Presque trois ans après la sortie de Final Fantasy VII Remake, il est temps pour nous de revenir en profondeur sur ce projet qui s’est fait désirer pendant de longues années. Notre site n’existait pas encore en avril 2020, mais à environ un an de la sortie du deuxième épisode de cette relecture du monument vidéoludique de la première PlayStation, nous estimons qu’il n’y a pas de meilleur moment pour étudier sous toutes les coutures l’opus qui a permis un retour en grâce de la licence Final Fantasy, après presque une décennie à souffler le chaud et le froid. Que nous aimions ou non les RPG japonais, Final Fantasy VII est une icône dont nous avons tous entendu parler. Plus que le jeu qui a envoyé la première console de Sony sur orbite, cet épisode a été une véritable rupture culturelle et technologique. Autant dire que se lancer dans le projet de réinventer un tel mythe sentait la mauvaise idée à plein nez. Cela n’a cependant pas arrêté Tetsuya Nomura et ses troupes qui ont poussé les curseurs au maximum en réussissant à proposer beaucoup plus qu’un simple remake.
Un remake ? Vraiment ?
Final Fantasy VII est le premier épisode de la célèbre saga japonaise qui a été commercialisé sur nos terres. Plus que cela, il est le titre qui a permis au genre du J-RPG de connaître un succès colossal partout dans le monde. Son iconographie est légendaire, et des personnages tels que Cloud et Sephiroth sont entrés dans la mémoire collective de l’industrie vidéoludique. Malgré tout, il s’agit d’une œuvre qui a désormais 25 ans, et que les nouvelles générations n’ont pas forcément pris le temps de découvrir. C’est là que le travail de titan de Square-Enix commence : créer un jeu qui rend hommage à la légende sans laisser de côté les connaisseurs ou les néophytes. La première décision de l’éditeur japonais est de faire de ce remake une saga, vraisemblablement une trilogie. Les mondes des Final Fantasy de l’ère de la PlayStation 1 sont tellement riches en lore et en environnements que la décision peut s’entendre. Modéliser la planète que nos héros doivent traverser, avec les critères techniques d’aujourd’hui est difficilement concevable sans mettre à genoux les machines actuelles. Cette première partie, sobrement intitulée Remake, ne couvre qu’un seul segment du jeu d’origine, celui de la ville de Midgar. Les péripéties vécues dans cette mégalopole décadente ne représentaient que 8 heures de jeu à l’époque, il faut désormais en compter entre 35 et 40 heures en ligne droite. Tetsuya Nomura fait le choix de prendre son temps, parfois en densifiant considérablement les relations avec des personnages tertiaires, en rendant certains combats beaucoup plus titanesques et éprouvants qu’à l’époque, et en rajoutant des quêtes annexes visant à creuser davantage la réalité économique et sociale de la ville. Malheureusement, cette densification s’obtient aussi en allongeant parfois inutilement certains passages, à cause de cette obsession du rapport d’échelle pour ne rien perdre du gigantisme de ce dédale urbain.
L’aventure commence tambour battant, avec une introduction de type in medias res (du latin signifiant « au milieu des choses » ). Pas le temps de perdre de précieuses minutes à faire de la mise en contexte. L’objectif est simple : capter immédiatement notre attention. Après une courte scène d’introduction qui nous montre l’immensité de Midgar, nous sommes, grâce à un habile mouvement de caméra, directement plongés au cœur de l’action avec l’arrivée tonitruante d’un train en gare. Ce dernier abrite Cloud, jeune mercenaire ténébreux, qui loue ses services au groupe éco-terroriste Avalanche dont l’objectif est de protéger la planète. Accompagné de Barret Wallace, le massif leader exubérant et violent de l’escouade, ainsi que de Jessie, Biggs et Wedge, notre héros, armé d’une épée massive qui semble venir tout droit de l’univers de Berserk, se fraie un chemin à travers les lignes de défenses de la Shin-Ra Corporation qui contrôle la ville de Midgar. La mission est de faire exploser l’un des huit réacteurs Mako de la mégalopole qui servent à pomper l’énergie vitale de la planète pour alimenter les quartiers en énergie. Cette lutte idéologique pour l’avenir de la planète est le segment majoritaire de cette relecture, là où elle ne servait que d’introduction afin de présenter une menace bien plus grande dans l’œuvre originale. Le plus impressionnant, c’est que les développeurs arrivent à tripler la durée de vie des événements de Midgar en donnant rarement l’impression de rallonger inutilement le jeu. Seules les quêtes annexes sont vraiment discutables. Si certaines sont vraiment intéressantes, beaucoup flirtent avec le FedEx et ne servent que de prétexte pour donner l’occasion de tuer plus de créatures lors d’affrontements spectaculaires.
L’exploit de faire un jeu entier sur la ville dirigée par la Shin-Ra est rendu possible grâce au gros travail de mise en scène accordé à chaque événement, et au sens du détail très prononcé des équipes de Tetsuya Nomura. Tout cela permet de redécouvrir sous un jour nouveau la profondeur du monde de Final Fantasy VII. Les lieux iconiques sont modélisés avec soin, et le contexte économique et social de la mégalopole d’inspirations steampunk est encore plus développé que par le passé. Arpenter les rues du Secteur 8 après l’explosion du réacteur a quelque chose de très perturbant. Les habitants sont apeurés, certains sont bloqués ou blessés par des projectiles, des bâtiments prennent feu. Le joueur est plongé au cœur des conséquences des actions qu’il vient de mener et comprend que, si la cause est juste, les dommages collatéraux sont inévitables. Il en est de même pour les longues errances dans les différents quartiers de Midgar, en particulier dans les taudis de la ville inférieure. Ces zones nous permettent de vraiment appréhender le tissu social des bas-fonds. Nous pouvons observer le quotidien de ces gens qui s’articulent presque comme une grande famille de laissés-pour-compte. Le joueur peut, au gré de sa progression, écouter les habitants discuter et partager leurs opinions sur les événements récents. Tout cela donne une tonalité très forte à la ville, qui devient plus palpable que jamais.
Les graphismes sont magnifiques, mais il y malgré tout quelques textures baveuses ou qui prennent parfois beaucoup plus de temps que d’autres à charger. Il y a des séquences plus inégales que d’autres, et qui ne manquent pas de faire tiquer tant elles dénotent avec le soin global apporté au titre. Mais dès que l’on touche aux moments clé de l’intrigue, le titre de Square Enix peut sans difficulté se pavaner d’être l’un des plus beaux jeux de ces cinq dernières années. C’est un véritable musée à la gloire du monument originel. Le tout est assemblé avec tant de maestria, qu’il fait peu de doute que même un néophyte de l’univers ne peut rester de marbre devant le spectacle qui lui est proposé. Regarder depuis les taudis la plaque supérieure de Midgar a quelque chose d’envoûtant. L’architecture peu commune de Midgar permet aux développeurs de nous proposer des plans magnifiques en mettant en avant les spécificités structurelles de la mégalopole. Mais là où le jeu est une démonstration avec laquelle peu de jeux arrivent à rivaliser, c’est dans son travail sur les personnages. Leurs animations corporelles, leurs attitudes et surtout leurs regards sont plus vrais que nature. La lueur dans les yeux de nos héros donne parfois l’impression perturbante qu’ils sont réels. Les doubleurs dans les différentes langues livrent une performance de très haut niveau, même en français. Cloud, dans son rôle de faux mec froid et badass qui est en fait rongé par les incertitudes et les fêlures du passé, n’aura jamais été aussi charismatique. Il en est de même pour la protectrice et très concernée Tifa. Les personnages complexes et mystérieux que sont Sephiroth et Aerith bénéficient particulièrement de ce bond technologique. Ce soin apporté aux regards permet de faire comprendre des choses sans qu’aucun mot ne soit prononcé. Cette narration par le silence, ainsi que les sous-entendus faits par certains des protagonistes, qui semblent en savoir plus que ce qu’ils ne devraient sur les enjeux de l’aventure à venir, fait de Final Fantasy VII Remake bien plus qu’une simple remise au goût du jour technologique.
Là où certains jeux prennent le mot remake au pied de la lettre, en se contentant de proposer des graphismes affinés pour un titre déjà existant, cette nouvelle itération de Final Fantasy VII va beaucoup plus loin et prend le pari risqué d’être un remake et une suite en même temps. Si le joueur qui ne sait rien de l’univers de l’opus originel peut apprécier l’aventure sans forcément en saisir toute sa richesse, celui qui connaît parfaitement l’histoire du mythe comprend que Nomura s’est évertué à créer un lien entre Final Fantasy VII et cette relecture. En quelques sortes, nous avons la conclusion du projet Compilation of Final Fantasy VII qui avait occupé les équipes de Square Enix pendant une bonne partie des années 2000 avec divers jeux sur PlayStation Portable, PlayStation 2, mobiles, ainsi qu’avec des recueils de nouvelles, et même un film d’animation. L’extension solo Intergrade confirme ce sentiment en intégrant des personnages de Final Fantasy VII : Dirge of Cerberus. Chaque élément de l’histoire, fidèle ou inédit, a son importance dans la compréhension de ce projet herculéen. Il y a d’ailleurs fort à parier que les gardiens du destin qui apparaissent à plusieurs reprises dans le jeu, sont une métaphore du protectionnisme des fans du jeu de base qui sont prêts à tout pour s’assurer que l’histoire se déroulera telle qu’elle doit se dérouler. Le titre n’est jamais plus fascinant que lorsqu’il a conscience d’être un remake et qu’il n’hésite pas à s’amuser de cette condition. S’il est naturel d’être craintif quant à la tournure que prendront les suites de cet opus, une telle audace ne peut être qu’applaudie. C’est souvent le meilleur moyen de rendre hommage à un monument culturel. La fin explosive lance des pistes très méta, qui ne plairont pas à tous, mais qui témoignent d’une vraie intelligence dans la façon de renouveler une histoire connue.
Entre modernité et classicisme
Final Fantasy VII Remake est un habile exercice d’équilibriste, qui tente en permanence de créer l’alliance parfaite entre la modernité et les éléments classique du mythe dont il puise sa substance. Cela se ressent dans sa narration comme nous avons pu l’aborder plus haut, mais aussi manette en main. Les équipes de développement ont pris la décision de transformer le système de combat, sans pour autant renier ses racines. Beaucoup plus orienté vers l’action que l’opus sorti sur PlayStation 1, ce remake n’est pas pour autant un Beat Them All qui tourne le dos à la richesse systémique des jeux de la licence. Le gameplay est une prouesse, et constitue un pont parfait entre deux époques séparées de plusieurs décennies. Le système des jauges d’Active Time Battle est toujours de la partie, ce qui nous permet de rappeler au passage que les Final Fantasy ont rarement été des jeux au tour par tour. Ces jauges se remplissent au fur et à mesure selon la statistique de rapidité des différents personnages. Leur remplissage est obligatoire pour pouvoir utiliser les compétences ou les sorts à la disposition de Cloud et de ses compagnons. C’est au joueur de frapper ses opposants pour accélérer leur remplissage, tout en se protégeant ou en esquivant les attaques ennemies.
Le résultat est sensationnel, et permet de poser ce système de combat comme l’un des meilleurs de cette saga vieille de 36 ans. Le dynamisme est ce qui définit le mieux les affrontements qui alimentent les 40 heures de jeu nécessaire pour arriver au bout de l’intrigue. Le joueur est constamment sollicité et ne peut jamais se permettre de baisser sa garde. Marteler les touches d’attaques ne sert à rien, ou, en tout cas, rallonge grandement la durée des combats qui peuvent s’avérer très éprouvants. Il est donc nécessaire de s’imprégner pleinement des mécaniques de jeux et de varier les techniques d’attaques pour remplir au plus vite les barres de Choc et de Fragilité des ennemis pour les mettre rapidement hors d’état de nuire.
Évidemment, contrôler uniquement Cloud au cours des combats n’est pas suffisant pour cela, et il est nécessaire de prendre l’habitude de passer instantanément d’un personnage à l’autre. Il ne faut pas plus de quelques minutes pour se rendre compte des avantages et faiblesses de style des protagonistes. Si Cloud est un peu le personnage polyvalent par excellence, il est toujours recommandé de prendre le contrôle de Barret pour s’occuper d’ennemis aériens difficiles à atteindre. Il en est de même pour Tifa, dont la rapidité d’enchaînement des combos est salutaire pour déstabiliser plus rapidement les ennemis, en plus de donner parfois un petit aspect Versus Fighting aux combats. Aerith permet d’apporter une touche tactique originale avec son statut de magicienne de la bande. Si la puissance destructrice n’est pas ce qui la caractérise, elle est porteuse de nombreux atouts susceptibles de renverser toutes les situations défavorables. Le titre a en plus la bonne idée d’avoir ce qui s’apparente à une pause tactique. En gros, si un combat devient délicat, ou que le déluge d’effets visuels commence à surcharger l’écran, il est possible de figer le temps pour choisir tranquillement les futures actions des personnages prenants part au combat. Cette fonctionnalité est une brillante idée qui montre tout le respect des développeurs pour l’héritage de la saga.
Chaque personnage dispose d’une compétence spéciale accessible par la touche Triangle et qui ne consomme pas la jauge d’ATB. Cloud peut passer en mode « Bravoure du SOLDAT » qui réduit sa vitesse et l’empêche d’esquiver les attaques, mais qui augmente considérablement sa puissance et lui permet d’effectuer des contre-attaques dévastatrices s’il effectue sa parade au bon moment. Cette diversité dans les combats permet de rendre mémorables tous les boss qui se dressent sur notre chemin. Même des ennemis anecdotiques de l’opus sorti en 1997 prennent une envergure incroyable. La manière dont le jeu arrive à imbriquer des cinématiques ultra chorégraphiées en plein milieu des affrontements, sans jamais interrompre la fluidité de leur rythme est un tour de force. En termes de mise en scène titanesque, on est sur ce qui se fait de plus percutant sur PlayStation, avec les deux derniers épisodes de la saga God of War. Il est très difficile de ne pas être émerveillé devant les combats de Final Fantasy VII Remake. C’est simple, on a très souvent l’impression d’être le protagoniste d’un animé japonais.
Le système de magie reste fidèle à l’opus sorti sur PlayStation en conservant la mécanique des Materia. Ces petits orbes qui sont des cristallisations de l’essence de la planète renferment les différentes magies et autres invocations que les personnages peuvent utiliser. Que ce soit en 1997 ou en 2023, le constat reste le même : aucun autre épisode ne peut se targuer d’avoir un système de magie aussi pertinent et permissif. Toutes les Materia peuvent être données à n’importe quel personnage. Il n’y a pas de rôles prédéfinis pour les membres de notre équipe, même si certains ont des affinités plus prononcées avec certains styles. Il est ainsi possible de construire des configurations variées et dévastatrices. Ces orbes s’insèrent dans les orifices prévus à cet effet sur les armes et les bracelets de défense. Plus nous les utilisons, plus leur pouvoir augmente, il est donc primordial de les utiliser au maximum et de ne jamais hésiter à varier ses tactiques.
Du fait que l’aventure prenne fin à un stade relativement peu avancé de l’intrigue de Final Fantasy VII, ce système de magie est donc légèrement moins profond qu’il ne l’était. Ce petit manquement est contrebalancé par un excellent système d’amélioration des armes. Ces dernières ne deviennent pas jetables dès que nous trouvons une arme avec de meilleures statistiques comme dans la quasi-totalité des RPG. Au contraire, ce sont des objets persistants qu’il faut rassembler, garder et améliorer tout au long de l’aventure. Non seulement leurs améliorations augmentent les statistiques des personnages, ou donnent la possibilité de s’équiper de plus de Materia, mais elles permettent surtout l’apprentissage de compétences offensives et tactiques. Chacune possède une capacité unique. Plus nous utilisons l’arme et la compétence qui lui est associée, plus notre personnage développe sa maîtrise de cette dernière. Lorsque l’apprentissage est total, nos héros gardent en mémoire les techniques apprises même s’ils sont désormais porteurs d’une arme différente. Très rapidement, le jeu nous met donc en possession d’un éventail de possibilités qui rendent impossible l’apparition de la moindre monotonie dans les combats. En plus, cela permet de faire toute l’aventure avec la traditionnelle Buster Sword de Cloud, sans se sentir lésé en termes de puissance. Que demander de plus ?
Qui dit ensuite Final Fantasy dit forcément musique, tant l’importance des compositions musicales est cruciale dans l’ADN de la licence. Les partitions de Nobuo Uematsu pour le septième épisode de la saga sont parmi les plus plébiscitées de l’histoire du jeu vidéo, et ont encore régulièrement le droit d’être mises à l’honneur dans de somptueux concerts symphoniques à travers le monde. Il était donc très risqué de se lancer dans un revisite de thèmes aussi cultes que celui de Aerith, de Sephiroth ou des taudis de Midgar. Encore une fois, la mission est réussie par les équipes de Square Enix. Les arrangements de Final Fantasy VII Remake sont époustouflants et nous foudroient en plein cœur dès les premières secondes de l’aventure. Les scènes grandioses de l’histoire sont ainsi magnifiées par le pouvoir de la musique, et certaines séquences risquent de faire couler pas mal de larmes, tant la trame atteint souvent des sommets d’intensité rarement vu dans un jeu vidéo. De plus, la musique varie selon l’action, ce qui veut dire que chaque thème existe en plusieurs versions qui s’enchaînent sans même que l’on s’aperçoive d’une quelconque coupure tant les transitions sont organiques. À l’exception d’une ou deux pistes qui tombent un peu trop dans l’utilisation du synthétique, la bande-son est un sans-faute.
Audacieux mais également fragile
Final Fantasy VII Remake est généreux dans tout ce qu’il propose. C’est une vraie déclaration d’amour à la mouture sorti en 1997, qui veut séduire un nouveau public tout autant qu’il souhaite entretenir la flamme de ceux qui ont permis à ce titre d’entrer dans la légende. Le problème, c’est que lorsqu’on essaie d’en faire beaucoup, on finit aussi par en faire trop. Se balader dans les quartiers disponibles de Midgard est grisant, notamment grâce à la variété des décors proposés, et parce que toutes les excuses pour s’amuser avec le système de combat sont bonnes. Nous aurions cependant aimé pouvoir explorer beaucoup plus la ville, comme ce que les développeurs promettaient avant la sortie officielle du jeu. S’il ne faut jamais juger un jeu sur les promesses, nous ne pouvons nous empêcher de penser qu’il y avait moyen d’encore plus développer la mégalopole quand on constate que certains chapitres sont inutilement prolongés. Ces sections de jeux, de l’ordre de trois ou quatre heures, ne reposent que sur d’ennuyantes recherches d’interrupteurs pour avancer dans l’intrigue. Un chapitre entier nous oblige à revenir dans un lieu déjà visité pour découvrir un laboratoire secret qui n’apporte absolument rien au scénario, si ce n’est la confirmation de la survie d’un personnage que nous pensions mort. Nous sommes persuadés qu’il était possible d’aboutir à la même conclusion tout en s’épargnant l’exploration fastidieuse du centre de recherche scientifique sous-terrain. Heureusement que les combats permettent de pimenter le tout et de diminuer cette sensation de gonflement artificiel de la durée de vie.
La structure très linéaire de FF7 Remake peut parfois dérouter tant le monde qui nous entoure donne envie de l’explorer, mais il faut reconnaître que le titre arrive à garder un très bon équilibre dans sa narration la majeure partie du temps. Il évite notamment un écueil souvent soulevé par les détracteurs de J-RPG : le farming. Il est tout à fait possible de vivre l’aventure en ligne droite comme un pur jeu d’action-aventure, sans se retrouver bloqué car nous n’avons pas enchaîné plusieurs heures à annihiler des rats d’égouts pour gagner en puissance. Là où le bât blesse, c’est dans le contenu des choses à faire une fois le jeu terminé. Vu la fin du jeu, il est évidemment difficile de proposer quelque chose d’alléchant, mais nous aurions aimé avoir plus qu’un nouveau mode de difficulté qui ne rajoute pas grand-chose, si ce n’est l’impossibilité d’utiliser des objets et de recharger ses points de magie. Il n’est également pas possible de visiter les différentes sections de la ville sans devoir rejouer le chapitre approprié depuis les menus du jeu.
Comme indiqué plus haut, le retour de Cloud sur consoles de salon est autant un remake qu’une pirouette pouvant être perçue comme une suite aux événements du film d’animation Final Fantasy VII : Advent Children et du spin-off Dirge of Cerberus sorti sur PlayStation 2. La phrase d’un certain personnage « Je ne serai jamais un souvenir » prend une dimension inattendue dans les dernières heures de l’aventure. Le souci, c’est qu’une telle audace, si elle peut s’avérer salvatrice sur la première partie d’un projet, peut aussi faire craindre le pire quant à la tournure que prendront les suites de ce Final Fantasy VII Remake. Sans en dévoiler trop, il faut reconnaître que ces histoires de destinées à combattre, et visiblement de dimensions parallèles qui coexistent sont aussi alléchantes que terrifiantes, surtout quand on repense à la manière dont Tetsuya Nomura s’est planté lorsqu’il a fallu clôturer l’arc de Sora pour la saga Kingdom Hearts. Certains diront que l’incertitude du futur contribue à l’excitation autour du projet. Si nous ne contredisons pas cela, espérons que le créateur japonais a appris de ses erreurs sur la manière de gérer des histoires aussi complexes.
L’un des atouts de l’oeuvre de Square Enix est enfin la dissonance volontaire entre la gravité du récit raconté et le grand-guignolesque assumé de certains passages. C’est un jeu qui sent bon les années 90 et qui n’hésite pas à pousser les curseurs au maximum. Cela peut en dérouter certains, mais à une époque où les grosses productions font tout pour se plier à certains critères fallacieux de maturité et de respectabilité, il est bon de voir un jeu de cette envergure se moquer de ce genre de questionnements. Les personnages alternent, avec une fluidité folle, l’élégance et l’exubérance. Barret en est le meilleur exemple. Tantôt inspirant et poignant dans son rôle de leader révolutionnaire, il lui en faut peu pour partir en vrille dans de grandes envolées lyriques et corporelles. De même pour Cloud qui est tour à tour un inadapté social touchant, et un mec faussement cool qui en fait des tonnes dans sa froide badassitude. Alors que beaucoup de jeux échoueraient à créer un ensemble homogène, ce remake s’en sort à la perfection, car il va toujours au bout de ses intentions. S’il faut aller dans l’intimisme dramatique, il met de côté ses excès pour nous servir des scènes poignantes telles que le passage de nuit dans le champ de fleurs des taudis entre Cloud et Tifa, durant laquelle notre héros laisse enfin son humanité prendre le dessus sur son paraître. Quand il décide de nous faire plonger dans la luxure des bas quartiers, il ne se prive de rien avec des séquences ubuesques et très suggestives dans le quartier du Wall Market, le point d’orgue étant la scène de danse dans un cabaret hautement sexualisé.
Final Fantasy VII Remake c’est aussi des moments d’une intensité folle et rarement atteint dans un jeu vidéo. L’arrivée de Cloud à moto, ainsi que le combat final au cœur d’une illusion contre Sephiroth, donnent la possibilité au joueur d’être l’acteur de séquences que personne n’aurait osé imaginer dans un jeu il y a une dizaine d’années. Dramatique, mélancolique, parfois violent et triste, le scénario de cette relecture du mythe est un tourbillon d’émotions.
CONCLUSION
Final Fantasy VII Remake
Final Fantasy VII Remake est la preuve que Square Enix en a encore sous le coude, mais surtout que la licence reine du J-RPG n'a pas fini de nous étonner. Nous avons ici un véritable diamant qui mérite toute notre attention. Sa maestria, ainsi que ses prises de risques audacieuses en font un jeu qui s'adresse autant à ceux qui ont aimé l'aventure originelle qu'à ceux qui ne connaissent rien de cet univers. Le passage de Midgar est sublimé, grâce à un sens de la mise en scène qui permet de décupler les émotions qui se dégagent des scènes les plus marquantes du titre. L'impeccable travail de réorchestration des pistes musicales de Nobuo Uematsu vient supporter le tout, au point qu'il est bien difficile de ne pas fredonner les thèmes les plus mythiques plusieurs jours après avoir atteint le bout de l'aventure. Si certaines textures sont un peu baveuses dans les taudis, nous avons là un des plus beaux jeux qu'il nous ait été donné de voir. Son système de combat qui fusionne le meilleur des jeux d'action modernes au classicisme des jeux de rôle à l'ancienne est la cerise sur le gâteau. Nous avons donc là une œuvre magnifique à regarder et à écouter, mais surtout incroyablement plaisante à jouer. Il nous tarde de voir ce qui nous attend pour les futurs épisodes de ce projet de relecture de Final Fantasy VII, et si certaines pistes de scénario ont de quoi nous inquiéter quant à la suite des événements, il reste grisant de voir un remake de cet acabit tout oser et rien se refuser.
LES PLUS +
- Des graphismes époustouflants
- Une bande-son légendaire
- Un système de combat parfait
- Le système des Materia
- La mécanique des armes et des compétences uniques
- Des personnages profonds et incroyablement modélisés
- Une histoire fantastique
- Une fin audacieuse et méta
- Des moments cultes à n'en plus finir
- Beaucoup d'excitations pour la suite
- Des boss titanesques
- Un doublage d'excellente qualité
LES MOINS -
- Une durée de vie parfois inutilement rallongée
- Quelques textures baveuses
- Des craintes quant à la tournure du scénario dans les futurs opus
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