25 ans, 26 ans, 27 ans… qu’importe, au fond. Depuis 1994 ou 1995, PlayStation accompagne la vie de millions de joueurs. C’est particulièrement le cas en France, où la marque nippone domine les ventes, et bien évidemment pour la rédaction de PlayStation Inside.
Alors que la PlayStation 5 compte désormais comme une console de génération « actuelle », la création de PlayStation Inside est le prétexte tout trouvé pour actionner la machine à souvenirs et à remonter dans les limbes de la nostalgie. Morceaux choisis.
C’est un roc, c’est un pic, c’est un cap, que dis-je… c’est Nintendo !
Ce papier, s’il n’a pas vocation à couvrir toute l’histoire de PlayStation, ne pouvait néanmoins pas éviter la folle genèse de la marque.
Nous sommes en 1988. Le Mur de Berlin n’est pas encore tombé, et Neil Druckmann n’a encore que 10 ans. Un temps que les moins de… 40 ans ne peuvent pas connaître, donc.
À cette époque, Nintendo est le confortable leader sur le marché du jeu-vidéo. La concurrence est presque inexistante. Chez lui, Ken Kutaragi, cadre de Sony, voit sa fille passer le plus clair de son temps sur sa Famicom (Nintendo). Cette vision lui plaît autant qu’elle le hante et l’inspire : pourquoi sa fille ne jouerait-elle pas sur une console que son entreprise aurait produite ?
C’est ainsi, avec moult ellipses, qu’est née l’idée dont découlera la PlayStation. Kutaragi décide, sans l’aval de Sony, de proposer à Nintendo l’utilisation sous licence de sa dernière création, le processeur audio SPC-700. Furieuse, la direction de Sony est à deux doigts de virer Kutaragi, avant que le PDG du groupe, Norio Ohga, ne préfère le garder pour son potentiel.
De son côté, Nintendo, de plus en plus intéressé par les capacités d’innovation de Sony, approche la firme et signe un contrat sous lequel Sony s’engage à développer une technologie CD-ROM intégrable dans la Super Nintendo. S’ensuivent des péripéties dignes des meilleurs films d’espionnage. Malins, les cadres de Sony précisent dans le contrat qu’ils gardent la licence internationale pour chaque « Super disc » vendu. Forts de cette technologie, une idée germe doucement dans leur esprit : créer leur propre console. Imaginé par Kutaragi, le produit PlayStation est annoncé en 1991. Dans le plus grand secret, Nintendo, échaudé par le contrôle que Sony cherche à avoir sur la technologie CD, casse le contrat de 1988 et signe un accord similaire avec le concurrent principal de Sony : le néerlandais Philips.
Eux-mêmes échaudés par le coup bas de Nintendo, les cadres de Sony se tournent vers SEGA, et leur proposent de concurrencer Nintendo en partenariat. Dans l’une des pires décisions de l’histoire de la compagnie, le conseil d’administration de SEGA rejette promptement la proposition de Sony, arguant que cette dernière ne savait faire « ni du software, ni du hardware ». Visionnaire, donc.
À partir de 1992, après quatre années de négociations infructueuses, Sony décide de la jouer solo. Ralenti par une forte opposition interne, qui voyait en le jeu-vidéo une industrie sans importance, le développement de la PlayStation est transféré par Ohga, l’un des seuls à en pressentir le potentiel, dans la division Sony Music. Bien aidé par l’expérience de la division dans le CD-ROM, Kutaragi accélère le développement. Dans son esprit, la donne est claire : la console devra offrir une technologie sans précédent par l’utilisation du CD, et permettre l’affichage de graphismes intégralement en 3D.
Une console qui marque un tournant technologique et technique
Dans les mois précédant sa sortie, la PlayStation est appréciée par les développeurs pour sa facilité d’utilisation et d’association avec le PC. Ces outils, alliés au fait que la PlayStation était, pour l’époque, l’une des consoles les plus puissantes jamais conçues, ont convaincu plusieurs studios de se lancer dans la production de jeux pour la console.
Outre l’aval des studios tiers, Sony veut, dès avant le lancement de la PlayStation, sécuriser des exclusivités. La firme japonaise signe des contrats pour des exclusivités de fonctionnalités (à l’image de Mortak Kombat 3), ou achète l’entièreté de studios (comme les anglais de Psygnosis).
Au premier E3, en 1995, Sony arrive confiant. La Playstation, lancée 6 mois auparavant au Japon, marche bien. En prévision d’une sortie mondiale, l’entreprise joue son va-tout : Michael Jackson fait une apparition lors de la conférence, et des jeux très attendus sont annoncés pour le lancement, comme « Wipeout », « Ridge racer » ou « Tekken ». Outre ces annonces, Sony fait en 1995 ce qui sera réitéré une quinzaine d’années plus tard. L’entreprise joue sur l’effet d’annonce, et quand SEGA place la Saturn à un prix de 399$, Sony répond sans attendre : sa console vaudra… 299$. Souvenirs, souvenirs…
Lancée en fanfare dans le monde entier, la PlayStation constitue un sommet de ce que le jeu-vidéo pouvait offrir à l’époque. Elle devient rapidement un phénomène culturel, et marque durablement toute une génération de joueurs.
Plus grand, plus fort, plus beau : le raz-de-marée PlayStation 2
À la fin des années 1990, Sony domine le marché mais ne se repose pas sur ses lauriers. Dès fin 1994, la firme lance le développement du successeur de sa PlayStation. Forte de son expertise désormais reconnue, elle donne bien plus de moyens à l’équipe créative, lui permettant d’inclure dans ce qui s’appellera sobrement la « PlayStation 2 » un lecteur DVD, une connectivité à internet, et surtout, une rétrocompatibilité avec les jeux PS1.
Au cours de l’année 2000, Sony lance sa nouvelle console à travers le monde. Alors que Microsoft sort à peine sa première console, et que Nintendo se démarque de plus en plus avec sa Gamecube, le concurrent principal de la PS2 au départ est la Dreamcast de SEGA.
Comme l’histoire est un éternel recommencement, les mêmes problèmes rencontrés pour la PS5 arrivent à la PS2 : retards de production, ruptures de stock en magasin. Cela ne fait toutefois que renforcer l’image de la marque PlayStation, qui garde encore une avance technologique confortable sur ses concurrents. C’est d’ailleurs à ce moment qu’arrive votre cher rédacteur, dont les premiers pas sur PlayStation datent de 2001, sur le jeu « F1 2001 ».
De 2000 à 2006, la PlayStation surfe sur la vague du succès comme personne : celle qui deviendra la console la plus vendue de tous les temps (155 millions d’unités) accueille jeu mythique sur jeu mythique, et s’impose dans le monde entier comme LA console à avoir. Le marketing est simple, et efficace : les meilleurs jeux sont sur PS2, tous vos amis ont la PS2… achetez-vous donc une PS2.
Menant une politique de baisse annuelle de prix, Sony inscrit sa console dans l’imaginaire collectif comme la console du jeu-vidéo. Elle est celle de tous les succès : Ico, Shadow of the Colossus, Jak & Daxter, God of War, Final Fantasy X, Metal Gear Solid 2, et maints autres… auquel votre rédacteur ne jouait que trop peu, occupé qu’il était à poncer PES 6 et Jak X. Eh oui…
À voler trop près du soleil…
Entre 2005 et 2006, alors que la France se qualifie difficilement pour le Mondial de football et échoue héroïquement en finale, Sony peaufine les derniers détails de la PlayStation 3. Après les succès monstres des deux premières itérations, la compagnie japonaise est plus attendue que jamais. Et, comme souvent dans ce genre de situation, le péché d’orgueil s’invite à la table.
Alors que Microsoft lance en avance sa Xbox 360, aux capacités connectées importantes, aux exclusivités nombreuses et qualitatives et aux ventes remarquables, Sony se lance dans la course à la HD avec une console surpuissante, mais non sans défaut.
D’un prix de 599$ (599 euros donc), la console est tièdement reçue à son lancement, pour son prix comme pour la difficulté à développer dessus. Les exclusivités, si nombreuses sur PS2, manquent relativement à l’appel (sauf « Heavenly Sword », que votre rédacteur défendra devant l’éternel). En 2006 en 2007, en fonction des zones de lancement, la PS3 débute mal sa vie. Sa mémoire, ses services et son lecteur blu-ray ne suffisent pas à dépasser une Xbox 360 bien lancée. Souvenons-nous de la soirée de lancement à Paris, très peu suivie, et de la fameuse péniche payée par Xbox France, sur laquelle on pouvait lire « Xbox 360 loves you »…
Il faudra attendre 2009, et le lancement de la première version slim (et son design magnifique) pour voir la PlayStation 3 se lancer définitivement. Son prix s’aligne enfin sur le marché, et son service en ligne, autrefois décrié pour ses bugs face au Xbox live, inverse la tendance grâce à sa gratuité. Le blu-ray, qui se démocratise, remporte aussi l’adhésion, en permettant aux joueurs de disposer de leur jeux sur un seul CD, contrairement à la Xbox et ses nombreux DVD.
Et surtout, surtout, les exclusivités atteignent le niveau de qualité que Sony appelait de ses vœux depuis 2006. Entre « Demon souls », « Uncharted 2 », « Uncharted 3 », « God of War 3 », « The last of us » et d’autres, la PS3 grignote son retard sur ses concurrents, et dépasse la Xbox 360 sur le fil, pour finir comme la console la plus vendue dans le match opposant les deux constructeurs.
Le succès tardif de la PS3 contraste alors avec celui de la PlayStation Portable. Lancée entre 2004 et 2005, la PSP marque l’entrée de Sony sur le marché des consoles portables. Plus puissante que les concurrentes de Nintendo, et au design salué, la PSP connaît un succès continu sur toute sa durée de vie. Elle aussi imprime une image indélébile dans l’imaginaire collectif.
À ce beau succès, Sony répond par une nouvelle version de la PSP, la PSP Go, abandonnée presque aussi vite qu’elle fut commercialisée, mais surtout par la sortie de la PlayStation Vita. Dotée des technologies 3G, Bluetooth et d’un pavé tactile, la PS Vita semble en 2011 et 2012 clairement en avance sur son temps. Avec un prix attrayant, la console a tout pour plaire, mais ne rencontre pas son public. Sortie trop tôt peut-être, elle se fait dévorer par la Nintendo 3DS, qui en 2015 contrôlait 81,5% des parts du marché des consoles portables.
Comme le bon vin, les meilleures choses se bonifient avec le temps
En 2012 et 2013, Sony prépare le lancement de sa quatrième génération de console. À l’époque, le doute est légitime : les japonais arriveront-ils à produire une meilleure console que la concurrence chez Microsoft ?
Lorsqu’arrive l’E3 2013, l’industrie du jeu-vidéo bruisse de rumeurs sur les nouvelles consoles des deux mastodontes. Le grand match est prévu lors des conférences. Microsoft, qui inaugure le bal, dévoile une console connectée, qui refuse d’être utilisée avec des jeux d’occasion, et au prix de 499$ qui fait scandale. Chez Sony, le champagne est sabré : l’affront du lancement de la précédente génération pourra être lavé. En 24 heures, la firme peaufine sa stratégie. Elle dévoile une console plus puissante pour les jeux tiers, qui laisse le cours libre à l’occasion (souvenez-vous de cette fameuse vidéo, de 22 secondes seulement, où deux cadres de Sony s’échangent un jeu avec un sourire narquois), et qui a surtout un prix sous la frontière acceptable pour le public : 399$.
De sa communication erratique et incomprise, la Xbox One ne se relèvera jamais. Elle laisse le champ libre à la PlayStation 4, qui prend la tête pour ne plus jamais la lâcher : ses exclusivités se vendent comme des petits pains jusqu’à aujourd’hui et ont une qualité rarement démentie, et ses ventes sont mirobolantes.
Après la PS4, Sony tranche avec le système classique de générations et sort en 2016 la PS4 Pro, plus puissante mais aussi plus bruyante. Si la console souffre un peu de la comparaison face à la Xbox One X, son succès reste honorable, et l’avance prise par la PlayStation 4 standard reste de toute manière trop importante pour que la tendance ne s’inverse.
Sur PS4 plus que sur PS3, Sony profite du succès de sa console pour financer plus de nouvelles licences. Ainsi, entre 2013 et 2020 sortiront des jeux à succès critique et public tels que « Bloodborne », « Horizon Zero Dawn », « Detroit : become human », « Spiderman », « Days Gone », « Ghost of Tsushima »… Ces jeux, qui sont devenus en peu de temps des productions majeures, témoignent aussi de la qualité de la communication générale de Sony pour sa PlayStation. Si, comme toutes les entreprises, Sony commet des erreurs, sa communication sur la génération PS4 fut remarquable sur plusieurs points, et en particulier au niveau des conférences E3. Personne en effet n’a oublié la conférence de l’E3 2013 précédemment décrite, ou encore celle de 2015, avec la présentation de trois arlésiennes que les joueurs croyaient mortes à jamais (« The last guardian », « Shenmue 3 » et « Final Fantasy 7 Remake).
De cette génération, on retiendra enfin l’audace de Sony, qui avant les autres s’est lancé dans la course à la réalité virtuelle. Avec son casque PlayStation VR, très qualitatif vu le prix, la PlayStation 4 a accueilli plusieurs titres marquants, et pavé le chemin pour la démocratisation de cette technologie.
C’est ainsi que, petit à petit, Sony est arrivé à 2020 et au lancement de la PlayStation 5. Dotée d’un SSD et de performances comparables à sa concurrente principale, le console a directement rencontré un important succès, autant au niveau des précommandes qu’à celui, pour l’instant, des ventes.
Le reste, comme le veut l’adage, est une histoire à suivre…
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