Nous sommes le 15 septembre 2016 et le Japon vit l’annonce d’un jeu qui va durablement marquer le monde des J-RPG et laisser son empreinte dans la culture populaire, au point de voir son héros intégrer le prestigieux casting de Super Smash Bros. Après plusieurs années de communication ambiguë pour entretenir l’attente des fans, ainsi que de nombreux trailers de moins en moins mystérieux, la suite du RPG à succès SMT Persona 4 sort enfin sur PlayStation 3 et PlayStation 4. Pour la première fois de l’histoire de la licence, ce nouvel opus n’affiche pas le patronyme Shin Megami Tensei. Résultat ? Un succès commercial et critique stratosphérique pour une œuvre si atypique, qui permet à la licence de prendre définitivement son indépendance vis à vis de sa série mère. En l’espace de trois petites années, Persona 5 atteint les 3,2 millions d’exemplaires vendus. À titre de comparaison, le précédent opus, souvent considéré comme le chef d’œuvre absolu de la licence, ne s’était écoulé qu’à 1 millions d’exemplaires.
Le 31 octobre 2019, afin de fêter ces chiffres, l’éditeur ATLUS sort une version améliorée de Persona 5 uniquement au Japon pour quelques semaines, en exclusivité PS4, avant de ressortir simultanément sur PlayStation 5, Xbox Series et Nintendo Switch en 2022. Suite au succès inattendu de la version d’origine en France, nous avons même eu le droit à un sous-titrage intégral en français. Au final, que vaut ce Persona 5 Royal ? Est-il à la hauteur de sa réputation ? Mais, surtout, est-il aussi gargantuesque que ce que nous pouvons lire ? C’est ce que nous allons voir à travers cette critique écrite aux cotés de nos chers Voleurs Fantômes qui nous ont accompagné tout au long de cette plongée dans ce jeu si atypique, à la croisée des mondes entre le Visual Novel et le J-RPG. Nous remercions Kemy Mbelek pour avoir amorcé l’idée de cette critique.
Présenter simplement Persona 5 Royal (ou The Royal au Japon), peut se résumer ainsi : c’est une version revue de Persona 5 qui ajoute des options de gameplay et abaisse la difficulté du jeu, tout en proposant un semestre en plus, ainsi deux nouveaux personnages majeurs : Yoshizawa et Maruki. Ces derniers sont d’une importance cruciale pour le tout nouveau pan de scénario, il est donc primordial de bien gérer ses relations avec eux afin de débloquer la totalité de l’expérience Royal et ainsi comprendre tous les tenants et les aboutissants de l’œuvre. Il s’agit, ni plus ni moins, de la forme ultime des aventures de Joker et des Voleurs Fantômes. Le jeu se destine donc autant aux néophytes qui n’ont jamais posé leurs mains sur la licence, qu’à ceux ayant déjà terminé la première version de Persona 5.
Persona 5 ou le syndrome de Peter Pan
Persona 5, à l’instar de tous les épisodes de la licence depuis le troisième opus, nous fait incarner un lycéen. Nous suivons donc les aventures de Ren Amamiya qui est accusé d’un acte malveillant, bien qu’il clame son innocence. Il échappe à la prison grâce à son jeune âge, et est donc condamné à une mise à l’épreuve afin qu’il prouve qu’il peut encore être un élément respectable de la société japonaise. Il est placé par la justice dans un lycée réputé de la ville de Tokyo. Il doit donc déménager et poser ses valises chez Sojiro Sakura, un gérant de café qui lui servira de tuteur pour son année de réhabilitation. Dans le même temps, la mégalopole japonaise est frappée par une vague d’incidents étranges où des personnes souffrant de « rupture mentale » provoquent des accidents mortels. Pendant sa première nuit à Tokyo, notre héros rêve de la Chambre de Velours, une prison luxueuse qui représente son cœur, habitée par deux jeunes gardiennes, jumelles et borgnes, ainsi que par un étrange gardien au long nez, Igor. Ils l’avertissent qu’il est prisonnier de sa propre destinée et qu’il doit se libérer. C’est ainsi qu’il découvre le Métavers et gagne sa capacité d’invoquer des Personae, en plus d’acquérir la capacité de voler les cœurs des gens afin de « purifier » leur âme.
Le premier jour de sa scolarité, alors qu’il pleut énormément, un homme d’apparence sympathique lui propose de le déposer à son lycée. Le protagoniste refuse poliment, alors que l’homme emmène une jeune fille qui semblait réticente à l’accompagner. Notre héros rencontre alors Ryuji Sakamoto, qui suivait la voiture et qui semble détester Kamoshida, le conducteur de la voiture, un professeur qu’il décrit comme un pervers redoutable. Les deux jeunes garçons se lient rapidement d’amitié et découvrent par hasard que le lycée est parasité par un monde parallèle, prenant la forme d’un palais sordide, qui représente toutes les perversions de Kamoshida. C’est ainsi qu’ils rencontrent Morgana, une créature féline amnésique qui leur explique tout ce qu’elle sait sur le métavers. Ensemble, ils fondent les Voleurs Fantômes, et sont rapidement rejoints par Ann Takamaki, la jeune fille que Ren avait aperçu à bord de la voiture du professeur pédophile au début de l’année scolaire. L’alliance des quatre adolescents va permettre la chute de ce prédateur sexuel, qui sera la première victime de ce groupe de justiciers.
Voilà un résumé simple de la longue amorce du scénario de Persona 5 qui, malgré de grosses qualités d’écriture, tombe parfois dans une certaine immaturité. Il s’agit néanmoins d’une histoire puissante qui nous conte la dernière année scolaire d’une bande de lycéens avant leur grand saut vers le monde des adultes. Ainsi, nous incarnons ces adolescents qui veulent changer la société japonaise et nous les suivons tout au long de l’année scolaire, avec l’obligation de devoir jongler entre leurs activités de lycéens et de justiciers. Il est donc nécessaire de rapidement apprendre à maîtriser l’agenda pour ne pas se retrouver débordé. Persona 5 est un jeu jusqu’au boutiste qui nous fait vivre presque tous les jours d’une année scolaire. Cette gestion sur le temps long et les thématiques abordées font que le joueur se retrouve confronté à des situations rarement évoquées dans des jeux de rôle japonais, comme le harcèlement, les attouchements sexuels et le suicide. Si certains arcs sont particulièrement brillants et déchirants, d’autres ont malheureusement des résolutions un peu trop simplistes et caricaturales. Nous pouvons également reprocher le fait que certains de nos compagnons soient beaucoup trop ancrés dans certains clichés d’écriture. De plus, ce Persona jette parfois sa subtilité à la poubelle pour nous répéter en boucle que tous les adultes sont des monstres corrompus. Fort heureusement, de nombreux passages viennent nuancer cela et rappellent qu’être adulte c’est surtout une aventure bien compliquée, qui nous pousse parfois dans un abysse sans fond. Il se dégage ainsi un vrai parfum de mélancolie et de nostalgie qui parlera à plus d’un joueur. Il est très aisé de se remémorer ces années au lycée et de penser à ce que nous serions prêts à payer pour revivre ne serait-ce qu’une journée de cette époque faite d’insouciance et de grands sentiments.
C’est pour cela que nous finissons par nous attacher aux personnages, même aux plus singuliers. L’arc narratif du personnage de Futaba est l’un des plus réussis de par sa justesse d’écriture. Si le jeu a parfois des petites faiblesses d’écriture, il est très facile de lui pardonner ses errements tant l’ensemble se veut solide, surtout quand on sait qu’une partie du récit a été entièrement retravaillée après l’incident nucléaire de Fukushima en 2011. L’aspect qui nous accroche immédiatement c’est l’alchimie de ce groupe de lycéens qui atteint de très hauts standards de qualité. Chacun des personnages vous marquera à sa manière, dans ses motivations et sa singularité. Soyez cependant prévenus, Persona 5 étant un croisement habile entre un J-RPG traditionnel et un visual novel, le titre peut être extrêmement bavard. Ça parle beaucoup et parfois pour nous répéter de façon légèrement différente ce que nous savons déjà. L’aventure souffre donc d’un léger problème de rythme aux environs des mois de novembre-décembre. Les dialogues peu intéressants y sont majoritairement concentrés. Fort heureusement, la fin de ce premier arc et tous les événements de la partie Royal redonnent un sérieux coup de fouet à l’histoire qui finit dans une apothéose douce-amère marquant la fin de l’enfance.
Bienvenue dans ma vie de lycéen
Nous l’avons écrit un peu plus haut, mais Persona 5 est un jeu jusqu’au boutiste. Nous pouvons adhérer à sa proposition et l’adorer, tout comme il est possible de la rejeter, car elle n’a rien de commun. Quand on se lance dans cette aventure, il faut être prêt à s’investir plus d’une centaine d’heures, car le jeu utilise son concept au maximum. Là où certains jeux vous font incarner des étudiants, sans que cela n’ait aucune incidence sur votre expérience, au point que vous pourriez aussi bien incarner le concierge du bâtiment ou un agent d’entretien, la dernière création du P Studio vous fait plonger à pieds joints dans le quotidien parfois compliqué de ces étudiants menant une double vie de justicier. Nous avons donc là un J-RPG au tour par tour moderne, qui est également un énorme simulateur de vie. L’aventure ne se résume pas au fait de parcourir des donjons pour terrasser des monstres et venir à bout de vilains adultes corrompus par leurs vices. Nous sommes libres de nos mouvements et nous avons la responsabilité de devoir gérer notre emploi du temps. Vous allez donc vivre la quasi-totalité des jours de l’année scolaire, vacances comprises, du matin jusqu’au soir, et c’est à vous de trouver un moyen pour mener à la fois votre scolarité et vos activités de justiciers.
La vie au lycée est plaisante et ne manque pas d’interactivité. À certaines occasions, le joueur devra répondre aux questions des professeurs durant les cours, ce qui donne des petites séances ludiques d’apprentissage sur certains aspects culturels du Japon. Là où Persona 5 fait très fort, c’est qu’il ne s’enferme pas dans le cadre du lycée. En effet, toute la ville de Tokyo, par un habile découpage en quartiers plus ou moins ouvert, nous est proposée, ce qui permet de densifier considérablement l’aspect social de l’aventure. La vie d’un adolescent ne se résume pas qu’à sa scolarité et le jeu l’a parfaitement compris puisqu’un nombre considérable d’activités sont à notre portée. En effet, nous pouvons pêcher, nous entraîner avec un ami, regarder un film ou simplement rentrer chez nous pour étudier, jouer à un jeu rétro, lire des dizaines de livres ou aider Sojiro à tenir son café. Le petit détail qui rend ses activités primordiales, c’est qu’elles nous permettent de développer des compétences sociales telles que le charme, l’intelligence ou le charisme. Ces traits de caractère permettent de renforcer son personnage, mais aussi d’avoir plus de possibilités d’interaction avec les nombreux protagonistes qui croisent notre route au cours de l’aventure. En offrant autant de possibilités et un temps libre limité, Persona 5 renforce l’impact de chacune de nos décisions de façon fantastique. Il est par exemple possible de prendre un job étudiant, sauf que le temps passé à travailler pour gagner de l’argent dans l’optique de s’acheter de meilleurs équipements, c’est du temps en moins pour développer les caractéristiques de Ren ou pour renforcer vos relations avec vos compagnons.
Persona 5 met en avant l’importance des relations entre les individus, aussi bien dans son récit brute que dans ses mécaniques de jeu. Il est primordial de nouer des liens avec ces personnages que le titre qualifie de « confidents ». Ces personnages sont de tous âges, genres et horizons. Vous pouvez donc développer des relations avec vos partenaires des Voleurs Fantômes, avec d’autres lycéens, mais aussi avec d’autres personnages plus atypiques comme un médecin de quartier aux pratiques peu orthodoxes, ou un politicien sur le retour qui ressemble à bien des égards à notre Jean-Luc national. Il est d’ailleurs agréable de constater que tous ces personnages ont le droit à leur propre doublage, ainsi qu’à des histoires parfois aussi prenantes que certains segments de la trame principale. Il y a un véritable intérêt à améliorer ses relations, car chaque confident nous permet, au fur et à mesure que nous développons nos liens, de bénéficier de bonus qui densifient les phases d’exploration, améliorent les attributs de certains équipements, en plus d’apporter de nouvelles compétences redoutables pour faciliter les nombreux affrontements qui nous attendent dans les différents donjons de l’aventure. Il est même primordial de prendre le temps de développer certaines relations pour pouvoir débloquer l’arc Royal ainsi que la véritable fin. Persona 5 n’est pas qu’un jeu, c’est une véritable expérience qui va au bout de son concept.
Il y a un côté très satisfaisant dans le fait de suivre cette petite vie normale d’étudiant. La possibilité de vivre des histoires optionnelles qui s’étalent sur plusieurs semaines, voire mois, en parallèle de la trame principale s’avère très souvent grisante, mais surtout enrichissante. Dans ces moments là, Persona 5 a ce petit quelque chose d’ancré dans le réel, en dépit de toute la fantaisie qui le caractérise. Le simple fait de pouvoir manquer des occasions avec d’autres personnages, et donc certains axes de développement, donne une grande rejouabilité au jeu. Si les grandes lignes de l’histoire seront les mêmes pour tout le monde, aucun de nous n’aura véritablement le même déroulé de ce quotidien étrangement ludique. Évidemment, qui dit aspect social dans un jeu dit romances. De ce côté-là, Persona 5 se montre très généreux, car il est possible de démarrer une relation avec tous les confidents féminins, et même de cumuler les histoires si vous êtes du genre à aimer collectionner les conquêtes. Certains pourront être tentés de critiquer cet aspect du jeu, mais cela sied pourtant à ravir avec l’esthétique hautement stylisée de l’œuvre qui nourrit une ambiance parfois très sensuelle.
Un amour stylisé du Japon
L’atout charme de Persona 5 est son ambiance et sa représentation virtuelle de Tokyo. Il y a un sens du détail et de la composition artistique qui rend agréable la moindre de nos pérégrinations dans les différents lieux du jeu. Malgré une technique un peu dépassée, l’ensemble arrive à créer un tout qui n’a de cesse de nous éblouir. Il est bien difficile de ne pas se poser quelques minutes pour admirer les lumières qui composent la mégalopole japonaise ou de ne pas montrer son admiration quant à la précision du level design de certains palais ou zones en apparence anecdotiques comme les couloirs des gares du métro. Tout est si bien agencé et indiqué dans les décors qu’il est tout à fait possible de s’orienter en suivant simplement les panneaux d’indication, à l’image de ce que nous faisons dans la vie de tous les jours. C’est un véritable cocktail de couleurs où chaque zone semble avoir été pensée avec minutie.
L’amour du Japon se ressent à de nombreuses occasions. Nous avons de nombreux récits annexes qui nous permettent de nous immerger dans la société japonaise qui est différente de la nôtre à bien des égards. Pour un joueur occidental, il est fascinant de découvrir certaines spécificités politiques et culturelles. En Europe, nous fêtons la Saint-Valentin et il se trouve que cette célébration existe également au Japon, mais sous une forme quelque peu différente, car la célébration s’y déroule en deux temps. Alors qu’en Occident, ce sont plutôt les hommes qui offrent des fleurs, des cadeaux et invitent leur femme au restaurant, au Japon la tradition veut que ce soient les femmes qui offrent des chocolats aux hommes. Dans un premier temps, c’est donc eux qui sont célébrés et le centre de toutes les attentions. C’est un mois plus tard, le 14 mars, que le pays célèbre le White Day. C’est le jour où les hommes qui ont reçu des chocolats lors de la Saint-Valentin doivent offrir à la femme un cadeau en retour. Le jeu est rempli de petites anecdotes de ce genre et qui contribuent à en faire un objet ludique aux intérêts multiples.
Nous sommes bien loin des critères techniques d’une vitrine comme Horizon Forbidden West, mais son style graphique façon film d’animation japonais, qui est renforcé par la présence de cinématiques entièrement animées en deux dimensions, donne à Persona 5 une identité propre. C’est la démonstration qu’il n’y a pas nécessairement besoin de faire un jeu en monde ouvert pour créer un environnement qui déborde de lieux fascinants, explorables à n’importe quel moment, et qui se dévoilent tout au long de notre aventure. Au bout de quelques heures nous sommes déjà imprégnés de l’essence des quartiers qui ont tous leurs caractéristiques. Si Shibuya est une zone commerciale tout ce qu’il y a de plus basique, dans laquelle il fait bon flâner entre les cours pour manger de la street food avant d’aller au cinéma, d’autres environnements comme le quartier de Kichijoji sont plus versés dans la luxure et l’illégalité. C’est donc un terrain de jeu conséquent, qu’il est très facile de ne pas pouvoir découvrir dans son intégralité, car certaines zones ne se débloqueront qu’en fonction des relations que nous entretenons avec les différents personnages secondaires.
Ce sens du style se matérialise dans des éléments aussi basiques que les menus ou les transitions de zones. Ces ensembles de noir et de rouge qui se succèdent avec des animations différentes en fonction de si nous allons dans le menu des armes ou si nous décidons simplement de faire un voyage rapide en métro apportent un cachet qui ne donne jamais l’impression que nous sortons de la diégèse du jeu. Des choses toutes simples, comme le fait de voir notre personnage sortir son parapluie lorsque le ciel se déchaîne, permettent de maintenir l’immersion du joueur. Ainsi, il n’est pas rare de se balader sans véritable but, pour profiter de l’incroyable sound design ambiant de Persona 5, magnifié par une musique jazzy envoûtante et renforçant l’étrange sensualité de l’œuvre.
Le J-RPG par excellence
Toutefois, nous ne pourrions pas nous satisfaire de ce Persona 5 si ses systèmes de jeu n’étaient pas convaincants. Autant dire que ce dernier opus frappe très fort, car il arrive à incarner la quintessence de ce que doit être un jeu de rôle japonais au tour par tour. Le titre nous propose un éventail large, composé d’attaques de mêlée, d’attaques magiques basées sur différents éléments, ainsi que sur l’utilisation d’armes à distance. Les différents ennemis du jeu ayant tous des points faibles spécifiques, il appartient au joueur de trouver comment optimiser ses séquences d’attaque. Par exemple, si un monstre se révèle très résistant lorsque vous l’attaquez au corps-à-corps, peut-être qu’un tir de revolver entre les deux yeux arrivera à le fragiliser. Le fait de devoir prendre en compte les faiblesses de nos adversaires est classique, mais la multiplicité des systèmes d’assaut dans Persona 5 permet d’éviter que les affrontements ne deviennent trop répétitifs. Comme dans tout J-RPG qui se respecte, il y a évidemment des attaques que nous pouvons qualifier d’ultimes. Ici, on parle du ShowTime, qui est une attaque combinée en duo. Elles se déclenchent en fonction de certaines conditions, et permettent d’écourter un combat en plus d’ajouter une mise en scène particulièrement léchée.
Le jeu nous propose aussi de pouvoir utiliser la technique du Transfert. Cette capacité vous permet de passer votre tour à un des compagnons qui mènent l’assaut avec vous, et elle ne se débloque que si vous avez préalablement attaqué le point faible de l’ennemi. Pour peu que vous ayez une bonne analyse tactique des combats, vous pourrez ainsi lier plusieurs assauts pour annihiler en un temps record votre opposant. Le jeu arbore donc un aspect très stratégique, car il est primordial de comprendre le fonctionnement de ce système vu la complexité de certains affrontements. De plus, cela apporte un tel rythme au combat, qu’on a parfois l’impression de totalement sortir du carcan du tour par tour et de plonger dans un jeu d’action ultra dynamique et stylisé. Cela nous incite même à penser nos affrontements en amont, car nous devons vérifier que notre héros est entouré des meilleurs compagnons pour la zone, mais qu’il est surtout en possession des Personae les plus adéquates pour se sortir indemne des multiples donjons qui jalonnent l’aventure.
À ce moment du test, certains seraient tentés de demander ce qu’est une Persona. C’est très simple, il s’agit de l’incarnation de la personnalité profonde de celui qui s’éveille à l’utilisation des pouvoirs en lien avec le monde psychique. Si les personnages qui nous accompagnent ne peuvent utiliser qu’une seule Persona au long de l’aventure, même si elle peut évoluer en fonction de la manière dont nous développons nos liens avec son possesseur, notre héros peut en utiliser plusieurs et en changer à la volée en plein milieu d’un combat. Nous pouvons donc collecter des Personae, un peu à la manière des gentilles bestioles que vous pouvez capturer dans Pokémon. Il est également possible d’en fusionner entre elles afin d’en créer de nouvelles encore plus puissantes. Cette variété permet à chaque joueur de développer un style unique, et donc cela ajoute un certain intérêt quant au fait de recommencer une partie si l’envie nous prend.
Malheureusement, ou heureusement pour certains, Persona 5 n’échappe pas à un écueil récurrent des jeux de rôle japonais. En effet, à moins de parcourir l’aventure en mode facile, il est impossible échapper aux longues séances d’anéantissement de monstres pour faire progresser les personnages. Comme le titre se passe dans un environnement réaliste la majeure partie du temps, les développeurs ont eu l’idée de créer ce qu’ils appellent le Mémento. C’est une sorte de gros donjon qui s’étend jusque dans les profondeurs du monde métaphysique, et dont les environnements sont générés de façon procédurale, ce qui explique que son level design et sa direction artistique sont à des années-lumière de la qualité des dix donjons/palais qui rythment l’année scolaire. C’est également le lieu où nous devons accomplir la majorité des quêtes secondaires de l’aventure. Si la plupart de ces missions annexes sont anecdotiques, voire peu intéressantes, certaines peuvent se révéler très émouvantes, en plus d’apporter d’autres niveaux de lecture à l’univers que nous parcourons.
CONCLUSION
Persona 5 Royal
Persona 5 est un monument du J-RPG. Il fait partie de ces jeux qui entrent instantanément dans le panthéon de l'histoire de l'industrie vidéoludique, malgré des imperfections. C'est un jeu vaste et sublime qui nous tient en haleine plus d'une centaine d'heures de jeu. Il faut cependant garder en tête que ce n'est pas un jeu qui s'adresse à tout le monde, car il va au bout de ses idées et de son concept qui peut parfois s'avérer abrupt, même pour le joueur qui apprécie la démarche. La faute à certains moments qui s'étirent trop en longueur, en plus de perdre en qualité d'écriture. Malgré tout, c'est une œuvre jusqu'au boutiste qui demande un véritable effort d'implication, car on ne rentre pas dans l'aventure comme on pourrait le faire avec un jeu d'aventure classique. Tout le monde n'est pas prêt à accepter de gérer la vie scolaire et sociale d'un lycéen. Pourtant, n'en doutez pas, que ce soit par la puissance de son récit, sa représentation stylisée du Japon et la folie esthétique et ludique de ses donjons, Persona 5 est un jeu qui prendra racine dans votre cœur si vous êtes sensible à sa proposition. C'est l'expérience d'une vie.
LES PLUS +
- La direction artistique
- Le système de combat jouissif
- La musique jazz
- La trame globale
- L'écriture des personnages principaux
- La gestion de son calendrier
- Les différents quartiers
- Un sous-titrage intégral en français
- Les moments de grâce sur la fin de l'adolescence
LES MOINS -
- Un rythme moins maitrisé sur une portion de l'aventure
- Certains dialogues caricaturaux et enfantins