Notre intention de publier une critique de NieR Automata Ver1.1a à un rythme de cinq épisodes par article est de nouveau mise à mal par le rythme de diffusion instable de la série. Au lieu d’attendre l’épisode 9 pour une nouvelle critique, comme il était initialement prévu, nous allons passer en revue les épisodes 5 à 8 (avec les avis de Locus et Brian, deux rédacteurs fans de la saga), le tout alors que nous trépignons d’impatience pour la suite. Vous pouvez aussi relire nos critiques de l’épisode 1 et des épisodes 2 à 4 pour vous remettre au goût du jour de la série.
L’avis de Locus
La diffusion des épisodes de NieR Automata Ver1.1a est de nouveau suspendue jusqu’à nouvel ordre pour des raisons de Covid 19. Si l’excuse était difficilement passée la première fois, il est cette fois-ci impossible de ne pas remettre en cause la planification désastreuse de la production de la série. On entend des bruits de couloir selon lesquels l’animation est sous-traitée en Chine, pays qui est plus durement touché par le Covid en ce moment que le Japon. Cela soulève deux problèmes : les studios d’animation ne devraient pas être surchargés au point de devoir sous-traiter une portion significative de leur travail, et la production ne devrait pas se faire si tardivement, au point que le moindre contre-temps occasionne des retards de diffusion. L’industrie de l’anime au Japon a énormément de progrès à faire sur ses modes de production. Le travail d’orfèvre des animateurs, doubleurs, scénaristes, ingénieurs son, musiciens, etc. ne devrait pas être compromis par une mauvaise planification imposée par la société de distribution. La série est condamnée à perdre une partie de son public à chaque délai, indépendamment de la qualité des épisodes.
Et c’est d’autant plus frustrant que les épisodes dont nous parlons cette semaine sont d’excellente facture. Si, pour le premier épisode, nous avions pu faire l’erreur dans notre critique acerbe de penser qu’il n’y aurait pas une once d’originalité à cette adaptation, chaque épisode depuis lors a renversé nos attentes. Nous avons eu droit à des adaptations d’histoires annexes issues de la nouvelle Short Story Long, telles que celle d’une machine anonyme qui se trouve une fascination pour entretenir son jardin de plantes, ou bien des segments originaux tels que le piratage de Simone par 9S. Celui-ci dévoilait la psychologie de cette machine d’une manière plus captivante sur le plan visuel que ne le faisait le jeu.
Maintenant, l’anime nous fait découvrir d’autres facettes de l’univers étendu de Nier Automata, exploré d’une manière complètement nouvelle, avec des rythmes propres à la série. Celle-ci n’a aucun attachement particulier à recréer avec exactitude les plans de caméra et les dialogues de l’œuvre originale. NieR Automata Ver1.1a est une expérience transformatrice qui a pour ambition de restituer les émotions de NieR Automata à travers des visuels originaux, et même des éléments de scénario complètement inédits.
C’est le cas de l’épisode 5, qui dépeint l’arrivée de 2B et de 9S au village de Pascal, une machine progressivement déconnectée du Réseau des Machines après une rencontre fortuite avec une entité sous-terraine. Pascal, se découvrant une conscience de soi, est horrifié par les pertes de vies occasionnées par la guerre, et se résout à fonder son village et à bâtir un futur pour ceux qu’il considère comme sa famille. 2B et 9S sont décontenancés : de quel droit les machines qui ont tué tant des leurs se permettent-elles soudainement d’avoir des émotions aussi profondes ? Si les machines sont capables d’envisager un futur qui ne gravite pas autour de la destruction perpétuelle, alors 2B et 9S ne deviennent-ils pas les machines à tuer sanguinaires qu’ils abhorrent ? Au terme d’une scène sous la pluie d’une beauté captivante, les deux androïdes finissent par rêver, eux aussi, pour la première fois, d’une vie après la guerre.
L’épisode 6 raconte les évènements de YoRHa – Ver 1.05, une performance théâtrale (NieR franchit souvent la barrière entre les différents médias) également retranscrite dans la nouvelle Short Story Long. Ces évènements mettent en scène le débarquement d’une unité YoRHa à Pearl Harbor, avec pour mission de détruire le serveur des machines dans la région. La mission subit immédiatement la tempête : douze des seize membres de l’unité meurent avant même d’avoir touché le sol. Le reste de l’escouade est contraint de quémander de l’aide auprès de la résistance, des androïdes présentes sur Terre, délaissées par le commandement de YoRHa. L’histoire est racontée par le biais de Lily, une des membres de la résistance.
Il s’agit là d’un autre élément de scénario inédit qui aura interpellé plus d’un fan : l’absence d’Anémone, un personnage annexe du jeu qui fait figure de leader de la résistance, au profit de Lily qui occupe un rôle identique. Cette décision prend tout son sens lorsqu’on est familier avec les évènements s’étant déroulés à Pearl Harbor dans la continuité de NieR : on sait que Lily entretient une relation particulière avec No2, le prototype de 2B, qui l’a un jour sauvée d’un virus logique qui aurait contraint ses camarades à l’abattre. Il y a un passif entre les personnages qui tinte les interactions entre Lily et 2B de nostalgie. Les potentielles interactions futures entre No2 (qui est révélée comme étant toujours en vie à la fin de l’épisode) et Lily seront d’autant plus personnelles, si ces deux personnages finissent par être réunis dans le présent. Pour l’instant, on ne peut que constater la mélancolie intense de Lily à l’égard de ses camarades tombées au combat, son désir d’être réunie avec au moins l’une d’entre elles. Reste à voir comment, de la manière typique des oeuvres de Yoko Taro, ce désir sera substitué à une dure réalité au moment venu.
L’épisode 7 développe les relations entre les personnages et avance dans le scénario du jeu. Le thème emprunté est celui du bateau de Thésée. 2B et 9S discutent avec Pascal du fait que le corps de ce dernier a été modifié avec des parties interchangeables. La question est alors de savoir jusqu’à quand Pascal reste lui-même. Pascal est-il encore Pascal si 99% de son corps a été remplacé ? Pour 2B et 9S, l’intégrité du corps est capitale : il fait partie de leur identité. La tendance des machines à se transformer en changeant leurs pièces est perçue comme une perte d’individualité. Pour Pascal, ce qui compte, c’est avant tout le cœur. Tant que son cœur est celui de Pascal, alors il pourrait remplacer toutes les autres composantes de son corps et demeurer lui-même.
Ce questionnement philosophique sert de pivot vers la deuxième moitié de l’épisode dans laquelle 2B, 9S et Pascal sont sur les traces d’un mystérieux tueur de machines détruisant tout sur son passage à travers le royaume de la forêt. L’histoire de ce royaume est explicitée à travers des flashbacks existant déjà dans le jeu original. 2B et 9S arrivent dans la chambre du roi de la forêt au moment où celui-ci se fait assassiner par… surprise, No2, qui est maintenant la dénommée A2. Le combat avec A2 est trop court et nous laisse sur notre faim, mais il est impossible de nier la prestance de cette mystérieuse antagoniste.
Dans le dernier épisode de cette série avant une nouvelle interruption malencontreuse dans la diffusion, le doute grandit chez 9S suite aux paroles évasives de A2. Le commandement de YoRHa les aurait trahi ? 9S est curieux. Il ne se satisfait pas des explications de sa commandante et préfère mener son enquête. Il s’agit d’un épisode transitoire dans lequel pas grand chose ne se produit. Il faut cependant souligner encore une fois l’intelligence de la série dans l’utilisation du monde de Nier Automata pour retranscrire les émotions du jeu d’origine.
Le cœur de cet épisode, c’est bien cette scène dans laquelle 2B et 9S explorent la Cité Submergée, ce lieu emblématique du jeu (et spot de pêche favori de ce rédacteur) où la guerre contre les machines a causé l’affaissement du substrat rocheux sous la ville, qui a été engloutie par l’océan. Des bâtiments et des routes saillent hors de l’eau, à moitié submergés. Les profils d’immeubles fantomatiques s’élèvent à l’horizon de manière éparse. Il s’agit d’un endroit figé dans le temps où le passé de la civilisation humaine, le présent des machines et le futur de l’horizon marin se confondent dans un éternel grisâtre, brumeux et informe. En résumé, c’est le lieu parfait pour un moment de paix pendant lequel les deux androïdes prennent encore un peu plus conscience de la beauté du monde.
Le segment final de l’épisode met en place l’intrigue qui nous attend par la suite. Les signaux radio sont brouillés, 9S est sur la trace d’une figure mystérieuse et découvre une pièce qui semble dédiée à ses aventures avec 2B, jusqu’à peindre un tableau détaillé de leur découverte de la Cité Submergée quelques minutes auparavant. Un moment d’angoisse se profile : 9S est attaqué. Et c’est sur cette note d’anticipation (et une pointe de frustration non négligeable) que nous attendrons impatiemment que la série reprenne sa diffusion.
De manière générale, il s’agit d’un lot d’épisodes très solides qui confirme encore un peu plus la capacité de l’anime à capturer ce qui fait la force du jeu, sans pour autant en être une copie immature. C’est une œuvre qui repose sur ses propres jambes et continue de surprendre par son intelligence dans l’exercice ardu d’adapter les codes vidéoludiques au petit écran.
L’avis de Brian
Les semaines passent et la série animée NieR Automata Ver 1.1a continue de se bonifier, et d’affirmer ses différences avec le jeu dont elle est adaptée. Cela nous fait regretter encore plus la nouvelle suspension indéterminée de sa diffusion pour une nouvelle épidémie de Covid. Ne soyons pas dupes, ces pauses inopinées sont sans aucun doute le résultat de la culture du travail déplorable qui gangrène l’industrie de l’animation japonaise.
Il y a quelques semaines, nous abordions le fait qu’une bonne adaptation ne doit pas simplement singer le matériau d’origine, mais se l’approprier et le digérer pour arriver à en faire quelque chose de nouveau. C’est un travail d’équilibriste qui oblige les créateurs à trouver leur propre singularité sans faire un hors sujet. La série y arrive en embrassant pleinement le lore de NieR : Automata , et en mélangeant avec brio les éléments du jeu vidéo avec tout un tas d’élément issus du premier titre de la saga, ainsi que d’œuvres annexes telles que le recueil de nouvelles Short Story Long. Il y a une volonté constante de la part de A-1 Pictures de créer un tout homogène, comme si le but de Taro Yoko était d’aboutir à la version narrative ultime de son chef d’oeuvre.
La découverte de l’étrange village de Pascal, leader d’une communauté de machines qui s’est déconnecté du réseau des machines pour vivre dans la paix et la sérénité, loin de l’enfer de la guerre, permet à la série de mettre en scène un curieux laboratoire social. Le fait de voir ces entités mécaniques se livrer à la vie en communauté, à l’apprentissage de la philosophie, mais surtout à la création d’un socle familial, permet de continuer à brouiller les cartes quant à la nature des androïdes et des machines. Ces dernières se montrent capables d’aimer et d’envisager un monde qui ne se définit pas que par la guerre et la destruction de l’autre. En un sens, elles sont plus humaines que les supposés garants de l’humanité. Il est d’ailleurs amusant de constater que le jovial 9S est le plus impitoyable et intolérant vis à vis des machines. 2B, sous ses grands airs, et sa tendance à rappeler que les émotions et les questionnements sont prohibés, se montre la plus curieuse, mais surtout la plus encline à accepter que ses ennemis peuvent être plus que des cibles à abattre.
Celui qui connaît bien l’univers appréciera la pirouette qui vise à implanter ce qu’il reste du corps d’Emile dans une partie du village pour renforcer un peu plus les liens avec NieR Replicant. Il est difficile de ne pas tressaillir quand le thème de ce personnage se met à retentir. Il y a fort à parier que nos deux héros n’ont pas fini d’apercevoir les bribes de souvenirs qui font référence à celui que Taro Yoko a rebaptisé « le destructeur du monde ». Ce village construit autour de la dépouille d’un des plus fidèles alliés du héros du premier NieR renforce l’aspect christique de ce qui se dégage à l’écran. Nous en parlions dans ce dossier consacré à l’oeuvre de Taro Yoko, mais le protagoniste de Replicant est devenu, par ses actes, le dieu créateur de la blague existentialiste dont souffrent les personnages d’Automata. Il est très difficile de croire qu’un tel choix par les équipes artistiques soit le simple fruit du hasard.
La série continue de montrer de belles qualités de mise en scène, notamment lors d’une magnifique discussion sous la pluie entre les deux protagonistes qui discutent pour la première fois comme s’ils n’étaient pas que des outils. Ils se mettent à envisager une vie après la guerre. Si les machines arrivent à se détourner du combat, la logique veut qu’ils en soient également capable. Le plan sur une flaque d’eau qui permet d’insister sur le reflet pensif et désespéré de 2B laisse peu de doute quant à ce qui les attend. Elle le sait, il ne peut y avoir de fin heureuse, même si elle aimerait qu’il en soit autrement. Après tout, ils sont prisonniers d’une spirale sans fin de vie et de mort dont il est impossible de s’échapper. Ils ne sont peut être que des outils, des entités faites de rouages et de vis, mais il apparaît pourtant qu’ils sont incapable de vivre seuls, comme si leur rapport aux autres était primordial pour se définir. Cela permet à la série de surfer sur une des obsessions de Taro Yoko : il n’y a pas d’existence sans amour. Ce sentiment est ce qui fait notre gloire et notre décadence.
La vraie valeur ajoutée de cette version animée de NieR est sa capacité à rassembler des éléments du jeu ainsi que d’autres issus de pièces de théâtre et de nouvelles en lien avec la saga. C’est une bonne occasion d’explorer des actes très intéressants et riches en thématiques comme l’opération Pearl Harbor. Cela permet de découvrir en profondeur la psyché de Lily et sa rencontre avec les YoRHa qui se termine par une opération militaire contre les machines dont elle est la seule à réchapper. Nous pouvons ainsi aborder le thème des traumatismes liés à la guerre, mais surtout à la perte de nos proches. Si un androïde peut ressentir le regret, au point d’être consumé même dans son sommeil par les souvenirs de son passé, ne devient-il pas plus qu’un outil ? S’il est capable d’aimer et de ressentir le deuil, la créature n’est alors pas si différente de son créateur. Ce dernier est finalement rarement évoqué, sauf par nos deux héros. Le reste des androïdes remplit sa mission, mais il apparaît que s’ils se battent, c’est avant tout pour protéger ceux qui les entourent et s’apparentent le plus à une famille.
Cette notion est plus que jamais au centre du récit. Au final, ce n’est pas leur devoir pour les Hommes qui les fait avancer, mais l’espoir de jours meilleurs tous ensembles dans ce monde qui peut être si beau. Malheureusement, les choses se finissent rarement bien dans le monde de NieR, et ce plan sur cette main déchiquetée qui s’accroche désespérément à la pureté d’une fleur sur le champ de bataille laisse songeur. Toute cette imagerie vient accentuer la culpabilité du survivant qui ronge Lily. Les dernières secondes amorcent l’arrivée de A2, autre survivante de l’opération Pearl Harbor. Son iconographie ne laisse que peu de doute, elle incarne la fureur et le sang, bien loin de l’image de pureté et de bonté que nous pouvions voir d’elle dans l’histoire racontée par Lily.
Adam et Eve, incarnations de l’évolution ultime des machines, représentent l’alpha et l’oméga du questionnement existentialiste de ce début de saison. Il y a ce dialogue court mais riche de sens au cours duquel ils se demandent ce qui caractérise l’humanité, puisqu’il semblerait que l’existence précède l’essence selon les philosophes humains. Il n’est alors pas impossible qu’une machine puisse afficher autant d’humanité qu’un être de chair et de sang, car seuls ses actes et ses décisions peuvent définir sa nature propre. Le rapport à l’existence est définitivement ce qui caractérise le plus la licence NieR. Les échanges entre 2B, 9S et Pascal sur le fait que ce dernier change régulièrement les composants de son corps renforce cette obsession thématique. Il est légitime de se demander si nous sommes toujours nous-même après avoir modifié notre corps. Pascal est-il toujours Pascal s’il ne reste rien du corps qu’il avait à l’origine ? La question est de savoir si c’est notre corps ou nos souvenirs qui nous définissent. Cela fait écho à un dialogue mineur du jeu vidéo sorti en 2017, au cours duquel un androïde confiait ne pas vouloir changer sa jambe gauche devenue défectueuse, car c’est la seule pièce d’origine qu’il lui reste. Ce personnage affichait alors sa crainte de perdre son identité s’il venait à s’en débarrasser.
Leurs pérégrinations les amènent à découvrir le royaume Sylvestre, une autre colonie de machines qui s’est organisée comme nos sociétés européennes médiévales. Si sa nature profonde est radicalement différente de celle du village de Pascal, nous y retrouvons la même fascination pour la notion de famille. Pour la première fois, 9S commence à afficher des doutes quant à sa façon de percevoir ses ennemis. Ce qu’il découvre, ainsi que le temps passé avec Pascal, sont autant de facteurs qui le changent petit à petit. Il n’est pas difficile de penser que sa froideur des précédents épisodes n’est qu’un mécanisme de défense contre sa propre curiosité. Il est impossible pour 9S de ne pas en apprendre plus que les autres. Son parcours est celui de la vérité. C’est par son biais que le spectateur, comme le joueur à l’époque, en apprend toujours plus sur la réalité du monde. Leur avancée dans ce royaume détruit par les aspirations belliqueuses de A2 a quelque chose de poétique et préfigure les graines de la discorde que l’androïde renégat va semer dans leur tête vis à vis de la chaîne de commandement. C’est comme si la série essayait de nous dire que le chemin vers la vérité ne peut être que long et cruel.
De part sa nature profondément curieuse, 9S ne peut qu’être lentement consumé par le doute implanté en lui par sa dernière opposante. Cet aspect de sa personnalité est primordial dans le déroulé des événements à venir. Il faut vraiment garder en tête la citation de 2B sur le concept de cycle. Il ne s’agit pas de spoiler les tenants et aboutissants du récit, mais rien que le fait d’avoir cette idée dans un coin de la tête permet d’appréhender sous un autre angle les comportements de nos deux androïdes d’élite. Si le jeu vidéo n’est pas avare en moments paisibles et poétiques, il reste avant tout un jeu d’action survitaminé. Il est possible de faire l’aventure en courant dans tous les sens, comme il n’est pas interdit de se poser en haut d’un bâtiment et d’observer les ruines de notre civilisation en écoutant les compositions musicales de Keiichi Okabe.
Cette version animée de l’histoire est beaucoup plus timide en termes d’affrontements, et met l’accent sur ses personnages et son ambiance. Le monde de NieR est un mausolée à la gloire de l’humanité, et le studio d’animation l’a parfaitement compris. La mise en scène continue de magnifier les moments de contemplation et d’afficher des plans d’une grande poésie, en alliant brillamment des visuels poignants et un fan service malin. Voir 2B sortir de sa froideur pour prendre le temps d’apprécier un bain de pieds anodin dans l’océan, le tout sous l’un des thèmes musicaux de Replicant, a quelque chose de reposant. Cela permet d’accentuer l’aspect promenade sans but réel de nos héros. C’est notamment l’une des grandes différences avec le jeu. Si dans ce dernier nous allions d’un objectif à l’autre pour satisfaire les ordres du commandement, dans la série nos héros semblent perdus sur terre, enchaînant les découvertes malencontreuses, rendant des services, parfois issus des quêtes annexes de son modèle.
C’est une façon intelligente de mettre en avant le caractère dépressif du monde de NieR sans avoir le luxe de l’interactivité propre à une œuvre vidéoludique. Les paysages de la cité submergée sont parfaits pour peindre cette atmosphère crépusculaire. Le monde des hommes n’est plus. Il ne reste que des dédales urbains qui seront tôt ou tard engloutis par la nature. Plus que jamais, les personnages que nous suivons apparaissent comme des fantômes parcourant un monde figé et sans avenir. Ils sont incapables de se définir en dehors de leur rapport avec leur humanité, comme s’il leur était impossible de tracer leur propre route. Les personnages, machines comme androïdes, sont condamnés à marcher dans les pas de l’humanité. Ils sont comme des trains prisonniers d’un rail. Sortir de cette logique de pensée les condamnerait à l’inutilité, mais surtout à une longue chute dans l’absurde.
NieR : Automata Ver1.1a continue de s’affirmer comme un objet culturel indissociable et complémentaire de l’œuvre d’origine. Le jeu exprimait tout sa philosophie par le prisme du ludisme. Ici, nous avons une création qui utilise tout ce que le format télévisuel lui permet de faire. D’ici à la fin de la série, il y a fort à parier que la série et le jeu finissent par devenir les deux faces d’une même pièce.