Exceptionnellement, nous nous permettrons dans ce papier d’écrire à la première personne, car cette critique est au fond très personnelle. Bonjour à toutes et à tous et merci de nous lire sur PlayStation Inside. C’est Yacine à la plume, rédacteur en chef et co-fondateur. Bienvenue dans ce 3ème épisode du carnet de bord de Final Fantasy VII Rebirth, qui a été préféré à une critique classique pour les raisons détaillées ici. Bonne lecture, et bien évidemment attention spoilers !
Les deux premiers épisodes :
Les excuses de Yacine : Cela fait plus d’un mois maintenant que le 2ème épisode de ce carnet de bord est sorti. L’idée était bien évidemment de faire de cela un rendez-vous régulier jusqu’à la fin de la critique, mais une série de problèmes personnels, incluant des allers-retours à l’étranger pour raisons familiales, m’ont empêché d’écrire. Ces problèmes étant réglés, le carnet de bord va reprendre de plus belle. Merci à toutes et tous pour votre compréhension et vos messages.
Un chapitre hors du temps
Il y a eu les souvenirs de Nibelheim, l’escapade de Kalm, et enfin l’exploration de la Prairie, ponctuée par le grand combat contre Midgardsormr et l’apparition aussi inattendue qu’inexpliquée de Sephiroth. Après le retour à la surface de Cloud, le chapitre 3 de Final Fantasy VII Rebirth se lance sans qu’aucune de mes questions ne soit réellement résolue. Mais l’aventure est si entraînante et intéressante que je n’en ai cure.
Pour cette nouvelle aventure, le mystère autour des hommes aux manteaux noirs s’épaissit, et les personnages les suivent dans les mines. Image récurrente dans la fantasy et le fantastique pour évoquer l’incompris et l’énigmatique, la traînée noire intrigue. Elle me fait penser aux Détraqueurs d’Harry Potter et le Prisonnier d’Azkaban, où ces antagonistes représentent la peur elle-même. Mais ici, au lieu de se repaître de l’angoisse des autres, les manteaux noirs ont assez à faire avec leur propre détresse, celle d’avoir été des cobayes des expériences de Hojo qui errent désormais dans la nature. Cloud les croit à la poursuite de Sephiroth (avec leur rythme d’escargot), mais rien n’est moins sûr. Quoi qu’il en soit, cette couche d’étrange est la bienvenue dans un chapitre qui est finalement très surprenant par sa manière d’être hors du temps.
En sortant des mines pour apercevoir la ville de Junon au loin, c’était la première idée m’étant venue à l’esprit. À quoi exactement a servi l’heure et demie passée dans les mines, si ce n’est à me rendre d’un point A à un point B ? La réponse, franchement, est rien. Mais loin de maudire les développeurs, je retire de cette aventure un doux sentiment de sérénité. Dans les mines, le scénario de Final Fantasy VII Rebirth n’avance pas d’un iota. Il est hors du temps, planant presque, comme si Square Enix voulait nous offrir une respiration avant une arrivée à Junon qui promet d’être exceptionnelle et pleine de rebondissements. Mais même si ce n’était pas le cas, le chapitre des mines m’aurait suffi en tant que tel. Comme dans Le Seigneur des Anneaux, à qui est ici emprunté le thème de la mine et du mithril, Rebirth prend son temps là où les autres accélèrent. Une aventure, en effet, n’est pas menée tambour battant. Elle comporte des moments suspendus de calme, d’ennui même, durant lesquels les héros doivent simplement voyager, avancer. Pour aller de la Comté au Mordor, il en a fallu, des jours à marcher sans but, si ce n’est celui d’avancer. Même dans la Moria, la traversée prend 5 jours à la Communauté, dont 4 sont aussi plats et sans événements qu’un bon dimanche ensoleillé.
C’est ce que semble vouloir nous dire Rebirth avec ces mines, dans lesquelles l’histoire n’avance pas, si ce n’est le gameplay qui gagne en épaisseur. Comme la mythique scène des escaliers de la Shinra que l’on peut rejouer dans Remake et qui a appris à bon nombre d’entre nous les vertus de la patience, celle des mines et des manteaux noirs a la même qualité, celle de nous faire prendre du recul et de réfléchir quand tout est calme, et avant qu’il ne soit trop tard.
Un hommage aux donjons à l’ancienne
L’obligation quand on ne raconte rien, c’est d’éviter l’ennui en variant le gameplay. Et de manière magistrale comme d’habitude, Final Fantasy VII Rebirth s’y emploie avec deux combats de boss une fois de plus mémorables, entrecoupés de petits combats et de déplacements à l’ambiance très réussie.
Le premier des deux combats de boss, contre Rude et la nouvelle venue Elena, vaut déjà son pesant d’or. Assez ardu en mode normal ou en mode dynamique, ce combat permet de s’amuser avec la profondeur de gameplay de Rebirth. Pour faire durer le plaisir, et parce que je veux jouer en faisant autre chose que de spammer la touche carré et la touche d’esquive, je me suis régalé durant de combat à alterner les styles, en commençant par la composition de mon équipe. En plus de Cloud, le personnage que j’ajoute tout le temps est Aerith, grâce à sa compétence de prière qui régénère les trois protagonistes quand cela est nécessaire. L’hésitation est toujours pour le dernier personnage du roster. Cette fois, je prends Barret pour sa capacité à toucher les ennemis de loin grâce à sa décharge.
En plus des capacités des personnages, Rebirth me plaît aussi par le grand nombre de compétences à disposition, entre les classiques, les synchronisées et celles liées aux transcendances et aux invocations. J’ai le sentiment d’être dans un jeu dont vous êtes le héros, une sorte de bac à sable où une myriade de combinaisons est possible pour arriver à mes fins. Face à l’agilité de Rude et surtout d’Elena, je m’emploie ainsi à virevolter avec Cloud, en acceptant de perdre des PV à cause de ma proximité. J’alterne ensuite avec Aerith pour me protéger et Barret pour décharger son canon de loin. Ce trio très équilibré me permet d’encercler Rude et Elena et de les battre plus facilement que je ne l’aurais cru, sans mourir une seule fois alors que j’étais mort deux fois contre Midgardsormr avant de le vaincre.
Après ce combat de boss et avant l’autre, je me suis aussi pris au plaisir d’explorer les mines comme on explore un donjon dans un jeu à l’ancienne. Même si le fait d’aller chercher partout est finalement peu récompensé, si ce n’est quelques loots insignifiants et de petits combats assez faciles, l’ambiance générale est réussie. On y sent la volonté des développeurs de rendre un hommage, aussi subtil soit-il, aux dungeon crawlers des années 1990. L’atmosphère dans les mines de Rebirth est moite et immobile, pour donner le sentiment d’une menace à la fois omniprésente et très lointaine. On y est calme sans jamais vraiment l’être, et le travail sur le son n’y est pas étranger.
Plus encore que Rude et Elena, le combat de boss qui m’a le plus plu dans les mines est celui contre le Golem de mithril. La première raison est que pour une fois, l’opportunité nous est donnée d’incarner Barret et Red dans leur propre quête, et surtout de passer du temps avec eux en étant protagonistes. Même s’ils ne conversent pas tant que ça, Barret et Red offrent une autre coloration à l’aventure, plus légère et en même temps plus mature. Le seul point négatif à noter est cependant la sous-exploitation de Red, qui contrairement aux quatre autres protagonistes n’est pas vraiment analysé dans son passé ou dans ses réflexions. Il donne l’impression d’être simplement là pour suivre, here for the ride comme diraient nos amis d’Outre-Manche, sans apporter de réelle plus-value. Mais bien évidemment, l’aventure à ce stade de Rebirth est encore longue et il faut laisser à Red le bénéfice du doute.
Là où Red ne fait aucun doute cependant, c’est dans la folle qualité de son gameplay. Notoirement plus difficiles à animer que les bipèdes, les quadripèdes ont souvent été le cauchemar des développeurs. C’est loin d’être le cas dans Rebirth, où la prise en main de Red est un plaisir sans cesse renouvelé, de son extrême agilité à ses compétences très variées. Contre le Golem de mithril, l’équilibre est parfait entre les attaques proches de Red et les couvertures lointaines de Barret, qui permettent d’alterner les coups pour ne jamais se faire attraper par le Golem et ses imposantes massues.
Très bien animé lui aussi, le Golem est l’un de ces boss au départ insignifiants qui se révèle finalement être un pur plaisir de gameplay, à l’image du centipède du DLC Intermission de FF7 Remake, qui m’avait bien plus marqué que le combat de fin.
Junon, enfin !
Mais comme toutes les bonnes choses ont une fin, il faut bien sortir de ces mines. Après le combat contre le Golem, et alors que les protagonistes se remettent à suivre les manteaux noirs, je suis pris d’une étrange impression de déjà-vu. Je vois déjà certaines personnes rire de loin (Brian et Nico, vous pouvez vous sentir visés), mais ce déjà-vu est le fruit de mes expériences passées. En sortant des mines, et alors que les hommes aux manteaux noirs sont rassemblés devant Cloud, on aperçoit l’immensité de Junon au loin. La ville, base de la Shinra avec Midgar, sonne tout comme le vrai début de Final Fantasy VII Rebirth, après trois chapitres ayant vraisemblablement servi d’introduction, puis de tutoriel, et enfin de calme avant la tempête.
À quoi donc me fait penser ce début de chapitre 4 ? Certains vont rire, mais à Horizon Zero Dawn… Oui oui, à Horizon Zero Dawn. J’ai eu la sensation, en jouant à Rebirth, de retrouver la même structure que dans le titre de Guerrilla, avec une introduction en trois chapitres, dont le premier explicatif, le deuxième servant de tutoriel et le troisième nous enveloppant dans un calme rassurant avant l’arrivée dans la vraie première grande zone, tel Link qui observe le plateau et Hyrule au début de Breath of the Wild. À l’image de Zero Dawn et de l’arrivée face à l’immensité de Meridian au loin, Rebirth suit le même tracé avec Junon. Bien évidemment, l’aventure sera bien différente et les thèmes tout autant, si ce n’est une certaine idée du transhumanisme entre une Aloy préprogrammée et un Sephiroth né de la science plutôt que de la vie.
Reste à voir maintenant ce que Junon nous réserve… Ce sera le thème du 4ème carnet de bord, à venir très bientôt maintenant que la machine s’est remise en marche !