En 2011, Sony Interactive Entertainment lance sa nouvelle console portable, la PlayStation Vita. Or, une entreprise espagnole, Vieta Audio, remet en cause la propriété intellectuelle sur cette appellation. Ainsi, après des années de bataille juridique, SIE perd une partie de ses droits sur la marque « Vita » au sein de l’Union européenne.
Résumons l’affaire…
2011 : Lancement de la PS Vita
L’affaire Sony Interactive Entertainment contre Vieta Audio (T-561/20) ne date pas d’hier. En 2011 Sony obtient la propriété de la marque « Vita » pour sa nouvelle console portable. Celle-ci sort au Japon en décembre la même année, avant son lancement à l’international en 2012. D’un point de vue juridique, elle relève de la classe 9 selon l’arrangement de Nice, pour les catégories suivantes :
- Supports de données avec programmes enregistrés, logiciels informatiques ;
- Supports audio et/ou d’images (non en papier) ;
- Bandes et cassettes magnétiques ;
- Bandes audio ;
- Disques compacts audio ;
- Cassettes DAT (bande audionumérique) ;
- Vidéos disques, bandes vidéo ;
- Pellicules impressionnées ;
- Lithographies.
Or, en octobre 2011, la société espagnole Vieta Audio demande la déchéance de la marque pour « non-usage » sans motif justifié. Cette requête s’applique uniquement à l’Union européenne et s’appuie sur une période de 5 ans. Depuis, Sony n’a de cesse d’essayer de préserver sa marque.
La défense de Sony
De 2012 à aujourd’hui, Sony enrichit son dossier de documents attestant de son utilisation de la marque « Vita » dans l’UE. Dans un premier temps, elle rassemble tous les justificatifs liés au lancement de sa nouvelle console portable. L’annonce du nom de la PlayStation Vita remonte au mois de juin 2011 ; elle lance du même coup une large campagne promotionnelle. Qui plus est, Sony rappelle avoir présenté la console en août 2011 lors de la Gamescom. Or, l’événement se tient cette année-là à Cologne, en Allemagne.
Pour renforcer son argumentaire, Sony rajoute en outre tout ce qui se rapporte au jeu Aqua Vita. Il s’agit d’un titre mineur sorti sur 2007 sur PS3 qui repose sur une simulation d’aquarium. Tant bien que mal, la compagnie tente de prouver son usage de la marque « Vita » sur la période de 5 ans dénoncée par Vieta Audio. Malgré tous ces efforts, cela ne suffit pas…
Verdict final
Cette affaire aura demandé plusieurs révisions, notamment en raison de la compréhension du langage et du matériel technique. Le litige pousse notamment à se demander si une console de jeu portable peut être classée comme un « support de données contenant des programmes » ou un « support audio et/ou image ». Pour répondre à cette question, le Tribunal en vient à distinguer l’usage principal, sur lequel repose d’ailleurs l’argument de vente du produit, et les caractéristiques secondaires.
Autrement dit, la cour retient que la commercialisation de la PlayStation Vita auprès du public repose sur l’expérience de jeu qu’elle propose. D’une certaine manière, elle est donc bien « support de données contenant des programmes » et un « support de sons et/ou d’images ». Pour autant, elle ne se présente pas au consommateur en tant que telle mais bien pour sa fonction première qui est le jeu.
À ce titre, la cour rappelle qu’une marque doit être comprise dans son contexte. C’est celui-ci qui permet en outre de distinguer les produits ou services. La question de l’usage sérieux découle de cette problématique, et cela peu importe la renommée de la marque. Ainsi, si une marque est apposée exclusivement pour certains des produits ou services de l’enregistrement, il est acté qu’elle doit être révoquée pour le reste. D’autres sociétés peuvent dorénavant se servir de l’appellation « Vita » pour les catégories dans lesquelles Sony n’est pas parvenu à prouver son usage de la marque, à savoir le transport des donnée et le support d’images et sons.
Quelles conclusions en tirer ?
Cette affaire rappelle qu’une marque peut à tout moment faire l’objet d’une déchéance si elle ne correspond pas aux catégories pour lesquelles elle a été déposée. La propriété intellectuelle d’une société sur la marque ne peut en effet pas reposer sur l’hypothèse d’une utilisation quelconque ; elle s’appuie alors sur un usage concret, défini dans l’espace et le temps. En ce sens, la perception du produit par le consommateur est essentielle pour juger de quelle catégorie il relève.
À partir de là, il faut se rendre à l’évidence que la réputation d’une marque ne lui octroie aucun passe droit. Dans le cas présent néanmoins, même si le verdict n’est pas au bénéfice de Sony, son effet ne sera pas du plus grand effet aujourd’hui. De fait, si ses stores restent ouverts, cela fait deux ans que Sony a stoppé la commercialisation de la PSVita. De plus, cette décision ne vaut que pour le territoire de l’Union européenne. Tout dépend en somme des projets de Sony Interactive Entertainment quant à cette marque.