Tout comme l’épisode 5 ( la critique se trouve juste ici) qui concluait les péripéties de nos héros dans les rues de Kansas City, finissant d’adapter très librement le passage qui se déroulait initialement à Pittsburg dans l’œuvre originelle, l’épisode 6 de The Last of Us ramène les fans du jeu vidéo en terrain connu au cœur de l’hiver du Wyoming. Craig Mazin et Neil Druckman démontrent une insolente facilité pour retranscrire à l’écran ce qui fait la saveur de la saga, en nous plongeant au cœur d’un récit humain qui déborde plus que jamais d’émotions. La dernière ligne droite de ce puissant roda trip est d’ores et déjà amorcée.
Critique sans spoilers
Comme nous le disions dans l’introduction, cet épisode 6 de The Last of Us cherche à se rapprocher un peu plus de la trame du jeu vidéo. Si pour des raisons de pertinence d’adaptation, les événements sont amenés différemment, voir parfois écourté, l’essentiel est préservé et parfaitement retranscrit à l’écran. Les premières minutes nous permettent d’apprécier l’errance de Joël et Ellie dans l’arrière-pays américain recouvert d’un épais manteau de neige. Les trois mois écoulés depuis les péripéties de Kansas City se ressentent à l’écran, tant la complicité entre les deux personnages est plus capable. Plus que jamais, Pedro Pascal campe cette image du père un peu bourru qui s’est attaché à ce qui ne devait être qu’une simple cargaison à livrer. Bella Ramsey est définitivement née pour incarner Ellie. Elle arrive à parfaitement retranscrire la tendresse et le caractère volcanique de ce personnage iconique, devant lequel il est bien difficile de rester de marbre malgré son manque de bonnes manières et son langage un peu rude qui ne manque pas d’amuser, ou d’interloquer, les différentes personnes rencontrées au cœur de l’hiver.
La volonté d’humaniser encore plus, ou d’une manière un peu différente que dans le jeu, atteint ici son paroxysme. Parce que cet épisode fait en plus grandement avancer le voyage de nos deux compères, nous aurions tendance à dire que le résultat est encore plus stupéfiant que dans l’épisode 3 qui a su émouvoir tant de monde. Il est très appréciable de voir que les retrouvailles entre Joël et Tommy permettent de rappeler que notre Texan pure souche n’est pas le seul à avoir fait des choses plus que douteuses au cours de ses 20 années de survie. Tommy en est conscient, et ceux qui sont tentés de dédouaner le pauvre petit frère qui a simplement suivi son ainé se font remettre en place par Ellie. La série à la bonne idée d’insister sur le fait que les deux frères ne sont ni bons ou mauvais, qu’ils ont juste survécu de la seule manière qu’ils connaissaient. Malgré tout, il y a toujours la possibilité de faire autrement et d’opter pour la vie plutôt que pour la survie.
Cette possibilité du choix est représentée par la paisible ville de Jackson. Cette communauté, qui incarne presque la représentation idéale d’un modèle communiste fonctionnel, montre que la vie dans le monde de The Last of Us ne se résume pas qu’aux zones de quarantaines sous l’emprise de militaires autoritaires, et qu’il est possible de rêver d’une vie en pleine nature qui repose sur autre chose que de dormir nerveusement à la belle étoile après avoir mangé sa ration de bœuf séché. Joël pensait devoir venir sauver Tommy, il apparaît clairement que ce n’est pas le dernier de la fratrie qui a besoin d’une main tendue. Cet épisode permet de s’attarder encore sur le personnage incarné par Pedro Pascal, qui livre au cours de ces 57 minutes une de ses plus belles prestations d’acteur. Joël est peint comme un homme brisé qui a peur de revivre avec Ellie la même finalité qu’avec Sarah. L’utilisation habile des lumières dans l’obscurité, ainsi que des plans de caméra qui savent quand s’attarder sur un visage pensif, permettent de nous plonger dans les tourments de celui qui était jusqu’à présent surtout dépeint comme un homme violent et sans pitié.
L’ambiance est plus grandiose que jamais grâce à un sens du rythme aboutit. Si les derniers épisodes avaient pu donner à certains le sentiment d’un récit parfois un peu bâclé comparé au jeu de base, tout est parfaitement implémenté dans le dernier chapitre en date de la série. Tout est suffisamment bien retravaillé pour offrir des dernières minutes d’une grande qualité qui nous rapprochent de la fin du périple. Si la route est encore longue et sinueuse, nos deux héros ne seront plus jamais les mêmes. Il est temps de dire adieu au contrebandier et à sa marchandise, et de dire bonjour à ce binôme d’amis qui arpente les routes dévastées de l’Amérique profonde.
L’avis d’Emma, rédactrice en chef adjointe de Naughty Dog Mag
« La réalisatrice Jasmila Žbanić nous lance un coup de grâce avec ce nouvel épisode. La matière d’origine est encore une fois adaptée à la perfection dans la série. Les fans de la première heure assistent à un véritable spectacle, où références et dialogues sont très dignement réutilisés. Les cinéphiles s’y retrouvent, de par cette démonstration de mises en scène rigoureuses. Nous suivons Ellie et Joel dans l’immensité des contrées enneigées qui les entourent. Leur complicité s’accélère, tout comme le rythme de l’adaptation, et se fait plus forte au sein de ce sixième épisode. Sans aucune surprise, nous sommes sensibles aux divers clins d’œil à The Last of Us Part II, qui ne nous ont pas laissés indifférents. Ce dernier chef-d’œuvre place à nouveau la barre très haut. Émotions fortes, action, nous nous empreignons de l’essence même de la licence. Enfin, et comme toujours, nous avons hâte d’être à la semaine prochaine pour découvrir ce que nous réservera cette série, déjà phénomène. »
Critique avec Spoilers
Le paradoxe de cet épisode 6 de The Last of Us, c’est que s’il est le moment charnière de cette aventure qui permet d’amorcer tout ce qui reste à venir, il n’est pas riche en rebondissements. Nous notons cependant que la ville de Jackson a le droit à une très belle mise en avant et que de nombreux liens avec certains détails de The Last of Us Part II peuvent être décelés par connaisseurs de la licence. La fameuse scène culte entre Joël et Ellie, qui pourrait s’apparenter à une cassure nette dans leur relation, mais qui a pour effet de les rapprocher plus que jamais, est fabuleusement adaptée dans ce format télévisuel. Cette séquence nous permet de contempler le changement de mentalité chez Joël. Bien qu’il soit rongé par la peur de perdre une autre fille, il décide de ne pas tourner le dos à celle qui représente désormais sa raison d’être. Ellie est sa responsabilité et il ne peut se résoudre à la laisser à quelqu’un d’autre. Tommy a désormais une vie bien à lui, avec un enfant en route, il est temps pour notre héros un peu bougon de recommencer à vivre au contact de cette adolescente qui lui apporte tout ce qui lui manquait.
L’épisode se termine sur l’arrivée de notre binôme à l’ancienne base des Lucioles. Malheureusement, elle semble désertée depuis longtemps. Ils ne trouvent pour occupants que les singes qui devaient servir à diverses expérimentations à l’époque où le bâtiment était encore une enceinte universitaire. Un plan d’opération semble cependant indiquer que le gros des troupes de Marlène se regroupe autour de Salt Lake City. La route s’annonce longue mais, au moins, il y a une direction à suivre. Le monde de The Last of Us étant ce qu’il est, des pilleurs surgissent. Malgré une belle démonstration de force de Joël, ce dernier est gravement blessé au niveau de l’abdomen. L’épisode se termine sur l’image glaçante d’une Ellie au chevet de son compagnon de route qui se vide de son sang dans la neige, alors qu’elle le supplie de ne pas la laisser seule. La reprise fantastique de Taking A Ride With My Best Friend dans les ultimes secondes risque d’occuper l’esprit de tout le monde jusqu’au prochain épisode.