c’est le jour et la nuit. La Memory Card de la PS2 peut stocker 64 fois plus de données et est 250 fois plus rapide. A terme, Sony établira un partenariat avec l’entreprise Katana afin de fournir sous licence officielle des Memory Card de 16 et 32 MB, tandis que des cartes mémoires non officielles monteront jusqu’à 128 MB. La DualShock 2 et la Memory Card de 8 MB seront chacune vendues séparément pour 3500 Yen (28 €) et Sony annonce encore le même jour travailler sur un nouveau Multi-Tap.

Après la manette et le Memory Card, Sony dévoile en partie ses plans pour le online. Ils prévoient une infrastructure énorme, mais qui ne sera mise en place qu’en 2001. Les joueurs pourront améliorer leur PS2 avec un disque dur ajouté à la console qui sera utilisé afin de télécharger des nouveaux jeux directement depuis les serveurs de Sony. Cela constitue une nouvelle révolution dans le monde du jeu vidéo, et Sony se doit de trouver un moyen de sécuriser cette nouvelle façon de se procurer des jeux. En 1999, la firme compte en tout cas sur d’autres compagnies afin de fournir un navigateur à la console. Nous en sommes encore aux tout débuts d’internet, et Sony va adapter sa console via ses différents modèles en prenant en compte les évolutions liées à internet.

Pour finir cette conférence du 13 septembre 1999, quoi de mieux que de dévoiler le design de la console. Vous le connaissez tous, mais les réactions durant la conférence furent partagées selon les goûts de chacun. Tous s’accordent néanmoins pour dire que la PS2 possède un look différent. Elle est grosse et plate alors que les consoles de l’époque étaient plutôt petites et avec des formes. La PS2 sera fournie avec un support pour la poser horizontalement et un deuxième peut-être acheté afin de mettre la console à la verticale. Pour ce qui est des couleurs, Sony expliquera que le noir symbolise l’immensité de l’espace et que le bleu des supports représente la terre.

Un monstre de puissance

L’annonce de la PS2 se déroule sans accroc, et les magazines font saliver comme jamais les joueurs au sujet de la console qui doit arriver en l’an 2000 dans le monde entier. Il faut dire que tout comme ce fut le cas pour la PlayStation, la PS2 est un monstre de puissance, qui va même permettre à des jeux comme Gran Turismo 4 de s’afficher en 1080p ! Ken Kutaragi, toujours présent chez SCE à l’époque, parlera de la PS2 comme d’une console capable à sa sortie de faire ce que les PC pourront effectuer seulement deux ou trois ans plus tard. Ce genre d’affirmation est totalement impensable de nos jours.

Une image du numéro 4 du PlayStation Official Magazine de septembre 2000 qui en dit long sur l’engouement autour de la PS2.

Concrètement, la console peut gérer via son GPU custom (le Graphics Synthesizer) jusqu’à soixante-quinze millions de polygones brust. En contexte réel d’un jeu, avec donc la lumière, les textures, l’IA et le moteur physique, la PS2 peut gérer seize millions de polygones par seconde. Pour rappel, la PlayStation pouvait, elle, gérer au maximum 1,5 millions de polygones par seconde. Le support DVD, lui, permet en plus de pouvoir voir des films sur sa PS2, et d’éviter de devoir se farcir plusieurs CD pour un même jeu comme les Final Fantasy sur PS1. La console dans son modèle de base dispose aussi de connectiques USB et d’une connectique i-Link (FireWire) permettant de brancher un disque dur, une caméra ou le combo clavier souris. Les derniers modèles de PS2 seront quant à eux équipés d’un port Ethernet, de deux port USB et d’un port optique (ce dernier n’est d’ailleurs même pas présent sur une PS4 slim). La PS2 se veut comme la machine multimédia par excellence et il faut aussi rappeler qu’il s’agit de la première console rétrocompatible de l’histoire.

Logo de i.LINK, le nom du FireWire chez Sony

Des Jeux cultes en masse

La PS2 comprend aujourd’hui plus de quatre mille jeux qui ont plus que rempli le catalogue de la console tout au long de son incroyable vie. La console bénéficie à sa sortie de l’immense succès de la PlayStation qui avait déjà atteint les soixante-dix millions d’exemplaires vendus dans le monde. Tout le monde savait que les joueurs allaient suivre en majorité sur la PS2, ne serait-ce que parce que la console porte un 2 dans son nom. Dans le PlayStation Official Magazine, Jason Rubin, cofondateur de Naughty Dog, disait : « Sony est un bon consolier avec qui travailler. Contrairement à d’autres consoliers, ils sont aimables avec les éditeurs tiers et les développeurs. Du coup, les développeurs veulent voir Sony gagner. »

Sony a révolutionné la façon de créer des jeux sur consoles avec la création du framework (kit de développement) qui n’existait pas avant la PlayStation. Si l’ère PS1 fut une période de remise en question et de révolution dans la vie des développeurs, l’ère PS2 est celle de la confirmation. Pour commencer, il y a le line up de lancement, composé de dix jeux au Japon en mars 2000, et de vingt-neuf jeux à sa sortie aux États-Unis en octobre 2000. C’est beaucoup, voire énorme, et parmi ces jeux, on peut notamment citer la présence de Dead or Alive 2, Tekken Tag Tournament, SSX, Ridge Racer V, ou encore Midnight Club.

Ça commence donc fort pour la PS2, et bien qu’il soit impossible de s’attarder sur chaque grand jeu que la console a accueilli, il faut quand même évoquer des licences fortement associées à la PS2 et qui ont vu le jour dessus

Le cas Buzz

La série fut un grand succès avec pas moins de dix-huit jeux portant sur une myriade de thèmes différents, en sachant que cinq jeux sur ces dix-huit sont à destination des enfants. Le premier Buzz est « Buzz ! : The Musical Quiz » sorti le 26 octobre 2005, et le dernier Buzz est « Buzz ! : Quiz Player » sorti le 22 décembre 2010. Le second Buzz : « Buzz ! : The BIG Quiz » a notamment remporté en 2006 le prix du meilleur jeu social et casual aux BAFTA Game Awards, et la série s’est vendue à plus de dix millions d’exemplaires au total.

Il faut aussi savoir que SCE a été poursuivi en justice en janvier 2008 par Buzztime Entertainment en Californie. SCE est alors accusé de violation sur plusieurs marques déposées par l’entreprise californienne. Buzztime Entertainment souhaite alors le rapatriement et la suppression de tous les produits de la licence Buzz, un dédommagement pour de multiples infractions, ainsi que la suppression au niveau légal de la licence Buzz. Cette affaire s’est finalement réglée en dehors des tribunaux en faveur de SCE. 

Buzz est une licence qui a vu le jour sur PS2 en octobre 2005 et qui a été créée par Sleepydog, pour ensuite être développée par Relentless Software et éditée par SCE. Chaque jeu Buzz consiste en une série de quiz jouables à plusieurs dans le cadre du jeu télé fictif nommé Buzz. Bien évidemment, le but est d’avoir le plus de points en fin de partie après un certain nombre de rounds qui diffèrent en fonction des versions du jeu. Le show fictif est d’ailleurs toujours présenté par le personnage Buzz. Mais la plus grande particularité du jeu est qu’il se joue avec une manette en forme de buzzer comprenant quatre touches de couleurs différentes et d’une touche servant de buzzer. Il est possible de brancher en USB un set de quatre buzzers sur la console, ce qui rend possible le cumul de huit buzzers simultanément. Il existe aussi une version sans fil de la manette qui se connecte à la console via un dongle.

Le cas Singstar

Une autre licence typique de la PS2 consiste en un karaoké à la maison : SingStar. Il s’agit d’un jeu musical compétitif développé par London Studio et édité par SCE. Il y a eu plus de soixante-dix jeux estampillés SingStar allant de la PlayStation 2 jusqu’à la PlayStation 4 via une application gratuite où l’on achète une musique à l’unité. C’est aussi une licence qui s’est déclinée en un bon paquet de versions spécifiques à destination de tel ou tel pays du monde. A peu près tous les pays d’Europe ont eu leurs versions spécifiques du jeu avec une tracklist locale d’une trentaine de musique environ.

Le but du jeu est de chanter le plus juste possible via un micro spécifiquement conçu pour la PS2, le tout avec le clip de la musique qui passe en arrière-plan. Un système de score basé sur la justesse et le rythme du chanteur permettent de savoir qui est le meilleur chanteur durant une soirée. Le tout premier SingStar comporte un mode solo similaire au mode carrière d’un jeu de voiture, mais ce mode est tout de suite abandonné dans les opus suivants au vu de la popularité évidente du mode multijoueur. Une fonctionnalité méconnue de SingStar permet de changer le disque d’un SingStar pour une autre version avec une autre tracklist sans avoir à redémarrer la console. Le jeu garde alors l’apparence et les fonctionnalités du premier SingStar inséré (le master disc). Le premier SingStar a également comme spécificité d’avoir une tracklist mixés à partir du “master record”, ce qui permet de totalement supprimer la voix de l’artiste originel dans chaque chanson. Ce principe est abandonné très rapidement par la suite, car cela aurait drastiquement diminué la taille de la track list.

La technologie derrière SingStar a débuté en tant que projet de recherche au sein de London Studio. Le but initial était de faire des jeux pour les enfants avec un système de détection de tonalité. Deux concepts ont alors été retenus : Songlines, un jeu d’aventure en vue à la troisième personne où le joueur doit chanter pour débloquer de nouveaux environnements, et SingAlong Safari, un jeu où le joueur doit compléter des missions en chantant avec des animaux. En 2003, la direction du jeu change pour ce qui deviendra SingStar l’année suivante. La première démonstration du concept à lieu à Paris lors d’une conférence interne de Sony Computer Entertainment Europe (SCEE), avec la chanson « Wonderwall » du groupe Oasis et « Independent Women » de Destiny’s Child. Finalement, le jeu nécessite à sa sortie deux micros conçus spécifiquement pour SingStar, que l’on connecte en USB sur la console. En mars 2009, des micros sans fils avec un récepteur 2,4 GHz sortent, mais ne sont pas dotés de la technologie Bluetooth, jugée trop difficile à mettre en place pour deux microphones fonctionnant en simultanés.

La licence a atteint plusieurs catégories de population habituellement ignorées par l’industrie vidéoludique. Elle faisait notamment parler d’elle jusque dans les magazines destinés à un public féminin. SingStar fut un véritable succès notamment eu Europe avec plus de seize millions de copies vendues. En 2005, le premier SingStar reçoit également le prix de l’originalité aux BAFTA Games Awards.

Les jeux EyeToy

Une autre série de jeu est tout à fait caractéristique de la PlayStation 2 de par l’utilisation d’une petite caméra conçue spécifiquement pour la console : les jeux Eye Toy. L’Eye Toy est tout simplement une caméra couleur à utiliser sur PlayStation 2. La caméra utilise la vision par ordinateur ainsi que la reconnaissance de mouvement afin de générer les images prises par l’Eye Toy. Il est par conséquent possible via cet accessoire d’interagir avec le jeu en bougeant, via la détection de couleurs ainsi que la détection du son avec le microphone intégré. Les premiers modèles de la caméra sont fabriqués par Logitech (connu sous le nom Logicool au Japon), et la caméra sera aussi compatible avec la PS3 et un PC (grâce à des drivers non officiels).

La V2 de l’Eye Toy

Imaginée en 1999 par Richard Marks, l’idée est de pouvoir utiliser le concept d’interface utilisateur naturelle (une interface utilisateur invisible), ainsi que la réalité augmentée avec une webcam peu coûteuse, grâce à la puissance de la PlayStation 2. La R&D commence donc en 1999 lorsque Richard Marks rejoint Sony Computer Entertainment America (SCEA). Le projet attire l’attention de celui qui est alors vice-président des relations tiers et de la R&D chez SCEA : Phil Harrison (ancien vice-président de Microsoft et homme de l’ombre du lancement en demi-teinte de la Xbox One en 2013). Après avoir été promu Vice-président en développement de produit chez Sony Computer Entertainment Europe (SCEE), ce dernier amène Richard Marks dans les bureaux de Sony à Londres pour montrer la technologie aux développeurs. À la suite de cela, le développement concret de la caméra commence. A la base, la caméra devait s’appeler « iToy » pour « interactive toy », mais Phil Harrison a finalement renommé la caméra « Eye Toy ». La caméra a d’abord été montrée au public durant le PlayStation Experience en août 2002 avec quatre mini-jeux. Le produit final sort dans un bundle comprenant l’Eye Toy et Eye Toy : Play le 4 juillet 2003. Il existe également une deuxième version de l’Eye Toy plus petite et de couleur grise.

Au total, pas moins de vingt-cinq jeux destinés à l’Eye Toy voient le jour entre 2003 et 2008 sur PlayStation 2. Treize sont développés par London Studio, un par Japan Studio, les autres par différents développeurs tiers. En plus des trois « Eye Toy: Play », il y a plusieurs expériences qui vont de EyeToy: Kinetic Combat (2006) à EyeToy: EduKids (2005) en passant par Eye Toy Chat (2005), une sorte d’équivalent PS2 à une application mobile de communication. Le succès de cette petite caméra peut se résumer en un chiffre : 10,5 millions d’exemplaire vendus dans le monde au 6 novembre 2008.

Le cas FF 11 et les jeux en ligne

La sixième génération de consoles a vu arriver le début du jeu en ligne sur console de salon. Que ce soit la PS2, la Xbox, ou la Dreamcast, nombreux sont les joueurs à avoir découvert le jeu en ligne sur ces consoles. Sur PS2, le jeu en ligne n’est pas arrivé dès la sortie de la console, mais est progressivement rendu possible dans le monde à partir de juin 2001 avec la sortie le 19 juillet du disque dur IDE de 3,5 pouces et de l’adaptateur réseau. Ces deux accessoires devaient se connecter au dos de la console via une baie d’extension exclusive à certains modèles (SCPH-30000 à SCPH 50000).

Toutes les versions de l’adaptateur réseau comprenaient un port Ethernet qui fut plus tard intégré directement dans les modèles slims de la console (à partir du modèle SCPH-70000), rendant l’adaptateur réseaux inutile, ainsi que l’utilisation du disque dur qui ne pouvait se connecter dans la baie d’extension uniquement via l’adaptateur réseau. Ce disque dur avait une capacité de 40 Go et permettait de réduire les temps de chargement des jeux en transférant certaines données dessus. Ce HDD pouvait également être transféré sur une autre PS2 sans problème et sans avoir à le formater au préalable. Enfin, il était également fourni avec un disque permettant sa maintenance via les capacités de défragmentation, de réparation et de formatages, le tout avec un navigateur pouvant gérer les différents fichiers.

Pour jouer en ligne sur PS2 une fois le bon modèle de la console ou les bons accessoires en sa possession, le joueur devait configurer la connexion au network du système qui est ensuite sauvegardé sur une carte mémoire. Cette opération pouvait se faire via un disque spécial fourni avec l’adaptateur réseau, ou en passant par certains jeux comme Resident Evil Outbreak. Il faut savoir que contrairement au SegaNet et au Xbox Live, le multijoueur en ligne de la PS2 relevait de la responsabilité des éditeurs tiers, tandis que les serveurs étaient toujours fournis par ces derniers. Le service n’avait tout simplement pas de nom officiel et avait plusieurs appellations comme « PS2 Network Play », « PS2 Network Gaming » ou » PS2 Online ».

C’étaient les débuts du jeu en ligne sur console, et il fallait donc s’y connaître pour pouvoir en profiter sur PlayStation 2. Un jeu extrêmement connu a d’ailleurs fait le bonheur de la PS2 bien au-delà de son cycle de vie, mais a également fait les frais des balbutiements du online sur PS2 : Final Fantasy XI.

Final Fantasy XI, ou Final Fantasy XI Online, est un MMORPG développé et publié par Square. Imaginé et produit par Hiromichi Tanaka, le jeu est sorti le 16 mai 2002 sur PS2, et en novembre de la même année sur PC via Windows. Il s’agit du tout premier MMO à permettre le cross-play entre la PS2 et le PC. Le jeu est sorti en 2006 sur Xbox 360, et toutes les versions du jeu nécessitent un abonnement mensuel. Final Fantasy XI prend place dans le monde de Vana’diel dans lequel les joueurs peuvent créer leurs avatars et s’affronter ou coopérer dans une variété d’activités typiques d’un MMORPG.

Final Fantasy XI est toujours en activité et même mis à jour sur PC, tandis que les versions consoles ont survécu jusqu’en 2016 ! Mais il y a une petite subtilité concernant la version PS2 : le disque dur. Le véritable problème est l’arrivée en septembre 2004 du modèle slim de la PS2 (SCPH-70000). A partir de ce modèle, une connectique Ethernet est intégrée à l’arrière de la console, rendant ainsi l’adaptateur réseau inutile. Mais la petite taille de cette version slim implique l’absence de la baie d’extension de 3,5 pouces, ce qui empêche définitivement le branchement du fameux disque dur.

Il n’y a plus de place pour la baie d’extension de 3,5 pouces sur les modèles de PS2 slim (SCPH-70000 à SCPH-90000).

La plupart des jeux avec un mode en ligne comme Ratchet & Clank 3 ne nécessitaient pas de disque dur, mais ce n’était pas le cas pour Final Fantasy XI, qui est un MMORPG contenant de multiples mises à jour qu’il faut bien installer quelque part. En somme, sur PlayStation 2, pas de disque dur, pas de Final Fantasy XI. Malgré ce problème, le jeu fut un immense succès (aidé par les autres versions du jeu), et en 2012, Yoichi Wada, l’ancien président de Square Enix, révélait que Final Fantasy XI est, à date, le Final Fantasy le plus profitable de l’histoire.

Boîtes de jeux et éditions spéciales

Il faut maintenant évoquer les boîtes de jeux, toutes fabriquées par la société Amaray (qui fait les boîtes PlayStation depuis 1995). Aviez-vous remarqué que les boîtes de jeux sur PS2 ont changé plusieurs fois à l’extérieur comme à l’intérieur ? Il y a en réalité quatre types de boîtes de jeux avec leurs variantes :

Le type A noir. Ce sont les boîtes noires utilisées du lancement de la PS2 jusqu’en 2002. Ces boîtes ont notamment un emplacement au-dessus du CD permettant d’y caler la Memory Card. Les CD y sont retenus par trois clips en triangle avec une partie à presser au milieu.

Le type A bleu. Quand les ventes de DVD ont grimpé et que Microsoft a lancé sa Xbox, Sony a décidé de changer la couleur de ses boîtes PS2 pour du bleu afin de se différencier des boîtes de DVD (noir) et de jeux Xbox (vert). Tout est pareil à l’intérieur.

Le type B. L’arrivée de ce nouveau type de boîte durant la vie de la console marque la disparition de l’emplacement dédié à la Memory Card, probablement pour des raisons de coûts. Les CD n’y sont retenus que par deux clips dans la partie centrale.

  • Le type C. Le tournant se fait en 2007 avec des boîtes plus légères utilisant moins de plastiques. Désormais, le CD est maintenu par 4 clips ressemblant à des flèches et le tout semble plus fragile. Enfin, une petite crête en plastique se situe au milieu de la colonne séparant les deux parties de la boîte.


Type A
Type B
Type C

Bien entendu, certaines éditions spéciales font un peu ce qu’elles veulent au niveau des couleurs et du nombre de CD à l’intérieur de la boîte, sans oublier les rééditions de la gamme Platinum qui sont toutes en couleur argent dans un boîtier de type A ou B selon l’âge du jeu.         

Pour rester dans le thème de la variation, en plus des évidents changements de modèles de PS2 sur le plan technique, la console a fait exploser les vannes des consoles collectors et autres variations aux mille et une couleurs. Un petit tour d’horizon s’impose.

Il y a tout d’abord les PS2 « Automotive Edition » qui viennent célébrer les 20 millions d’exemplaires vendus. Seulement 1998 exemplaires ont été distribués dans le monde

 

Nous avons ensuite les PS2 “50 Millionth Edition” qui viennent fêter la 50 millionième PS2 vendue dans le monde.

Metallic Silver
Sakura Pink
Aqua Blue

La version slim de la console a aussi été gâtée par les éditions spéciales avec la « Slim Silver », la « Slim Pink », la « Slim Cinnabar Red », et la « Slim Ceramic White ».

Enfin, au-delà de simples couleurs, la PS2 a aussi inauguré les consoles rendant hommage à un jeu en particulier, avec la PS2 Slim Final Fantasy XII  exclusive au Japon.

C’est plutôt discret par rapport à ce que nous connaîtrons plus tard en termes de console à l’effigie d’un jeu, mais il faut bien commencer quelque part.

Enfin, il faut aussi noter que la PlayStation 2 a également ouvert les vannes de mille et une manettes non-officielles fabriquées par divers constructeurs. Mais parmi cette myriade de manettes, il y en a une, sous licence officielle, qui a été commercialisée conjointement par Sega et Sony : la manette PS2 Sega Saturn. Cette manette est un hommage basé sur le deuxième modèle de manette de la Saturn, qui est commercialisé au Japon en 2005. Concrètement, il s’agit d’une manette Saturn adaptée avec les boutons typiques de la PlayStation comme start et select.

Les accessoires oubliés

Par rapport à la PlayStation, la PS2 a vu l’apparition d’un sacré paquet d’accessoires ayant plus ou moins laissé une trace dans la mémoire des joueurs. Au-delà des accessoires non officiels fabriqués par des entreprises tierces, Sony a tout de même sorti quelques produits notables pour la PlayStation 2.

Il y a tout d’abord le casque PlayStation 2 officiel qui se branche en USB sur la console. Ce casque fabriqué par Logitech peut également se brancher sur un PC puisqu’il fonctionne via un port USB standard.

Sony a aussi sorti plusieurs modèles de support pour pouvoir poser la console à la verticale ou à l’horizontale. En fonction du modèle de la console (fat ou slim) le modèle du support est différent.

Passons maintenant à la télécommande officielle pour la fonction lecteur de DVD de la PS2. Il s’agit d’une télécommande infrarouge classique qui s’utilise avec un dongle branché sur un port manette de la console. A partir du modèle SCPH 50000 de la console, l’utilisation d’un dongle n’est plus nécessaire puisque la console est de base équipée d’un capteur infrarouge. Il existe également deux modèles de cette télécommande dont le deuxième ajoute un bouton reset/power et un bouton pour éjecter le disque. Mais ce dernier bouton ne peut pas fonctionner sur les versions slims de la console (à partir de SCPH 70000) puisque le lecteur CD de ces modèles ne possède pas de moteur intégré afin de pouvoir éjecter un disque.

Pour terminer en beauté, il y le « Sony PUD-J5A headset ». Derrière ce nom barbare se cache en fait l’ancêtre du PS VR. Il s’agit d’un dispositif permettant de simuler la vision en 3D via la technologie du stéréoscope qui projette deux images légèrement différentes dans chaque œil. Le dispositif peut également tracker les mouvements de la tête, ce qui rend possible le visionnage d’une vidéo à 360° en tournant la tête. Pour entrer un peu plus dans les détails de ce casque, chaque dalle de 0,44 pouces fonctionne via un écran LCD de 180 000 pixels, ce qui permet de simuler la vision d’un écran de 44 pouces à 2 mètres de distance. Le casque est fourni avec un casque audio ajustable, un manuel, et une petite boîte de contrôle avec un bouton power, USB, et vidéo. Le casque se connecte via un câble composite ou S-vidéo pour l’image, et via un câble RCA pour l’audio, sans oublier l’USB pour l’alimentation. Cette technologie qui porte le nom de « Fourth View » est notamment utilisée pour des jeux de type simulateur comme des simulateurs de train ou d’avion. Le « Sony PUD-J5A headset » est sorti le 26 septembre 2002 au Japon pour le prix de 598 000 Yen, soit la modique somme de 500 € environ.

Linux pour PS2

En 2002, SCE sort un kit permettant de transformer une PlayStation 2 en un PC. Le kit inclut l’OS Linux, le combo clavier souris, l’adaptateur réseau de la PS2 ainsi qu’un disque dur de 40 Go. Une carte mémoire PS2 est également nécessaire et doit être formatée durant l’installation de Linux. Il est d’ailleurs fortement recommandé d’être au préalable un connaisseur de Linux avant de l’installer sur PlayStation 2, puisque le but premier de ce kit est le développement amateur de logiciels. Le site officiel du projet a fermé en octobre 2009 et la communauté autour de ce projet est aujourd’hui inactive.

Le kit Linux transforme totalement la console en un ordinateur et cela a pour conséquence de rendre la console incapable de lire des DVD, pour des raisons de piratage qui inquiètent Sony à cette époque. Le disque dur ne peut également pas servir à la fois pour les jeux comme Final Fantasy XI et pour le système d’exploitation Linux. Le kit supporte l’affichage sur les écrans RGB via un câble VGA fourni avec, ou sur des écrans branchés avec le câble classique de la PS2. Pour les connaisseurs, la version Linux de ce kit correspond à Red Hat Linux 6.

Avec ce kit, il est même possible de programmer son propre jeu fonctionnant sur une PS2 sous Linux, mais pas sur une PS2 standard. En effet, les spécifications du Linux pour la PS2 diffèrent peu par rapport à la version de l’OS utilisée par les développeurs professionnels sous contrat avec Sony. Des codes sources pour les jeux sont même disponibles sur des sites dédiés à Linux pour PS2. Certains développeurs amateurs vont par conséquent soumettre leur jeu créé via ce kit à des compétitions dans le cadre de festivals de jeux indépendants. Les plus chanceux vont même pouvoir vendre leurs jeux en ligne, mais il ne sera pas possible pour les amateurs de sortir et de vendre leurs jeux sur CD ou DVD.

La première version du kit Linux pour PS2 est compatible uniquement avec les trois premiers modèles de PlayStation 2 (SCPH 10000, SCPH-15000 et SCPH-18000) du fait de la présence d’un port PSMCIA. Les nouvelles versions du kit Linux fonctionneront via l’adaptateur réseau et le disque dur vendu avec. Les versions slims de la console ne sont quant à elles pas du tout compatibles avec le kit Linux, à moins de modifier soi-même la console et de faire par conséquent sauter la garantie. Enfin, le DVD d’installation de Linux est soumis à la même restriction de région que les CD de jeux PS2.

On peut parfois voir ça et là le terme PSX utilisé afin de désigner la PlayStation. C’est en réalité une belle erreur puisque la PSX est un tout autre produit, qui a réellement existé. La PSX est une machine assez spéciale et totalement méconnue chez nous puisqu’elle n’est sortie qu’au Japon le 13 décembre 2003. Elle est annoncée durant un meeting financier du groupe Sony où Ken Kutaragi explique alors qu’il souhaite que cette machine devienne aussi importante qu’un magnétoscope en son temps ou qu’un lecteur DVD actuel. C’est aussi durant ce meeting que Kutaragi révèle des détails sur la future PlayStation Portable, ainsi que le chiffre de 52,2 millions de PS2 vendus dans le monde. Ken Kutaragi doit aussi insister à ce moment-là que la PSX n’est pas la PS3 et que cette dernière est bien en développement pour une sortie prévue en 2005 ou en 2006. Sony annonce enfin durant l’événement que la PSX est bien destinée à sortir en Europe et aux États-Unis, mais l’histoire en voudra autrement.

Cette machine est avant tout un enregistreur vidéo numérique qui fait également office de PlayStation 2. Comme le but premier de la machine est d’enregistrer et de lire des vidéos, c’est la maison mère de Sony et non SCE qui s’occupe du marketing de la machine/console. La PSX est accompagnée d’une télécommande et peut, sur les derniers modèles, se connecter à une PSP afin de transférer des photos, des vidéos, ou de la musique via les ports USB. Des logiciels de montage vidéo, de traitement audio ou d’images sont également inclus dans la machine. La PSX possède une interface MediaBar (XMB) qui est utilisée plus tard sur la PSP, la PS3, et les TV Bravia de 2008. Comme la machine embarque l’Emotion Engine ainsi que le Graphics Synthesizer, cette dernière est compatible avec les jeux PS1, et il est également possible de jouer aux jeux en ligne avec la PSX (même FF XI qui nécessite l’utilisation d’un HDD). Cependant, comme la PSX est avant tout destinée au marché de la vidéo, elle n’est pas vendue avec une manette, bien qu’elle soit compatible avec les DualShocks et les Memory Card.

C’est une machine extrêmement chère lors de sa sortie, puisqu’elle est alors proposée au prix de 79 800 Yen, soit 615 € environ. Ce prix exorbitant est notamment la cause de son échec, qui n’a donc jamais quitté le sol japonais. Au-delà de son prix, la PSX ne fonctionnait qu’avec les normes japonaises comme le NTSC et certaines connectiques. En plus de ces problèmes, la PSX accuse déjà un retard technique sur plusieurs points en 2003, comme la présence d’un seul port USB 1.0 alors que l’USB 2.0 est déjà en vigueur depuis l’an 2000. En bref, la PSX est un échec total et préfigure une période qui sera bien moins hégémonique pour Sony par rapport à l’immense succès de la PlayStation 2.

Conclusion

La PlayStation 2 ou PS2 de son abréviation officielle est une console dans la droite lignée du succès miraculeux de la PlayStation. Le changement de millénaire est définitivement fêté en grande pompe par Sony avec une console qui finit tout de même sa carrière avec plus de cent cinquante-cinq millions d’unités vendues dans le monde. Peu de mots peuvent décrire un tel succès, mais quoi qu’il en soit, la PlayStation 2 reste aujourd’hui la console la plus vendue de tous les temps.

De la même manière que la PlayStation a su évoluer au fil des années avec des jeux comme Gran Turismo, la PlayStation 2 a clairement vu la même évolution durant les six ans de sa vie avec des jeux en fin de cycle largement plus ambitieux techniquement que les jeux des premières années. Il suffit de voir la différence entre Final Fantasy X et Final Fantasy XII pour s’en rendre compte. Le premier sort le 19 juillet 2001 et propose un système de combat au tour par tour dans un monde relativement fermé, alors que le deuxième qui est sorti le 16 mars 2006 propose un système de combat en temps réel dans un monde largement plus ouvert avec un paquet d’interactions possibles.

La PlayStation 2 est de loin le plus grand succès de Sony Computer Entertainment (aujourd’hui renommé Sony Interactive Entertainment). Personne ne sait si une autre console ira un jour taper la barre des cent cinquante-cinq millions d’exemplaires vendus, mais on peut souhaiter à la PlayStation 5 d’au moins s’en rapprocher, puisque la PlayStation 4 et ses 114,9 million de ventes (au 31 décembre 2020) ne pourront visiblement pas y arriver.