En 2017, les Français d’Asobo Studio sortaient A Plague Tale : Innocence. Inspiré des productions Naughty Dog, le titre avait su se démarquer par l’originalité de son univers. En effet, l’action prend place en Guyenne durant le XIVe siècle alors que la guerre de Cent Ans et la Peste noire ravagent les populations. Nous suivions dans cette aventure la destinée d’Amicia et son petit frère Hugo, confrontés à la Peste personnifiée par des hordes de rats. Avec ce récit à la fois poignant et juste, Asobo Studio avait su se faire remarquer dans une industrie où les productions plus modestes peinent parfois à se faire leur place. La suite était donc particulièrement attendue et c’est un peu plus de trois ans après le premier opus que nous retrouvons cet attachant duo, six mois après les événements d’Innocence. Qu’en est-il donc de ce second épisode (testé sur PS5) ? Est-il la confirmation qu’il faudra désormais compter sur Asobo pour titiller les mastodontes de l’industrie à sa modeste échelle ?
Plus beau, plus grand, plus fort
Dès l’introduction, vous remarquerez à quel point A Plague Tale : Requiem est plus ambitieux que le précédent titre du studio sur tous les aspects. Le premier point qui saute aux yeux est la beauté du titre. Soutenu par une direction artistique toujours aussi réussie, Requiem alterne à merveille entre séquences oniriques et angoissantes, proposant des décors variés, mais également très différents des environnements rencontrés dans le premier opus. En effet, la Provence sera le principal terrain de jeu de cette suite. L’occasion de vivre une aventure beaucoup plus colorée et idyllique. Pour autant, la Macula n’a évidemment pas disparu du sang de notre petit protégé. Un contraste encore plus fort est donc créé entre l’apparente beauté de la région et les dégâts que causera la Peste.
D’un point de vue purement technique, la réussite est (presque) totale. Profitant d’une sortie exclusive sur consoles de nouvelle génération et PC, Asobo Studio rend une copie impressionnante et montre son savoir-faire dans ce domaine. Dès l’introduction, vous noterez les progrès effectués dans la modélisation des visages, ce qui apporte un réel plus à l’expérience de jeu, tant cela permet de ressentir avec justesse les émotions de nos personnages. De plus, les éclairages, force du premier opus, sont toujours très réussis. Autre point notable, la quantité de rats visibles à l’écran sera parfois colossale. Petit bémol cependant, le titre ne propose pas de mode 60 fps bloqué, une décision pour le moins étrange tant le mode fluidité semblait être devenu la norme depuis la sortie de la PS5. Quelques chutes de framerate ont d’ailleurs ponctué notre aventure. Dernier petit point technique, la DualSense est plutôt bien utilisée, notamment dans sa gestion des vibrations face aux nuées de rats.
Les compositions musicales accompagnent également à merveille l’action et accentuent de manière très forte les fluctuations de tonalité de l’œuvre. Tout comme dans Innocence, les variations musicales appuient le propos du titre et renforcent l’implication du joueur. Composée par Olivier Derivière, la bande-originale de Requiem participe toujours à la création des différentes atmosphères rencontrées durant l’aventure, quelle que soit la situation.
Une histoire touchante, centrée sur ses personnages
Pour rappel, A Plague Tale se terminait par le départ de la famille De Rune vers le sud de la France après les terribles événements racontées. Et c’est quelques mois plus tard que vous retrouverez la petite troupe en direction d’une petite cité provençale à la recherche d’une solution et d’une aide plus que bienvenues face à la Macula, toujours présente dans le sang d’Hugo. Les relations entre les personnages sont toujours au cœur du récit et les liens qui se tissent et se défont seront la clé de l’avenir de notre petit protégé. Ainsi, vous retrouverez dans cette aventure certains personnages du premier opus tel que Lucas, mais également de nouveaux compagnons que nous vous laisserons le soin de découvrir.
Même après la Guyenne et la guerre, l’apparente paix sera évidemment de courte durée pour notre petite troupe. Hugo sera plus que jamais confronté aux horreurs de ce monde, particulièrement accentuées par son point de vue d’enfant. La personnification de la Peste par l’intermédiaire des rats est toujours aussi pertinente et permet de montrer une nouvelle fois l’impuissance des populations de l’époque face à cette épidémie ayant décimé 30 à 40 % de la population européenne de l’époque (environ 25 millions de victimes). Les nuées de rats sont d’ailleurs toujours aussi impressionnantes et constituent un personnage à part entière du titre, avec lequel il faudra savoir composer.
De plus, la narration environnementale est encore une force de la série. Entre vestiges du passé et représentation romancée du Moyen-âge, les environnements participent réellement au récit et à la construction de l’univers. Concernant la description de la Provence du XIVe siècle, les développeurs semblent une nouvelle fois s’être nourris de l’imaginaire collectif construit notamment au cinéma. Ne cherchant pas l’exactitude historique, Requiem s’approprie bien les thèmes et codes de cette période telle que la chevalerie.
Dans la continuité de la proposition d’Innocence, la fraternité est la thématique principale de Requiem et le titre exposera de manière très touchante la relation unissant Amicia et Hugo. Croulant sous le poids de la responsabilité d’Hugo malgré la présence de sa mère, la trajectoire d’Amicia, accompagnant au mieux son frère tout en faisant face à ses propres démons, ne manquera pas de vous atteindre. Bien heureusement, elle ne sera pas seule dans cette aventure et les personnages gravitant autour du duo fraternel auront également leurs rôles à jouer. D’autres thématiques, très bien abordées par le titre, ne sont intentionnellement pas évoquées dans ce test afin de vous préserver au mieux de tout spoil. Sachez seulement ceci : A Plague Tale Requiem est bien plus qu’une œuvre traitant les relations unissant les membres d’une même famille.
Asobo Studio : le bon élève
A la manière de son predecesseur, A Plague Tale : Requiem propose une expérience solo narrative linéaire à la troisième personne alternant séquences d’infiltration, puzzles et phases type « walking simulator ». Malheureusement, ces séquences s’enchaînent souvent de manière trop prévisible. En effet, le cloisonnement des zones se traduit régulièrement par des entrées et sorties sous forme de portes, passages étroits ou sauts, indiquant très souvent le passage à un nouveau type de séquence.
Concernant l’infiltration, il est important de préciser que ces séquences tiennent bien plus du puzzle environnemental que de vraies séquences d’infiltration organiques. En effet, les capacités du joueur permettent de faire face à des obstacles spécifiques de manière très « mécanique ». Tout l’inverse donc des références du genre infiltration que sont Dishonored ou encore MGS V, qui eux proposent des expériences où l’expérimentation est au cœur de l’aventure. Précision importante : ce n’est pas un reproche en soit que nous faisons au titre. Ce n’est simplement pas l’expérience que voulaient nous offrir les développeurs.
Pour autant, ces séquences sont bien plus plaisantes à parcourir pour trois raisons. Tout d’abord, l’ouverture des arènes de jeu, comparativement au premier, offre à présent plus d’une solution pour passer les obstacles qui se dressent face à nous, ce qui n’était bien souvent pas le cas dans Innocence. Particulièrement lorsque les rats sont également présents dans l’aire de jeu. De plus, l’ajout de nouveaux équipements, à savoir l’arbalète et des couteaux à usage unique à la manière de The Last of Us, contribuent également à renforcer les possibilités du joueur pour répondre aux obstacles mis en place par les développeurs. Enfin, Amicia sera souvent accompagnée de partenaires offrant des options supplémentaires pour appréhender les situations à certains moments du jeu. Moments qui se résumeront bien souvent à enchaîner l’utilisation de cette capacité au détriment du reste de la palette de mouvements de notre personnage. Autre bémol, l’approche action est malheureusement ratée à cause de la fragilité d’Amicia dont les mouvements sont souvent alourdis par le fait qu’elle tienne presque tout le temps la main d’Hugo. C’est d’autant plus dommageable que cette situation est parfois obligatoire. Heureusement, ces moments sont tout de même sauvés par l’arbalète qui offre plus de puissance au joueur.
Bien heureusement, nous en parlions, des séquences de puzzle et de marche, la plupart du temps couplées, permettent également de faire respirer le joueur. Ainsi, à intervalles réguliers, vous devrez résoudre des petits casse-têtes environnementaux demandant au joueur d’utiliser son équipement et ses compagnons de manière adéquate. Ces séquences, particulièrement propices à la narration, renforcent l’attachement du joueur envers les protagonistes à travers de jolies séquences entre les personnages.
Concernant le système de progression, le joueur débutera le jeu sans aucun équipement mis à part sa fronde équipée de pierres. Très vite, Amicia récupérera la majorité de son arsenal, à savoir les différents types de munitions, la possibilité d’utiliser des vases comme diversion et une arbalète. Ces équipements et nos sacoches de ressources et de munitions seront ensuite améliorables à l’aide d’établis. Vous pourrez par exemple améliorer la vitesse de chargement de la fronde. De plus, vous accumulerez de l’expérience se répartissant dans trois arbres de compétences en fonction de vos actions, débloquant lesdites compétences de manière automatique.
Ainsi, Asobo Studio rend une copie classique et plutôt convenue concernant le gameplay avec A Plague Tale : Requiem, malgré de bonnes idées améliorant l’expérience globale. Alors certes, la proposition est complète, cohérente et fonctionne plutôt bien, mais nous regrettons un certain manque de folie du titre.
CONCLUSION
A Plague Tale : Requiem
Avec ce second opus, Asobo Studio démontre une nouvelle fois leur capacité à saisir ce qui faisait l’essence des productions dont ils s’inspirent. Alors certes, tout n’est pas encore parfait, cela manque d’innovations, de folie et de surprises. Nous pourrons également lui reprocher son classicisme dans sa structure et ces mécaniques, mais l’essentiel n’est pas là. Son immense force réside dans l’aventure qu’il nous fait vivre, destinée de deux enfants unis à tout jamais par le sang et l’amour. Un titre qui ne manquera pas de ravir les fans du genre.
LES PLUS +
- Une écriture soignée
- Des personnages réussis
- Un gameplay solide
- Une excellente composition muscicale
- Graphiquement très réussi
- L'exploitation de la DualSense
- Une fin qui marquera
LES MOINS -
- Quelques chutes de framerate
- Gameplay laborieux une fois repéré
- Un game design encore très faible et archaïque
Commentaires 1