Le studio californien PixelOpus, connu pour la création des jeux Entwined et Concrete Genie, a annoncé furtivement sa fermeture vendredi soir sur Twitter. Une disparition vue par certains comme une preuve de plus de la concentration des efforts de PlayStation vers les studios producteurs de AAA, au détriment en interne des groupes de développeurs plus désireux de travailler sur des oeuvres atypiques.
Une fermeture surprenante
« Chers Amis, l’aventure PixelOpus touche à sa fin. Alors que nous nous tournons vers de nouveaux horizons, nous tenions à remercier chaleureusement les millions de joueurs passionnés qui nous ont soutenus ainsi que notre mission de créer des jeux beaux et imaginatifs avec du cœur. »
PixelOpus sur Twitter
C’est avec ces mots que le studio, originaire de San Mateo en Californie, a annoncé sa fermeture prochaine prévue pour le 2 juin. Une annonce surprenante et qui semble tomber comme un cheveu dans la soupe, alors que le studio travaillait manifestement sur un nouveau jeu et quelques jours à peine après la fin d’un exercice fiscal record pour Playstation.
D’abord silencieux, le constructeur s’est adressé à nos confrères d’IGN afin de confirmer la fermeture du studio et d’apporter quelques précisions quant à ce qui a entraîné cette décision soudaine.
« Les studios PlayStation évaluent régulièrement leur portfolio et la progression de ses projets afin de s’assurer qu’ils répondent aux objectifs stratégiques à court et à long terme de l’organisation. Dans le cadre d’un récent processus de révision, il a été décidé que PixelOpus fermerait ses portes le 2 juin. »
Sony, au micro d’IGN
PixelOpus, où l’indépendant au cœur de Playstation
Dès sa création, PixelOpus avait une place bien particulière au sein de l’écurie Playstation. Fondé en réactions au succès de Journey (alors encore exclusif à la PS3), le studio a été construit autour de talents issus du monde étudiant et avait pour objectif d’atteindre un nouveau public, en diversifiant l’offre de jeux Playstation qui incorporait ainsi en son sein un studio producteur de jeux « indépendants ».
Le studio est remarqué du public à l’E3 2014, où il présente son premier jeu : Entwined. Relatif échec critique, le jeu peine à réaliser ses ambitions et ne parvient pas vraiment à se démarquer de la production vidéoludique de l’époque. Pas découragé pour autant, le studio enchaîne sur la production d’un nouveau projet : Concrete Genie. Beaucoup plus populaire, le titre réalise pleinement les ambitions de PixelOpus et propose une expérience hors norme, loin des standards de l’industrie, AAA comme indépendants.
Il faut dire que le statut d’intrus de PixelOpus au sein des Playstation Studios semblait de plus en plus évident avec le temps. Année après année, Sony a consolidé ses propositions sur le marché du AAA en laissant progressivement sur le côté les autres pans de l’industrie, même s’il ne faut pas oublier que le constructeur japonais a fait des efforts avec le label PlayStation Indies, dans l’optique d’atténuer cette image publique de faiseur de grosses productions. Toutefois, la profonde transformation de Japan Studio en Team Asobi ou encore la disparition progressive des relations privilégiées qu’entretenait Sony avec certains studios comme That Game Company ou la Team Ico continuent de ternir le tableau. Des relations que Shawn Layden – alors président de Playstation – défendait en expliquant que le prestige apporté par le développement de jeux plus risqués était plus important que les éventuelles pertes financières engendrées. Des déclarations qui peuvent aujourd’hui faire grincer des dents, quand on voit que les jeux édités ou développés par les Playstation Studios sont désormais exclusivement des AAA, voir se dirigent vers une multiplication des jeux services.
Le symbole d’un changement de cap
Si l’on y regarde de plus près, la fermeture de PixelOpus est bien plus aux yeux du public que la simple disparition d’un studio à la popularité modérée. C’est tout un symbole, qui peut laisser penser à une réorganisation des studios internes de PlayStation autour de projets plus faciles à appréhender pour le grand public. Mais c’est aussi et surtout un changement de vision sur la place des non-joueurs dans le monde de PlayStation.
Il faut dire que la proposition derrière la création de PixelOpus n’a plus lieu d’être, car Sony à l’époque souhaitait dédier une partie de son catalogue aux « non joueurs ». Aujourd’hui l’angle d’attaque est différent. Si en 2013 la vision du constructeur était de proposer un large éventail de jeux pour couvrir différents publics, dorénavant l’idée centrale est bien de convaincre le plus de monde possible de jouer aux plus grosses productions. Ainsi, ce sont désormais les AAA ambitieux et aux prix toujours plus élevés qui ont ce rôle d’attirer le plus vaste public possible, de convaincre les non-joueurs de s’intéresser aux jeux vidéo à coup de graphismes photo-réalistes et d’expériences toujours plus modulables aux envies de chacun.
Une vision de l’accessibilité qui soulève encore de nombreuses questions : jusqu’où les joueurs les plus chevronnés sont-ils capables d’accepter certaines évidentes contraintes de design qui sont imposées pour attirer un public toujours plus large ? De la même façon, comment convaincre avec seulement God of War ou Spider-Man le public à la recherche d’expériences artistiques fortes ou innovantes ?
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