Après un épisode 6 fantastique (vous pouvez retrouver la critique ici), qui permettait de prendre la mesure de toute la complexité du personnage de Joël, et de s’émerveiller devant la beauté de la relation quasi-filiale entre ce dernier et Ellie, l’épisode 7 de The Last of Us marque une plongée dans le passé du personnage campé par Bella Ramsey. Si un épisode de cet acabit peut questionner quant au bien-être du rythme de la série alors que nous entamons la dernière ligne droite de la diffusion, il a le mérite de donner une nouvelle envergure à ce personnage qui porte tous les espoirs du futur de l’humanité. Cette mise en avant d’un moment précis de son passé permet notamment de donner du relief à son affection pour ce vieux texan qui lui sert de compagnon de voyage.
Critique sans spoilers
Le titre Left Behind de l’épisode 7 ne laissait aucun doute aux fans de la licence quant à ce qui serait mis en images au long de ces presque 60 minutes de visionnage. Craig Mazin et ses troupes décident de consacrer tout l’épisode aux événements de l’extension solo éponyme du jeu vidéo originel. La série met donc en pause la progression linéaire du récit, en ne conservant que quelques séquences en lien avec la grave blessure de Joël survenue à la fin de l’épisode précédent, afin de se focaliser sur la nuit au cours de laquelle Ellie a été mordue, et a donc pris conscience de son immunité au cordyceps. Ce retour en arrière nous permet de faire la connaissance de Riley, la meilleure amie de notre héroïne, qui a également été élevée au sein de l’orphelinat militaire de la FEDRA. Cette dernière était portée disparue depuis plusieurs semaines, et réapparaît soudainement dans la vie de son amie après avoir intégré les rangs des Lucioles.
Cette virée nocturne dans les allées d’un centre commercial alimenté en électricité grâce aux trouvailles de la camarade de galère d’Ellie est particulièrement pertinente, car il permet d’occuper une double fonction. Premièrement, l’épisode prolonge les thématiques des précédentes semaines en nous rappelant que le monde de The Last of Us n’a définitivement rien de manichéen. Tout l’épisode est ponctué d’échanges savoureux entre les deux amies qui sont désormais placées sur deux lignes idéologiques radicalement différentes. L’une se place du côté des révolutionnaires armées, quand l’autre est du côté de l’ordre. Cette confrontation d’idées est cependant menée avec une certaine élégance, car les deux protagonistes nuancent elles-mêmes leurs positions, laissant la possibilité au télé-spectateur de comprendre qu’il n’y a rien de simple, et que dans la grande majorité des cas, nous pouvons nous retrouver dans un camp par un simple concours de circonstance. Dans un monde en proie au chaos, tout choix en dehors de celui entre la vie et la mort est une illusion.
La force de ce septième épisode The Last of Us est sa grande tendresse. Le fait de prendre un lieu aussi classique qu’un centre commercial, et de le filmer comme une bulle temporelle épargnée malgré les affres du temps, permet de magnifier le récit adolescent qui se déroule sous nos yeux. Nous suivons ainsi nos deux héroïnes qui enchaînent les découvertes de « merveilles » et semblent pouvoir se comporter comme de vraies adolescentes pour la première fois de leur vie. Il y a une poésie singulière dans le fait de voir ces deux jeunes filles aux allures de lycéennes, passer un moment aussi cathartique dans un lieu banal pour nous, mais qui a tout du parc d’attraction pour des enfants qui n’ont jamais connu le monde d’avant la chute. À bien des égards, l’épisode à la structure d’un compte à rebours vers la fin de l’innocence et du passage à l’âge adulte. Cela se matérialise d’abord par cette romance naissante et assumée, et par la finalité qui nous ramène à l’âpreté du monde dans lequel nos personnages vivent. Si Bella Ramsey nous a déjà conquis depuis plusieurs semaine, il faut saluer la performance de Storm Reid qui incarne Riley. L’alchimie entre les deux est totale et similaire à ce que nous avions dans le jeu de Naughty Dog.
Au premier abord, il est facile de penser que l’épisode sert uniquement de remplissage et casse la narration. Pour être honnête, ce n’est pas totalement faux. Le fait de situer cette portion de récit à ce moment-là vient entraver la montée en puissance dramatique des dernières secondes de l’épisode 6 alors que nos deux héros font face au pire au cœur de l’hiver. D’autant plus que le jeu ne se construit pas du tout de la même façon, pour la simple et bonne raison que cette séquence avait été commercialisé plusieurs mois après la sortie du jeu, tout en restant accessible indépendamment de la trame principale. Ceci étant dit, l’épisode n’en reste pas moins très important, car la série n’a pas le luxe du temps dont peut jouir le jeu vidéo. En se focalisant sur ce moment précis de la vie d’Ellie, l’adaptation de HBO permet de mettre en images l’attachement profond et sincère de cette dernière envers Joël. Plus que jamais, nous avons un personnage qui ne baissera jamais les bras et se battra jusqu’au bout pour son père de substitution. Si Ellie est une seconde chance pour Joël, qui a perdu sa fille, nous comprenons ainsi qu’il est également une seconde chance pour elle, une possibilité pour se sentir comme faisant partie de quelque chose.
L’avis d’Aurélie, rédactrice en chef de Naughty Dog Mag
« Le dernier acte de la série The Last of Us s’ouvre avec ce septième épisode, dédié à Ellie. Nous rembobinons dans le passé d’une adolescente dont on perçoit désormais plus clairement la dualité. Née dans un monde un monde dévasté, encore ébranlé par des guerres intestines, une part d’insouciance persiste. Sous la caméra intimiste de Liza Johnson, les sentiments caché d’Ellie s’épanouissent enfin pour sa meilleure amie, Riley, interprétée par Storm Reid. Malgré le poids du monde qui pèse sur leur vie, les séquences ‘tranche de vie’ tirées du DLC Left Behind et du comic book American Dreams révèlent une importante pulsion de vie et de légèreté chez deux jeunes filles, qui ont besoin d’échapper au sérieux et à la gravité qui les entourent. Cela dit, après un sixième épisode qui nous laissait enfin sur un sentiment de suspens, le temps peut paraître long. Mais la nécessité de raconter l’histoire d’Ellie est évidente, non seulement pour mieux la comprendre, mais aussi mieux la rapprocher de Joel. Craig Mazin et Neil Druckmann ont pensé tout un jeu d’écho entre l’adolescente et celui qui est évidemment sa seule figure paternelle. À défaut d’action, l’émotion est donc encore au rendez-vous. »
Critique avec Spoilers
Encore une fois, nous avons un épisode essentiellement thématiques. Son aspect tranche de vie fait qu’il n’y a pas de nombreux éléments à spoiler. Nous découvrons la vie d’Ellie à l’orphelinat, mais surtout son attachement à Riley. Avant la morsure, cette dernière était son monde. Elle était ce qui donnait du sens à une existence un peu terne au sein d’une structure pour laquelle elle n’était pas vraiment destinée. Malheureusement, une virée pleine de tendresse ne peut que finir sur une mauvaise note dans un épisode de The Last of Us. Quand le rideau tombe, il le fait avec fracas et sans prévenir. Juste après leur baiser et la promesse d’un avenir ensemble loin des deux factions rivales, Riley et Ellie sont attaquées par un infecté qui a été réveillé par les péripéties de nos deux jeunes filles en fleur. L’insouciance est ainsi balayée par le destin funeste qui se dessine à l’horizon pour elles, et c’est d’autant plus dramatique que cela se produit au moment où les deux personnages s’apprêtent à saisir à pleines mains leur existence.
L’histoire de cet épisode est celui de l’engrenage qui enclenche tous les événements à venir de la vie d’Ellie. C’est suite à cette morsure qu’elle perdra Riley, et découvrira son immunité. C’est ce qui va l’amener à être détenue par les Lucioles, et confiée à Joël et Tess. Elle n’a pas pu sauver son amie, mais elle fera tout pour sauver son compagnon de route qui est tout ce qui lui reste. La dernière séquence, au cours de laquelle Ellie fait le choix de ne pas laisser Joël à son sort, permet de sceller leur attachement dans le sang, tel un pacte qui les lie pour l’éternité.
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